Trois mois que j'étais enfermé dans un cachot du château, manifestement installé depuis peu. Je n'avais droit qu'à un repas par jour et au mépris des gardes quant ce n'était pas de l'hostilité ouverte. J'avais été plusieurs fois malmené, et je voyais dans leur regard qu'ils me tenaient responsables de ce qui était arrivé à Luna. Je n'avais même pas essayé de les convaincre du contraire. Comment aurais-je seulement pu aller contre les preuves fabriquées ?

Ce jour là, j'avais été brutalement réveillé alors qu'il faisait encore nuit par deux gardes. Sans rien dire et sous la menace des armes fixées sur leur flanc, il m'avait attaché les mains puis traîné au dehors, vers la salle du trône, où ne se trouvait que le Prince. Celui-ci avait beaucoup changé depuis nos dernières rencontres : il s'était fait couper la crinière, beaucoup plus courte et portait même ce qui ressemblait à un uniforme militaire.

"Formidable, dis je en le voyant. De toutes les choses que nous avons produites et crées au cours de notre histoire, nous avons importé le dictateur de pacotille"

Un coup de sabot dans le ventre me fit taire et me jeta à genoux.

"Alors, voici le responsable de la plus grande tragédie de notre histoire...
- Y'a erreur "votre majesté", dis je avec un ton volontairement sarcastique, les responsables sont vos amis, mais je vous apprends r...."

Un autre coup m'envoya au tapis. Je commençai à avoir mal, mais qu'importe.

"Vous ne parlerez que quant je vous le dirai criminel. Et vous ne parlerez pas car vous n'avez rien à dire. Le jugement, mon jugement a été rendu. Vous serez exécuté à l'aube, sur la grande place de la ville, par décapitation. Je suis sûr que le public saura apprécier ce spectacle. Ce sera tout, amenez-le
- Vous pensez y gagner n'est-ce pas ? lui dis-je, tandis que je me relevais en grimaçant. Ils vous manipulent Blueblood. Vous êtes un pion, qui ne comprend même pas son rôle dans un plan trop grand pour lui."

Le troisième coup de sabot eut l'avantage de me faire oublier la douleur des deux précédents. Puis amené par les gardes, je quittai la salle, direction une sorte de garage où se trouvait une charrette manifestement conçue pour m'amener à l'échafaud. Malgré mes bravades, je n'en menai pas large. De toutes les façons dont j'avais imaginé ma mort, c'est bien la plus improbable qui serait mon destin. Exécuté sur une autre planète par des poneys aux couleurs fluos. Pendant un instant, je me suis demandé si je n'avais pas rêvé tout cela, mais la douleur des coups me ramenèrent à la réalité.

N'ayant rien de mieux à faire, je décidai d'observer mes deux gardes. L'un était gris et plutôt faible, l'autre rouge et assez costaud. Sans me quitter du coin de l'oeil, ils discutaient. Bien que je maîtrisais à présent bien leur langue, j'aurais été dans un état trop faible pour pouvoir comprendre ce qu'ils disaient sans l'amulette qui heureusement m'avait été laissée.

"Alors, qu'est-ce que tu as fais cette nuit ? demanda le rouge
- Rien de bien spécial. On a joué à ce jeu de cartes des humains avec quelques humains, le poker ça s'appelait je crois. J'y ai perdu 20 Equestres ! Et toi ?
- Je me suis promené au jardin avec cette jument là, Héloïse...
- C'est celle dont tu m'as parlé il y a une semaine ?
- Non, c'est une nouvelle Héloïse !
- Toi et les filles décidément. Et vous avez fait ça toute la nuit ?
- Non, elle est partie vers 23 heures. Ensuite, je me suis promené seul. J'aime ces promenades solitaires, elles sont propices aux rêveries.
- Si tu le dis. T'es quant même bizarre. Hum, on dirait que c'est l'heure de la fête pour ce chien.
- Eeeeyup"

Une à la limite, ça aurait pu être une coïncidence. Mais deux références à Rousseau dans la même conversation, ce n'était pas anodin. J'essayais de dévisager le poney rouge, mais le mauvais éclairage de la salle m'en empêcha. Le gris alla ouvrir les portes du garage, tandis que le rouge s'harnachait à la charrette. Puis, une fois leurs tâches respectives accomplies, ils se mirent en route, tandis que j'étais attaché dans la charrette. Dehors, une dizaine de gardes étaient alignés, probablement plus pour contenir la foule en colère que je voyais grandissante que pour m'empêcher de m'enfuir.

