Sinon, je voulais pas faire mourir d'OCs avant le prochain chapitre, mais là, c'était trop tentant. Donc... First Blood !

Minor Impact se réveilla, et étira ses ailes, tout en faisant attention de ne pas réveiller sa femme. Il se releva, la tête encore dans un endroit que la décence interdisait de nommer, et commença à quitter le lit. Derrière lui, un bruissement de draps lui indiquait que sa moitié émergeait de même. Il jeta un coup d'oeil au réveil, et une idée lui vint en tête. Il mit le sabot juste au dessus. Une minute...

L'heure sur le réveil passa à l'heure pile et la musique commença à s'élever, mais Impact appuya sur le bouton qui trônait sur le dessus, et la musique s'éteignit. Il se sentait tel un démineur. La « journée » commençait bien. Il s'habilla rapidement, tandis que sa femme se levait doucement du lit. Il prit quelques secondes pour l'admirer. Même après vingt ans de mariage et une fille, elle était toujours resplendissante. Il sortit de la chambre, et descendit les escaliers pour se trouver au rez-de-chaussée, puis se dirigea à travers le couloir, vers une porte bleue. Il l'ouvrit doucement. À l'intérieur, il faisait noir. Il commença à chantonner.

-C'est une belle journée
Il faut se lever.
Une si belle journée
Il ne faut pas la gâcher
Il faut se réveiller
Pour en profiter...

Il y eu un bruissement de drap, suivit d'un petit gémissement. Impact s'approcha de l'interrupteur.

-Attention les yeux.

Il alluma la lumière, et les gémissements se firent plus fort. Il s'approcha du lit dans lequel se débattait une pouliche pour garder ses yeux à l'ombre.

-Debout ma puce. Il faut se lever.
-Mmgnnn !
-M'oblige pas a sortir les sabots fatals.
-Mmgnnon !
-Tant pis.

Et il plongea ses sabots sur la pouliche et commença à la chatouiller. La petite se débattait pour échapper au supplice, tout en rigolant, incapable de reprendre son souffle. Ils jouèrent ainsi quelques minutes, puis le père retira ses sabots. La pouliche le regardait, un grand sourire au lèvres.

-Allez, fit Impact. On se lève maintenant.
-Non ! fit la pouliche en se recachant sous ses draps.
-Bon, fit le poney d'un air faussement innocent. Alors je vais devoir manger seul ces délicieux cupcakes tout droit venus de chez les Cake.

La pouliche bondit de son lit.

-C'est vrai ? Vrai de vrai ? C'est pas une blague ?
-Non, ce n'est pas une blague. Je vais vraiment tout manger.
-Méééééééé !

Quelques minutes plus tard, la petite famille était assise autours d'une table, à partager un petit déjeuner. Puis ils se lavèrent les dents, et Minor Impact se prépara à aller à son travail. Il fit une dernière bise à sa femme et sa fille, puis ouvrit la porte.

En face de lui, une troupe de soldats passait au pas de course, se dirigeant vers les rempart. Puis un autre groupe passa, dont plusieurs membres se dirigeaient vers les habitations. Un soldat accouru vers lui.

-Désolé monsieur, mais vous ne pouvez pas sortir.
-Que ce passe-t-il ?
-Exercice de routine monsieur. Pour voir l'efficacité d'un couvre-feu en cas de besoin. Veuillez rentrer chez vous, maintenant.

Minor Impact regarda ses sabots. Il n'avait même pas posé le pied dehors.

-Ça durera combien de temps, vos conneries ? demanda-t-il, son humeur ayant baissé d'un cran.
-Je n'en sais rien monsieur. Maintenant, fermez cette porte et ne sortez sous aucun prétexte.

Impact resta quelques secondes à regarder le soldat, puis il ferma la porte. Il se retourna doucement, vers sa femme et sa fille, qui le regardaient d'un air inquiet.

-Je n'aime pas ça, dit-il.



Peace Napper descendait la rue principale. Autours de lui, les soldats de Canterlot se postaient en face des maisons et incitaient les civils à rester chez eux. « Un exercice de routine ». Napper se demandait combien d'habitants de la ville allaient gober un mensonge aussi gros. Jamais, même pour un exercice, on n'avait obligé les gens à ses barricader chez eux, surtout sur la totalité de la cité. Et il ne faudrait pas longtemps avant qu'ils ne s'aperçoive,t que ce n'était pas limité à un seul quartier.