La charrette allait lentement, tandis que pleuvaient sur moi des insultes plus imagées les unes que les autres. Puisant au fond de moi ce qui me restait de vanité et d'orgueil, je me tenais droit, tentant de cacher mon tremblement. J'espérais leur fournir une image dont ils pourraient se souvenir si par bonheur ils étaient à nouveau libres un jour, une image qui leur ferait comprendre que je ne leur en voulait pas et que je ne les tenaient pas responsable de mon sort.

La suite des évènements fut très rapide. Un cri fut lâché du toit d'un des hauts immeubles qui bordaient la rue :

"POUR CELESTIA !"

Tout le monde dans la rue se retourna pour savoir d'où venait le cri, tandis que le garde qui tractait la charrette rua et se retournant me dit :

"Accrochez vous !"

Puis il galopa en direction de la foule, bousculant deux gardes, tandis que la masse disparaissait brutalement pour réapparaître quelques mètres plus loin, en tas, dévoilant un passage entre deux immeubles. Les roues de la charrette n'avaient que quelques centimètres de marge entre les deux murs, mais mon guide semblait avoir une grande maîtrise de celle-ci. Derrière, déjà, les gardes nous pourchassaient.

A peine 30 secondes après le début de la fuite, un autre poney, entièrement vêtu de noir, de la tête aux sabots, sauta sur ma charrette, puis me dit :

"Tu devrais vraiment t'accrocher sugarcube. Ca va réellement secouer !"

Sans réfléchir, je saisi les rebords la charrette, tandis que d'un coup bien placé de ses deux sabots, elle, car la voix m'avait renseigné sur son sexe, fit sauter le cadre de bois où était attachées mes menottes. Puis sans rien ajouter, elle sauta et s'enfuit dans une rue parallèle.

Nous débouchâmes alors sur une esplanade, située sur le rebord de la ville. En face, je pouvais voir le précipice qui se rapprochait. Là, un autre poney vêtu tout autant de noir, sauta du toit des immeubles derrière nous, se ramassa avec grâce puis nous rattrapa en sautillant. La chose aurait été probablement étonnante si elle ne venait pas s'ajouter à une longue liste d'étrangetés. Je résolu donc de ne pas creuser. D'un saut habile, elle se plaça sur le dos du poney rouge puis sortant une lame d'un fourreau à son côté, elle sectionna les liens du harnais. C'est alors que je vis deux pattes vêtues elles aussi de noir me passer sous les bras et commencer à me soulever.

"Si ça ne vous fait rien, je vais vous sortir de là...
- Avec plaisir !"

Alors que nous nous envolions, le garde donna un grand coup de ses deux sabots dans la charrette, l'envoyant percuté le groupe de gardes poursuivant. Puis, l'autre poney toujours grimpé sur son dos, il sauta dans le vide. Mais arrivant à la vitesse de l'éclair, un pégase tout aussi noir vêtu les rattrapa et parti vers la vallée. Celle qui me portait ne se fit pas prier pour s'enfuir également en vitesse vers le contrebas, quoique moins rapidement.

Je ne savais pas ce qui s'était passé, mais j'étais libre.

Le vol fut court, et bien vite nous parvînmes à une forêt dans laquelle j'aimerais dire que nous nous posâmes. En réalité, nous nous écrasâmes assez pitoyablement, en face de ce qui semblait être un château en ruines.

"Oopsie !" dit la pégase qui m'avait portée. Sortant du château, je vis alors Rainbow Dash, vêtu quasiment entièrement de la tenue noire, sauf la cagoule. Sans rien dire elle se jeta dans mes bras.

"Nous l'avons fait ! Nous l'avons fait !"

Sans pouvoir réprimer mes larmes, j'essayai de la serrer aussi fort qu'elle me serait. J'avais reconnu sa manière de voler quant elle avait rattrapé les deux autres qui s'étaient jetés dans le vide.

"Vite, dit alors le poney rouge, il faut que nous rentrions
- Oui, tu as raison Big Mac !" dit Rainbow, et, prenant ma main, elle me tira à l'intérieur.

Ils s'étaient installés dans les caves du château parce qu'ils y avait plusieurs sorties ainsi qu'une réserve importante de magie, m'expliquaient ils alors que nous descendions les marches situées derrière un mur amovible. Il y avait là un grand nombre de poneys. Certains étaient manifestement en train de monter des armes, d'autres en train de lire des documents. Là, d'autres encore s'entraînaient à tirer et d'autres à se battre avec des armes blanches. Alors que j'entrais, je les voyais tous se retourner et chuchoter, le regard plein de ce que j'interprétais comme de l'espoir à mon égard. Un peu gêné, je souriais. Finalement, nous parvînmes à une sorte de salle de commandement, avec des cartes placardées au mur, avec au centre un plan de Canterlot et tracé dessus, l'itinéraire de la charrette devant me conduire à l'échafaud, et les détails du plan de fuite.

"Big Mac, dit Rainbow, essaie de voir si tu ne peux pas trouver quelque chose pour libérer Victor de ses chaînes.
- Ce ne sera pas nécessaire dit une voix venue d'une pièce attenante, tandis que mes menottes, prises dans une aura violette, tombèrent ouvertes à mes pieds. Me retournant le sourire aux lèvres, je dis :

"Twilight ! Je suis si heureux de te revoir !"

Et ouvrant grand les bras, je la réceptionnais tandis qu'elle se jetait pour m'enlacer comme l'avait fait Rainbow.

"Victor ! Je suis tellement soulagée !"

Nous restâmes ainsi enlacés, vite rejoints par Rainbow, un petit instant, avant que je dise :

"Et si vous me présentiez les autres personnes ayant risqué leurs peaux pour moi ?
- Avec plaisir, dit Twilight. Tout d'abord, le garde infiltré depuis quelques mois se nomme Big Macintosh.
- Eeeeyup me dit le poney rouge
- Ca n'a pas été une partie de plaisir de falsifier les registres, mais heureusement je disposais de suffisamment d'exemplaires d'écrit de la princesse pour faire croire qu'il avait été engagé avant la mort de la princesse Luna.
- Eeeeyup.
- Ensuite, celle qui a détruit le cadre en bois se nomme Applejack. C'est la soeur de Big Mac." A ces mots, un ponette orange à la crinière blonde et coiffée d'un chapeau de cow-boy m'adressa un clin d'oeil :

"C'est toujours un plaisir d'aider sugarcube !
- Celle qui a coupé les attaches du harnais de Big Mac se nomme Pinkie Pie. Ne me demande pas comment elle a fait tout ça, je ne le sais pas moi-même"

La ponette rose à la crinière ressemblant à de la barbe à papa salua d'une manière étrangement humaine puis me dit :

"Et pour fêter ça, ce soir y'a une fête rien que pour toi ! HHiiihaaa !
- Nous verrons Pinkie. Enfin, celle qui t'a porté se nomme Fluttershy."

Une pégase jaune à la crinière rose me sourit en regardant par terre, l'air un peu gênée. Je lui souris, puis lui dit :

"Merci beaucoup pour ton aide.
- C'était rien, je vous en prie, ça me fait plaisir" dit t'elle très bas

"Et enfin pour le tour de magie, c'était moi même, aidée de deux amies. La première se nomme Rarity..."

A ces mots, une licorne blanche à la crinière violette fit une sorte de révérence

"Et Trixie...
- La grande et puissance Trixie je te prie Twilight
- Comme tu veux Trixie"

Et une licorne bleue nuit avec une crinière bleue claire, coiffée d'un chapeau de sorcier me fit une petite révérence.

"Hé bien dis-je. Je ne saurai jamais comment vous remercier de m'avoir sauvé la vie. Je suis votre débiteur. Merci infiniment.
- Victor, nous avons besoin de ton aide me dit Twilight. Nous nous sommes organisés grâce aux livres que tu nous as laissé. Nous harassons les troupes humaines et nous avons posés des bombes contre plusieurs installations. Cela ne semble pour l'instant que les énerver. J'ai peur des conséquences pour notre race si nous continuons.
- Je comprends. Je t'ai laissé cette malle comme un dernier recours, ce qu'il faudrait faire quant il ne restera plus d'autre espoir.
- Il y a autre chose.
- Oui. Nous devons convaincre Célestia de revenir. Elle seule pourra rassembler les vôtres et repousser les forces d'occupation.
- J'y ai pensé, mais le problème est qu'elle est gardée par des poneys fidèles au Prince. Ce n'est pas tant qu'ils pourraient l'empêcher de s'enfuir, mais sa dépression s'aggrave de jour en jour. Et si nous ne pouvons pas lui parler, nous n'avons aucune chance de la sortir de là.
- Tu ne peux pas te téléporter à l'intérieur ?
- Protection magique.
- Voler jusqu'à la demeure ?
- C'est dans une gorge venteuse, le vol y est impossible pour les pégases.
- L'attaque frontale est bien entendue exclue.
- Oui, ils sont nombreux et bien armés.
- Humm..."