Mais les têtes « pensantes » souhaitaient éviter la panique. Et donc, on mentait aux civils, ce faisant, on les inquiétait, on les faisait se poser des questions, auxquelles ils tentent de répondre en contactant leurs amis, ce qui ne fait que les inquiéter encore plus. Et au final, les gens paniquaient. Alors qu'en leur disant clairement le problème, voire, comme le souhaitait Napper, si on les rapatriait à l'intérieur du château, on pourrait les rassurer, les guider, et les informer.

En voulant éviter la panique, on la rendait plus sûre encore. Et encore, pour l'instant, on ne faisait que bloquer l'accès à l'extérieur. Mais si les mauvais pressentiments des officiers et du colonel se trouvaient exacts, si derrière le blackout concernant les Avant-Postes de la Dernière Chance se cachait une véritable attaque, alors comment éviter le chaos généralisé quand les obus commenceraient à tomber, et les balles à fuser ?

Les soldats de Canterlot n'étaient déjà pas prêts pour un combat face à face, dans les règles, alors s'il fallait rajouter des civils fuyant dans tout les sens au tableau, on ne s'en sortirait pas. Restait à espérer que les Lunaires aient la même volonté de préserver les vies innocentes que la Princesse.

Napper avait peur. Heureusement pour eux, le colonel Crimson Brush avait été muté à la défense de la ville il y a peu, et son premier geste avait été, quand il avait vu la faiblesse des forces en présences, d'entrainer les combattants et de renforcer les défenses, malgré les vives protestations venues d'en haut. Mais il y avait une personne qui s'était rangée de son côté, percevant la sagesse de ses propos, et nul n'avait remit cette parole en doute, du moins ouvertement. La Princesse du Soleil soutenait le colonel dans son projet de protéger la population de Canterlot contre une quasi-impossible menace. Et moins d'une semaine après, tous les signes d'une attaque imminente apparaissaient. Peace Napper avait voulut prier Célestia pendant une journée entière pour la chance qu'ils avaient eu de ne pas s'être fait attaqué une semaine plus tôt. Sous les ordres de leur ancien commandant, le colonel « Don't Worry », ils n'auraient eu aucune chance. Cependant, le temps n'était pas à la prière, mais à la préparation.

Napper avait peur. Une semaine ne transformait pas un bleu en foudre de guerre, et les Forces de Défenses de Cantelot avaient pour l'instant plus fait de la figuration qu'autre chose. Tout était organisé par les Licornes. Il ne restait aux soldats qu'à se tourner les ergots en nettoyant leurs armes. La plupart d'entre eux ne savait même pas à quoi ressemblait un champ de bataille, et de toutes manières, ceux qui le savaient y avait laissé une partie de leur anatomie. Napper faisait parti de la première catégorie.

Il avait peur, mais il se battrait. Il avait sa famille, sa femme et son nouveau-né dans ces murs, et il les protègerait, quoi qu'il lui en coûte. Et à cause de la connerie du haut-commandement, il faudrait que les Lunaires ne dépassent même pas les remparts.

Une ombre attira son attention dans une ruelle transversale, et disparu quand il tourna son regard. Il fit mine d'avancer sans rien remarquer, s'approchant subrepticement de ladite ruelle. Puis il bondit vers elle. L'ombre se mit à courir, et Napper lui galopa après. Il était plus rapide, et la rejoignit bien vite. Il lui toucha le dos.

-Chat ! dit-il.

L'ombre se tourna vers lui, et ralentit. Napper s'approcha de la petite forme.

-Il faut pas rester dehors, petit. Tu dois rentrer chez toi.
-Mais, fit le poulain en passant dans un rayon de soleil, je dois ramener le livre à la bibliothèque aujourd'hui !

Sur ce, il sortit un livre, et le montra au soldat. Napper lui tapota la tête.

-Donne-moi ce livre, et rentre chez toi. Dis à ta famille de ne sortir sous aucun prétexte.

Devant l'air intrigué du gamin, il se reprit :

-Quoi qu'il arrive.
-Ah !

Le poulain le regarda dans les yeux.

-Vous promettez de le rendre, hein ?
-Oui.
-Promesse Pinkie ?