Alors que je réfléchissais à une solution, un article punaisé au mur attira mon attention. "La 8ème flotte internationale est arrivée dans les eaux d'Equestria grâce au nouveau changeur de phase". L'attrapant, je me retournais :

"J'ai un plan. Tout ce dont j'ai besoin, c'est d'un hélicoptère....
- Un hélico ? Ca tombe bien, je crois que j'en ai un" dit alors Aalis sortant de l'ombre et souriant. Elle avait toujours su ménager ses entrées.

L'hélicoptère survolait à basse altitude les flots, tandis que dans le soleil levant face à nous, les silhouettes de la flotte se découpaient. Le plan était audacieux voire un peu dingue, mais c'était à peu près le seul espoir que nous avions de finir rapidement ce conflit. Je regarda Twilight, et celle-ci me fit un signe. Elle fit un signe à Trixie, puis les deux se concentrèrent et purent se métamorphoser en humains des plus convaincants. Saisissant des armes à feu déjà présentes dans l'hélicoptère, elles lièrent mes mains. De la cabine, dans mon casque, Aalis me dit :

"Encore des menottes ? Je vais finir par croire que tu aimes ça dis moi !
- Concentre toi sur ton pilotage plutôt que de regarder ce qu'il se passe derrière toi !
- Ouais d'autant qu'avec ton plan foireux... J'espère juste qu'ils vont pas nous descendre à vue !
- Allons, fais moi confiance et vole l'air décontracté !
- Appareil inconnu, veuillez vous identifier, nous interrompit une voix venue de la radio
- Ici Papa Oscar November Yankee 3 7 6, répondit Aalis. Mon code d'identification est le....
- J'espère que ces codes valent le prix que nous les avons payés, me dit Twilight, qui avait pris l'apparence d'un humain au teint halé et au regard un peu bovin.
- Bien reçu Papa Oscar November Yankee répondit la voix. Spécifiez la raison de votre venue.
- Nous transférons un prisonnier échappé avant sa restitution aux autorités équestriennes.
- Reçu. Vous pouvez vous poser zone 3. Zone 3. Over.
- Reçu Zone 3. Merci contrôle. Over."

La conversation était à peine finie que l'engin se posait gracieusement sur le pont du porte-avions. Puis, encadré de Twilight et de Trixie, qui avait choisit d'apparaître sous les traits d'une jeune femme brune aux traits fins à la carrure fine mais musculeuse, je fus amené dehors. Le soleil était à peine au dessus de l'horizon, et le pont était désert, mis à part un homme qui venait dans notre direction. C'était un officier, un enseigne pour être précis. Il se planta devant nous et salua, salut rendu un peu maladroitement par mes deux gardiennes.

"Venez, je vais vous montrer les chemins des cellules. Ensuite vous pourrez prendre un repas au mess et vous reposer. La nuit a du être longue !
- Vous n'avez pas idée ! dit Aalis. Et la perspective d'un bon repas chaud et d'un lit douilleux est la meilleure que j'ai depuis des jours passés à poursuivre ce salopard !
- Je comprends Madame. C'est par ici."

Et sans rien ajouter, il se retourna et se dirigea vers la tour de commande, dont il ouvra la porte. Bien vite, nous nous retrouvâmes dans les coursives. Au bout d'une dizaine de minutes de cheminement, nous débouchâmes sur un couloir mal éclairé où s'alignaient des cellules. Attrapant les clés à sa ceinture, il dit :

"Il n'y aura que lui ici. L'isolement est le mieux pour les enflures de son espèce. J'ai jamais aimé les diplomates !
- Parce que je vous empêche de faire votre boulot ? dis je, en souriant
- Parce que vous jouez aux saintes nitouches et protégez nos ennemis.
- Quelle belle vision du monde !
- Qu'importe, vous rirez moins sans votre tête quant les Equestriens se seront occupés de vous !"

Puis il se retourna pour aller ouvrir une des portes. Aalis saisit le pistolet qu'elle avait à la ceinture et d'un geste brutal, assomma l'homme, qui s'écroula aussitôt. Rapidement, Twilight m'ôta mes menottes, tandis qu'Aalis déshabillait l'homme.

"Tu en rates pas une occasion toi hein ? dis-je en souriant
- Arrête de faire de l'esprit et enfile ça. Profitons que cet imbécile soit un gradé.
- Tu as raison dis je en me déshabillant et en revêtant l'uniforme de l'homme.
- Te voilà maintenant dans l'armée Monsieur l'Ambassadeur.
- Chic, mon rêve de gosse. Bon, ne traînons pas...
- J'ai fini, mais c'est difficile de faire des noeuds avec vos... mains ? dit Twilight qui avait attaché et bâillonné le malheureux officier. Puis, alors que Trixie, qui faisait le guet, nous fit signe que tout allait bien, nous nous dirigeâmes vers l'arrière du navire.

"Tu es sûr que les moteurs sont là bas ? demanda Twilight
- Oui, juste à coté de l'hélice. Et étant donné que le générateur de phase a besoin d'énergie, il doit être à coté.
- Et on va pouvoir le voler comme ça ? demanda Aalis
- A priori il ne fait que trois mètres sur un mètre cinquante. Avec la magie de Twilight et Trixie et compte tenu de l'heure encore matinale nous devrions pouvoir nous en sortir en vitesse....
- Espérons !"

Et tandis qu'Aalis répliquait, j'indiquais une peinture fraîche sur le mur d'une coursive, indiquant : "Générateur de Phase. Accès interdit à tout personnel non autorisé" et pointant un couloir. Le suivant, nous fûmes vite en vue au bout de celui-ci d'une porte métallique devant laquelle se trouvait un garde. Surpris de voir l'endroit si bien gardé, nous nous concertâmes du regard, mais Trixie se dirigeait déjà vers l'homme sans que nous puissions dire quoi que ce soit. Se déhanchant de manière outrancière, il fallut tout mon sang froid pour me souvenir que j'avais affaire à une ponette déguisée. L'homme, qui s'était endormi, vit la nouvelle venue et eût un air d'incompréhension. Souriant, elle l'enlaça tout en minaudant ce qui paraissait être des compliments. Puis le regardant droit dans les yeux, ses mains s'entourèrent d'un aura bleuté. L'instant d'après, le soldat était au sol, évanoui.

"Peuh, presque trop simple. Ils tombent tous dans ce piège là.
- Trixie ! Utiliser la magie contre des êtres vivants, ce n'est pas bien ! dit Twilight
- Nianiania. N'empêche que c'est pratique là.
- Ne perdons pas plus de temps et entrons" dis-je.

L'intérieur de la salle était brillamment éclairé. Comme je m'y attendais, le générateur se trouvait là, avec en bonus sur le mur une carte très précise d'Equestria avec des relevés longitudinaux précis pour pouvoir le régler. Regardant la machine, je constatais qu'elle était dans une sorte de berceau fixé au sol. Il allait falloir la en libérer pour pouvoir l'emporter. Aalis me tendit une clé à molette puis entreprit son travail. Je l'imita presque aussitôt.

Nous avions ôté 4 boulons sur 8, quant soudain l'alarme retentit dans le navire. Nous nous regardâmes paniqués, puis je dis :

"Barricadez la porte, ce ne peut être pas pour nous mais ne nous faisons pas repérer !
- A tout le personnel à bord, dit une voix dans un haut-parleur. Un groupe d'intrus est à bord. Il se constitue d'un homme d'une trentaine d'années, probablement en tenue d'enseigne, de deux femmes et d'un homme, tous les trois habillés des uniformes des forces des Nations Unies. Trouvez les et arrêtez les !
- Bon, c'est pour nous dit Twilight
- Qu'allons nous faire ? demanda Trixie
- Plan B. J'espère que ça va fonctionner. Twilight, regarde cette carte et donne moi les coordonnées de l'endroit où est retenue la Princesse !
- D'accord, mais qu'est-ce que tu comptes faire ?
- Pas maintenant !" dis je

Puis tendit qu'elle s'exécutait, je chercha à allumer le générateur. Heureusement, son interface avait été pensée pour un usage militaire, elle était donc simple et dépourvue de fioritures : un bouton pour allumer, un clavier pour entrer les coordonnées, un bouton pour charger et un dernier pour lancer la téléportation.