Ce fut au soldat de le regarder d'un air interrogatif.

-Quoi ?
-C'est un truc qu'on disait dans le village de mon père. Une promesse qu'on peut pas briser, sinon, Mme Pinkie vient en personne pour te rappeler ta promesse.

Il lui montra une série de geste, pour lui montrer comment ce faisait cette promesse. Napper les recopia de façon approximative.

-Promesse Pinquy. Maintenant, rentre !

Le poulain lui donna le livre, puis disparu dans une autre ruelle. Napper regarda le livre pendant qu'il ralliait la rue principale. Il demanderait à Raindrop d'aller rendre ce bouquin, s'il la croisait. La pégase était assez occupée en ce moment, à distribuer les ordres d'un coin à l'autre de la ville. A propos de pégases, il s'inquiétait pour la patrouille qu'on avait envoyé enquêter sur le blackout des avant-postes. Le colonel était cruel. Si attaque il y avait, alors il avait envoyé les quatre poneys à la mort. Mais s'ils revenaient, alors l'état d'alerte serait levé.

Cependant, Peace Napper ne croyait pas en cette hypothèse.



Soarin se demandait ce qu'il devait faire des cadavres. En tout cas, il était désormais clair que la capitale se doutait de l'attaque imminente. Tout ce qu'il espérait, c'était qu'ils n'appellent pas de renforts, ou du moins, que les renforts ne pourraient pas intervenir avant leur victoire. Cependant, on l'avait assuré que les communications avaient été neutralisées. Canterlot était seule. Plus encore, les avant-postes regroupaient leurs équipements de surveillance. Donc, c'était la fin du silence radio. D'ailleurs, ça s'entendait. Les équipes s'en donnait à cœur joie pour mettre au point les plans d'attaque.

Et Soarin se demandait ce qu'il devait faire du cadavre. Depuis que les Night-Ops avaient déclaré la voie nettoyée, les ExpAir tournaient dans le ciel, attendant le signal fatidique. Celui qui signerait leur héroïsme, ou leur mort dans d'atroces souffrances.

Sur eux reposait non pas la victoire, mais juste la possibilité de combattre. Désormais, il y avait une trop grande agitation pour que les infiltrés puissent ouvrir les portes à eux seuls. Autant ils pouvaient, on ne savait par quel tour de passe-passe du cru de Stalker, entrer dans la ville, autant pour l'armée, ce serait une autre paire de manches. Mais ils ne pouvaient pas attaquer les remparts, même de l'intérieur.

Alors ils feraient ce qu'ils savaient faire de mieux après s'infiltrer et massacrer sans un bruit. Tout détruire et faire un maximum de barouf pour attirer l'ennemi. En quelque sorte, Soarin n'avait pu retenir une certaine admiration lorsque Stalker avait dit cela à la radio. Ils allaient faire en sorte que les forces de défense soient occupé à l'intérieur, plutôt que défendre les remparts. Et à ce moment-là, les ExpAir débouleraient depuis les airs, et ouvriraient les portes. A partir de ce moment, la bataille s'engagerait vraiment.

Mais avant cela, il fallait réussir à accéder à la console de contrôle des portes. Si les ExpAir échouaient, c'était toute la bataille qui tombait à l'eau. Il ne pouvaient pas échouer. Car de quoi auraient l'air les forces lunaires, si elles devaient rentrer la queue entre les jambes, bloquée en face des murailles de la capitale ennemie après tout ces efforts ? Soarin se doutait qu'il y avait d'autres plans, par la force ou autre, pour réussir à passer les remparts. Mais aucun n'était plus efficace que l'assaut des pégases.

Soarin prit un air déterminé. Pour une fois que tout reposais sur ses épaules, il n'allait pas flancher. Il allait leur montrer, à tous, de quel bois était fait un Wonderbolt. Il allait ouvrir ces foutues portes

Il savait maintenant quoi faire du cadavre.



-Et y'a jamais personne qu'a eu l'idée de vérifier par ici ? demanda Frostbite.
-Non, répondit Windvision. Les Catacombes sont trop anciennes. Très peu de monde sait encore qu'elles existent.