"Victor, tu n'es pas en train de faire ce à quoi je pense là, si ?
- 23°N, 34°O ! interpella Twilight"

Souriant, j'entra les coordonnées puis lança la charge, tandis que des coups sourds étaient frappés à la porte de la pièce. Heureusement, Trixie, rejointe par Twilight, parvint à la maintenir par magie. L'effort demandé les empêcha cependant de maintenir leur métamorphose et elles reprirent leurs formes originelles.

Un petit 100% vert clignota sur l'écran du générateur. Sans rien ajouter j'appuyai sur le bouton de génération de phase.

Le choc fut brutal, et le métal hurla. Nous fûmes projetés les uns contre les autres ainsi que sur les murs, mais bien vite tout s'immobilisa. Trixie fut la première sur ses pattes, et tandis que nous nous relevions, elle déclara :

"Ceux qui étaient derrière la porte sont hors-combat
- Tu es sûre ? demanda Aalis
- Je peux voir à travers les murs grâce à un sort !
- Alors nous te faisons confiance" dis-je ne me tenant la tête tandis que je me mettais sur mes pieds.

Aalis ouvrit la porte et effectivement, le groupe de soldats qui voulait nous mettre la main dessus gisait au sol, les soldats s'étant probablement assommés les uns les autres dans le choc. Nous les passâmes et parvînmes à atteindre une des échelles menant au pont principal, où la confusion régnait également. Embrassant du regard le paysage de montagnes au milieu duquel était à présent posé le navire, je remarquai que nous nous étions "posés" juste à coté d'un château. Ou plus précisément sur ses murs d'enceinte. Le donjon quant à lui intact arrivait juste au dessus du pont. Je souris, tandis qu'autour de nous les soldats encore groggys erraient.

"Victor ? me dit Aalis
- Oui très chère ?
- Tu as toujours dis que je savais ménager mes entrées pas vrai ?
- Oui, pourquoi ?
- Parce que toi, tu viens juste d'encastrer un porte-avions dans une montagne. Si c'est pas ménager une entrée ça !
- Remercie Twilight d'avoir vu si juste dans les coordonnées. Allons libérer la Princesse avant qu'ils reprennent leurs esprits !
- Reçu !"

Et nous élançâmes en direction du donjon.

"N'ayez crainte Princesse ! La situation est sous contrôle, nous vous protégerons au péril de notre vie !" dit le garde avant de quitter la chambre située au sommet du donjon, fermant à clé la porte derrière lui, laissant Célestia manifestement enfermée. Cachés derrière les rideaux, nous avions attendus, retenant notre souffle. Le bond depuis le pont du porte-avions jusqu'au donjon avait été un peu périlleux, surtout pour moi, n'ayant ni l'agilité des poneys, ni l'entraînement d'Aalis. Cependant nous étions parvenus à nos fins. Je regardais Twilight, qui hocha de la tête avant de s'avancer dans la pièce.

"Princesse....
- Twilight ? Que fais tu ici ? .... C'est inutile de toute façon, je ne veux voir personne.
- Princesse, je vous en supplie, il faut m'écouter.
- Non Twilight. Je ne suis plus Princesse. Je ne suis plus rien. Je n'ai pas su la protéger. Je suis incapable de protéger qui que ce soit, je ne mérite pas de diriger.
- Je vous en prie, nous avons besoin de vous.
- Non, c'est faux. Blueblood se comporte bien mieux que moi.
- Non, mille fois non ! Il transforme Equestria en enfer ! Vous devez m'écouter !"

Celestia regarda alors Twilight et des étincelles jaillirent de sa corne, envoyant la pauvre ponette valdinguer brutalement contre un mur. Twilight, sonné, plus par la surprise que par le choc, regarda alors s'approcher la Princesse d'un pas lent, le regard empli de fureur :

"Me prends tu pour une idiote ma "très chère élève" (le sarcasme dans sa voix était perceptible) ? Ne crois tu pas que je suis au courant de ce qu'il se passe ? De ce que tu fais ? Que tu t'es alliée à l'assassin de Luna ?
- Princesse....
- Suffit ! Ton cas est des plus désespérés, il n'y a plus rien d'autre à faire que de t'appliquer la sentence réservée au meurtrier que tu as aidé ! Moi qui te considérait comme ma plus belle réussite !"