Les Catacombes de Canterlot étaient un magnifique vestige de la conception de la ville, situées au-dessus, et parfois dans, les anciennes mines. Elles servaient autrefois à ensevelir les poneys morts, leur pourvoyant un endroit sûr à l'abri des pilleurs de tombes, qu'il soient poneys ou autres. Mais au fur et à mesure du développement de la ville, elles sont devenues obsolètes, en raison de leur profondeur et de leur aspect labyrinthique. De nombreuses personnes s'étaient perdues à l'intérieur. Le fait qu'il n'y ait aucune lumière n'aidait pas. En plus de tout cela, on avait construit au-dessus le réseau d'égouts de la ville. Donc l'odeur s'était ajoutée à tous les autres désagréments. Puis, il y avait un peu moins d'un siècle, on avait décidé de sceller les entrées. Et les Catacombes avaient sombrées dans l'oubli.

Sauf qu'une personne avait entendu parlé de leur existence, s'était procuré les plans et avait mis en place un moyen de créer une ouverture vers la surface à l'extérieur des murs, de les relier aux égouts afin de permettre à des gens possédant des plans de transiter dans la plus grande discrétion sous la ville. Ce fut la naissance du réseau clandestin de Canterlot, créé et dirigé par Fancy Pants. C'est grâce à ce réseau que les Lunaires avaient pu survivre à leurs premiers jours. Mais le réseau avait disparu en même temps que son créateur, et les Catacombes étaient retournés à leur silence

Stalker marchait à l'avant, avec à côté de lui Gentle Melody, qui faisait flotter la carte et apportait la lumière nécessaire à la lire. Le commando n'était pas venu depuis longtemps. Whisper utilisait les Catacombes pour sortir sans se faire remarquer et lui faire parvenir les informations qu'il possédait. Depuis la mort de Fancy Pants, le sniper était donc rarement venu en personne. Les commandos déambulèrent une dizaine de minutes dans le noir, seulement éclairés par les quelques licornes qui avaient allumé leurs appendices, s'arrêtant parfois lorsque le commandant vérifiait la direction à prendre. Enfin, ils arrivèrent dans un cul-de-sac, devant un mur qui n'avait à priori rien de différent avec les autres. Stalker s'arrêta, observant l'obstacle. Flesh eut un rictus.

-Et là, tu vas nous sortir un passage secret, Shade ?
-Non.

Les poneys le regardèrent. Stalker se tourna vers eux. Puis il leva les yeux. Les infiltrés suivirent son regard, et ne virent rien. Gentle Melody orienta son faisceau de lumière vers l'endroit.

-...On doit voir quoi ? demanda Roads.
-Rien, répondit le commandant. C'est le principe. Les pierres sont descellées, la clé de voûte a été remplacée par une armature en métal pour permettre d'enlever les briques sans tout détruire. Flesh, dit-il en se tournant vers l'intéressé, vole là-haut et pousse.

Flesh s'exécuta sur-le-champs, déployant ses ailes et voletant jusqu'au plafond, puis il poussa à l'endroit indiqué. Les briques se soulevèrent et une ouverture se fit dans le toit, par laquelle passait de la lumière. Il passa par l'ouverture, et découvrit qu'elle donnait sur les égouts. Puis Stalker sortit une corde, qu'il lui lança. Flesh accrocha la corde à un barreau d'une échelle vissé contre un mur qui se trouvait là. Pendant ce temps, les pégases s'envolèrent par l'ouverture, et sécurisaient la position. Puis les non-volants grimpèrent par l'intermédiaire de la corde.

-T'aurais pu demander, dit Black Jack alors que les commandos reprenaient la route à travers les sous-sols. J'aurais utilisé...
-On garde les batteries pour plus tard, le coupa Stalker.
-Y'a vraiment pas un garde, dit Drill. C'est dément.
-Faut croire que le nouveau responsable a oublié de vérifier sous ses pieds, répondit Slash.
-Non, dit Stalker. Personne ne l'a prévenu de l'existence des Catacombes. Sinon, il y aurait des gardes dans tout le secteur.
-Et pourquoi ils ne gardent pas les égouts ? demanda Black Jack. Même si les Catacombes sont inconnues du grand public, les égouts ne sont un secret pour personne.
-Les hautes instances ont déjà du mal à accepter la mise en place des défenses à la surface. L'installation de défenses anti-aérienne a provoqué un scandale, alors ils ont abandonné l'idée de surveiller les égouts plus que nécessaire, expliqua Windvision.
-L'état-major Solaire est vraiment un ramassis d'imbécile, dit Frostbite. Pas étonnant qu'ils aient enchainé les fiascos ces derniers temps.
-T'es bien placée pour le savoir, Frost, railla Slash.
-Toi, tu...
-En tout cas, les interrompit Black Jack, c'est clair qu'il va y avoir du ménage dans les rangs Solaires, s'ils résistent à cette bataille.
-S'il résistent à cette bataille, dit Stalker, l'inefficacité de leur état-major ne les empêchera pas de mettre fin à la République.

Les poneys se turent.

-... Tu viens de tuer l'ambiance, Shade.

Stalker tourna des yeux blasés vers Flesh. Puis il désigna une échelle.

-Groupe Octavia, vous sortez ici.

La ponette, se dirigea vers l'échelle et entreprit de la grimper, puis elle fut suivit par une vingtaine de poneys. Le reste des commandos continuèrent leur route. Parfois, Stalker désignait une échelle, et un groupe sortait. Le plan consistait à séparer la centaine de commando en cinq groupes, commandés par Octavia, Flesh et le commandant pour les Night-Ops, Black Jack et Mind Illusion pour les Fantômes. Les groupes de combattants sortiraient dans des ruelles éloignées et généralement désertes, et se posteraient de chaque côté de la rue principale.

Ensuite, ce serait le feu d'artifice.

Enfin, ce fut au tour de Flesh de sortir. Le pégase grimpa à l'échelle, et ouvrit doucement la bouche. Il fit le tour de la place du regard, et, s'étant assuré qu'il n'y avait personne, il sortit. En une minute, son groupe s'était extirpé des entrailles de la terre, et ils avaient refermé la trappe. Puis, ils avaient utilisé des escaliers extérieurs pour monter sur les toits. Il y avait quelques gardes sur les toits, mais les snipers silencieux de l'équipe s'occupaient de nettoyer le passage. Heureusement, ces gardes n'avaient pas à faire de rapports, et lorsque quelqu'un s'apercevrait de leur absence, il serait trop tard.

Ils s'approchaient de leur objectif. Ils arrivèrent à la dernière rangée de maison, celle qui faisait façade avec la rue principale. Flesh fit signe à ses soldats d'attendre, et voleta jusqu'à une fenêtre. Il vérifia que personne n'était en vue, sortit son pistolet équipé d'un silencieux et tira sur la poignée. La fenêtre s'ouvrit, et il pénétra à l'intérieur de la maison. Il sécurisa la chambre où il avait atterrit, et fit signe aux autres commandos de le suivre. Il continua de fouiller l'étage, sans trouver personne. Puis il entendit des voix au rez-de-chaussée. Il mit son arme à l'épaule, et descendit doucement les escaliers. Il vit une petite famille, la mère, le père et la fillette, réfugiée dans la cuisine, qui discutait avec véhémence.

-...rois toi, à cette histoire d'exercice ? C'est pas normal !
-Shiny Dress aussi est barricadée. Apparemment, toute la ville est dans cet état.
-Tu crois qu'ils cachent un truc ? Une attaque terroriste, peut-être ?
-Moi, je pense à une attaque contre Canterlot, dit le pégase.

Les deux parents se tournèrent vers Flesh. Celui-ci mit le sabot devant sa bouche. Quand il fit assuré que les civils ne sortiraient pas un son, il demanda :

-Vous avez une cave ?

Les deux adultes le regardaient sans bouger. Leurs yeux descendaient jusqu'à son arme. Finalement, la pouliche, après avoir regardé ses parents, dit :

-On a la cave où papa range ses affaires.

Les parents se tournèrent vers leur fille, lui faisant signe de se taire. Flesh eut un sourire. Derrière lui, d'autres Night-Ops en arme étaient apparus.

-Allez vous poster aux fenêtres, leur dit-il. Vous ! On peut accéder à la cave depuis l'intérieur ?
-Qu'est-ce que vous voulez nous faire ? demanda l'étalon.
-Rien. Barricadez-vous dans votre cave, et ne sortez sous aucun prétexte.
-Je trouve qu'on utilise beaucoup le mot « prétexte », ces temps-ci...

Flesh montra au-dehors d'un signe de tête.

-Ça va bientôt chauffer dans le coin. Mettez-vous à l'abri.

Les poneys ne bougeaient toujours pas.