Alors que sa corne commençait à briller à nouveau, je bondis en dehors des rideaux et me planta devant Twilight :

"Si vous voulez exercer votre rage, faites le sur moi plutôt que sur Twilight. Elle n'a fait que faire ce qui était juste !
- Comment peux tu parler de justice toi qui a causé tant de torts ?
- Princesse. Je suis innocent. Frappez moi. Tuez moi si vous le désirez. Mais écoutez ce que Twilight a à vous dire, c'est tout ce que nous demandons... ce que nous vous supplions de faire !"

La princesse, les yeux brillant de magie tout comme la corne me dévisagea durant de longues secondes, puis reprit d'une voix forte qui faisait vibrer les carreaux de la fenêtre :

"Les envoyés des Nations Unies m'ont montré les preuves. Les preuves de ton implication. Ils m'ont laissé les conclusions de l'enquête qu'ils ont menés. Il y détaillait ton plan, ainsi que les failles dans la sécurité que nous avions mis en place. J'ai mal accordé ma confiance et voilà où nous en sommes ! Si j'avais été plus avisée, elle ne serait pas morte !
- Attendez ! C'est la mort de Lu....
- Je t'interdis de prononcer ce nom !
- De votre soeur qui vous a amené à cette conclusion ?
- Ca et les rapports et les entretiens avec mon nouveau conseiller.
- Votre nouveau conseiller ?
- Une jeune humaine appelée Sonia...
- ... Alvarez, dis je, d'un ton courroucé
- Je vois que vous la connaissez. D'ailleurs elle est en chemin avec la garde, je l'ai prévenu de votre présence...
- Attends, dis la voix d'Aalis derrière les rideaux, Alvarez n'est pas une diplomate c'est....
- La directrice du département des renseignements ? Oui. Vite, barricadez cette porte avant que cette folle nous fasse exploser et en profite pour faire de la princesse un dommage collatéral.
- NE BOUGEZ PAS D'UN SABOT !" dit la Princesse, qui concentrait plus que jamais la magie.

"Vous ne vous échapperez pas une fois de plus !" dit elle d'une voix autoritaire, et de fait, aucun de nous n'osait faire un geste. Aucun, sauf Twilight, qui se remit sur ses pattes et se dirigea vers la porte, commençant à utiliser sa magie pour la barricader.

"Comment oses tu désobéir Twilight Sparkle ?
- Je préfère que vous me foudroyez plutôt que de ne rien faire pour vous ouvrir les yeux...
- Ouvrir les yeux sur quoi ?
- Princesse, dis je. Je veux bien reconnaître une culpabilité. Celle d'avoir été trop naïf, d'avoir cru que les miens se comporteraient mieux qu'ils ne l'ont fait par le passé. J'ai eu tort et ma confiance a été abusée. Tout le temps que j'ai passé dans cette cellule, et même avant, je n'ai cessé de regretter n'avoir pas été plus prévoyant et empêcher la mort de Luna....
- Et pourtant tu es là ?
- On ne vit pas de remords ou de regrets Princesse. Il faut avancer pour défendre ce en quoi l'on croit. Nous vous en supplions Princesse ! Aidez nous, joignez vous à nous et nous pourrons protéger votre peuple !
- Le protéger ? Comment le pourrais je, j'ai déjà échoué...
- La vie est faite d'échecs Princesse, vous le savez mieux que personne. Mais nous devons apprendre de ceux ci pour nous améliorer. N'abandonnez pas, je vous en prie, votre peuple a besoin de vous, plus que jamais.
- Pourquoi nous aidez vous Thaergan ? Quel est votre intérêt ? Répondez moi franchement et je vous aiderai.
- Parce que je suis persuadé qu'avec votre aide, je pourrai frapper suffisamment fort dans les points faibles de notre système pour le transformer en ce qu'il devrait être. La paix, l'harmonie, le partage et l'entraide sont à portée de mains si nous savons saisir les possibilités avec la bonne mentalité.
- Que voulez vous dire ?
- Les changeurs de phase Princesse ! Grâce à eux, nous pouvons essaimer à travers l'Univers. Et y trouver toutes les ressources nécessaires à une vie prospère et calme pour tous ! Mais j'ai besoin de vous pour y parvenir, de vous et de votre peuple.
- ...... Je ne sais pas Thaergan... Twilight... Je ne suis plus celle qui doit diriger ce peuple...
- Princesse ! coupa Twilight. Vous avez dirigé les nôtres durant des siècles ! Vous avez repoussé toutes les invasions, vous avez su faire d'Equestria un pays harmonieux et paradisiaque. Vous n'avez pas failli quant la princesse s'est faite tuée. Vous ne pouviez pas l'empêcher. Mais vous faillerez si vous nous laissez seuls dans ces moments de troubles et de doutes. Blueblood doit être renversé, pour le bien de tous !
- Très bien. Je vais vous suivre, mais mon aide ne vous est pas encore acquise !
- Parfait ! Partons d'ici !
- Je voudrais pas jouer les rabats-joies dit Aalis, mais ils arrivent !"