-Maintenant.

Cette fois, l'étalon prit sa fille par le sabot, et l'emmena. Flesh fit un discret signe de tête à l'un de ses soldats, et celui-ci suivit la famille pour les mettre à l'abri, et s'assurer qu'ils y restent. Puis il remonta à l'étage, et se posta dans le bureau, à une fenêtre qui donnait sur la rue. Plusieurs poneys se trouvaient déjà là, à attendre. Flesh jeta un coup d'oeil, puis se baissa et arma sa mitrailleuse. Il prit sa radio.

-Blanche-Neige en position.
-* Reçu. En attente. *

Quelques secondes plus tard, la radio se remit à grésiller.

-* Magic en position. Vous foutez quoi, les gars ? *
-* Traqueur en position. Clé de Sol a des problèmes au niveau des patrouilles. *
-Et Pokerface ?
-* Je sais p... *
-* Pokerface en position. Désolé, petit problème de civils. *
-* Ici Clé de Sol. Une patrouille nous a échappée. Elle se dirige vers vous, Traqueurs. *
-* On la voit. En attente... Menace éliminée. On a plus beaucoup de temps. *
-* Reçu, on se dépêche. *

L'attente dura quelques minutes. Flesh lançait régulièrement des coups d'oeils par la fenêtre. Pour l'instant, personne n'avait l'air de s'être rendu compte de la disparition des patrouilles. En même temps, il régnait une telle agitation à la base, il n'était pas évident de comprendre ce qui se passait. C'était panique à bord. Au loin, au bout de la rue, on pouvait distinguer les remparts de la ville. Sensés empêcher les ennemis d'entrer, disait-on. Tout le long de la rue, des fortifications et des petit murs de sacs de sables s'étaient mis en place. Flesh se demanda pourquoi, avec toutes ces précautions, ils n'avaient pas évacué les civils.

-* Clé de Sol en position. *
-* Ici Traqueur. Flesh, tu ouvres le bal. *
-Comme tu veux, patron.

Flesh se posta à la fenêtre. En contrebas, des poneys patrouillaient, gardaient les maisons. Certains étaient postés sur les toits. D'autres discutaient entre eux, se partageant un thermos de café. Flesh fit un signe à ses tireurs, leur montrant les gardes sur les toits, et les commandos mirent l'oeil à leur viseur. Il prit sa radio.

-Rez-de-chaussée, vous êtes prêts ?
-* Prêts, Flesh. *
-A mon commandement...

Il prit sa mitrailleuse, et visa un groupe de trois poneys dans la rue.

-Feu à volonté ! Pour Luna !

Une dizaine de « Pour Luna ! » retentirent dans la maison, tandis que les commandos ouvraient le feu. Une vingtaine de poneys solaires s'effondrèrent. Des gardes tombèrent de leur toits pour s'écraser au sol. Dans d'autres maisons du quartier, des tirs fusaient, fauchant des solaires surpris, incapables de réagir. Les lunaires maintinrent un feu nourris pendant quelques minutes.

-* Stalker à Infiltrés. Cessez le tir. *

Un a un, les commandos lâchèrent leur gâchette. Il n'y avait plus un soldat solaire vivant dans leur champ de vision.

Puis l'alarme sonna, et des renforts accoururent vers la zone.

-Mares & Gentlestallions, dit Flesh à la radio avec un accent bourgeois très prononcé, ce fut un plaisir de travailler une dernière fois à vos côtés.
-* Flesh, pas de pessimisme * fit la voix de Windvision.
-* Pour ma part * fit la voix d'Octavia, * Je me serais bien passé de vous avoir à mes côté, Flesh. *
-*Tiens, puisque t'as l'air d'avoir envie de crever, tu nous dis ton vrai nom ? * dit un autre Night-Ops.

Flesh souffla.

-On peut pas déconner avec vous, les mecs.
-* C'est plus l'heure de déconner * fit la voix de Stalker. * Allez tout le monde, on fait un maximum de bruit pour dégager la voie à Soarin. *

Des tirs venaient de la rue. Les solaires ripostaient cette fois. Les lunaires se remirent à tirer sur les nouveaux arrivants. Les tirs fusaient dans tout les sens. Le mur éclata à côté de Flesh, l'obligeant à se mettre à l'abri. Les appels radios partaient dans tout les sens, alors que les blessés commençaient à tomber chez les commandos.