Et à peine avait elle fini de parler que la porte qu'elle maintenait physiquement avec les renforts magiques des deux ponettes fut secouée par un choc violent, puis un autre. Au troisième, Aalis fut projetée en arrière, tandis que dans le passage apparaissait une silhouette d'humaine accompagnée de quatre gardes poneys bien armés.

"Celestia, dit Sonia. J'arrive à temps ! Ces monstres ne t'ont rien fait.
- Sonia...
- Tutututu. Ne dis rien, je sais comme c'est difficile de porter une culpabilité comme la tienne.
- De toutes tes crasses Sonia, je reconnais bien ta signature là dedans, dis je
- Ah, Victor ! C'est mal de venir tuer les gens ainsi. Une ne t'a pas suffit, il faut que tu prennes la vie de Celestia après avoir si bien abusé de sa confiance ? Entre nous, c'était bien joué, elle n'y a vu que du feu.
- SONIA ! dit Celestia d'une voix qui tonna dans la pièce. NOUS NE SOMMES PLUS DUPES DE VOS MANIPULATIONS. JE VOUS ORDONNE DE CESSER SUR LE CHAMP ET DE NOUS LAISSER PARTIR !
- Très bien Princesse... Je vois que finalement, il a réussi à me percer à jour. Qu'importe, vous serez un dommage collatéral. Tu vois, ton problème Victor, c'est que tu n'as jamais été capable d'anticiper la détermination de tes adversaires. Exactement comme en Somalie. Nettoyez la pièce de tous ses occupants vous autres !
- Et toi ton problème Sonia, dis je, un sourire en coin, c'est que tu as toujours déconsidéré les personnes avec qui tu travailles et que tu as toujours ignoré les cultures.
- Mon secteur ne connaît pas de frontières !
- Gardes, dit Celestia d'une voix calme, arrêtez la"

Les gardes virent volte-face et pointèrent leurs armes contre Sonia. Celle-ci paru pour la première fois déstabilisée, et alors que j'allais reprendre notre discussion, je fus dépassé par une Aalis à l'air furieux :

"La Somalie, c'était toi ! Toute mon unité envoyée au casse-pipe pour arranger vos affaires
- Allons allons, dis Sonia en souriant, réfléchissez un peu. Ce combat est perdu d'avance ! Rangez vous à mes cotés et vous toucherez des substantielles compensations une fois ces terroristes mis hors d'état de nuire...
- Tu vas voir qui va être mis hors d'état de nuire !" dit elle en lui collant une droite assez violente.

"Nous devrions peut être les séparer ? me demanda Twilight
- Tu crois ? J'suis pas sûr, je crois qu'elle le mérite un brin...
- Tu ne m'as pas dit que la violence est le dernier refuge de l'incompétence ?
- Oui, mais les règles générales ne s'appliquent que peu aux femmes...
- Pourquoi donc ?
- Parce que vous êtes trop compliquées pour nos règles simples. Ceci dit, je crois que c'est bon Aalis, elle a eu son compte !
- Peuh, même pas drôle, elle est déjà dans les vapes ! Qu'est-ce qu'on fait d'elle ?
- Laissons la là, les autres s'occuperont d'elle. Maintenant, il nous faut quitter cet endroit."