-* Slash à terre, Slash à terre ! *
-* Enfoirés ! *

Une balle fusa près de Flesh. Il sentit son souffle passer près de lui, le sifflement du projectile, et il entendit un petit « urgh » derrière lui, suivit d'un grand bruit de chute. Il se retourna, et vit que Soap Fruitkiller s'était fait touché en plein front. Son corps s'était affalé sur le bureau. Flesh se remit à la fenêtre et arrosa tout ce qui se trouvait devant ses yeux. Il n'était peut-être pas le meilleur tireur qui existe, mais la cadence de tir de son joujou effaçait ce problème. Cependant, les solaires s'étaient réveillés. Les Night-Ops avaient donné un coup de sabot dans la fourmilière, et les gardes étaient nombreux. Très nombreux. Trop nombreux.

-* Flesh, ils passent par derrière ! *
-Allez bloquer les accès à l'arrière !

La dernière chose qui devait leur arriver, c'était de se retrouver coincé dans les bâtiments. Flesh changea le canal de sa radio.

-Shade, on va finir par se faire coincer si on reste ici.
-* Reçu. Drill, envoie ton cadeau sur les murailles. Flesh, vide-moi la rue. Les autres, on sort, et on se planque derrière les couverts que les solaires nous ont gentiment préparés.

Un concert de « reçu » se fit entendre, et Flesh se mit à faire un tir de suppression sur la rue en contrebas. Une des licornes lourde de l'équipe fit de même avec sa mitrailleuse super-lourde. Drill, quand à elle, chargeait son lance-missile avec un projectile, sur lequel était dessiné sur toute la longueur des espèces de banderoles colorées garnies de messages d'insultes, en rigolant comme une possédée. Elle attendait de pouvoir lancer son « cadeau » depuis longtemps. Flesh vit les Night-Ops et les Fantômes sortir des bâtiments en faisant feu de toutes leurs armes pour se tailler un chemin dans la rue. Certains des commandos tombaient, certains se relevaient, la plupart restaient à terre. Certains traînaient de la patte, et sortaient une seringue pour se piquer et reprenaient le combat. Les Night-Ops n'étaient pas spécialisés dans la tenue de position, mais étant les seuls à pouvoir s'infiltrer de la sorte, c'était à eux que revenait la tâche d'attirer l'armée ennemie hors des remparts.

-Drill ! lança Flesh.
-Une minute !
-On a pas une minute !

La ponette visait la muraille avec son lance-missile. Des balles perdus éclataient les murs du bureau autours d'elle, mais elle ne se déconcentrait pas. Un bout de sa langue sortait de sa bouche, comme un écolier s'appliquant à faire un collage. Sa corne se mit à briller, et elle appuya sur la gâchette. Le missile partit en laissant une trainée fumante derrière lui. Il parcourut toute la rue, sous les regard surpris des soldats solaires.



Crimson Brush vit le missile approcher. Il se demanda à quoi cela rimait. C'était sûrement un projectile perdu, car ceci ne pourrait rien faire à la muraille en elle-même. L'engin mettait un certain temps à parcourir la distance jusqu'à la muraille. Heureusement, il ferait peu de dégât, même au niveau des vies, car la plupart des soldats en position sur les murailles avaient été envoyés contrer la menace venue de l'intérieur. Les lunaires étaient plus sournois encore qu'il ne l'avait imaginé.

-A couvert ! hurla-t-il.

Les gardes restants se mirent à l'abri, et Brush lui-même recula de quelques pas. Puis il comprit pourquoi on avait tiré ce missile par ici. Ce n'était pas un tir involontaire. Le missile fit un brusque écart vers le haut, et éclata. Des dizaines d'autres petites lumières en jaillirent, comme un feu d'artifice. Sauf qu'au lieu de s'éteindre, les petites lumières bifurquèrent, et foncèrent vers la muraille. Par le dessus, et évitant par là les quelques couverts. Crimson Brush se jeta à terre tandis que les projectiles frappaient les remparts dans un ensemble quasi-parfait. Peu d'endroits furent épargnés par le tir.

Heureusement, l'un d'entre eux était celui où s'était réfugié Brush. Il se releva, prenant sa radio.

-Colonel Brush à Force de Défense. Qui reste-t-il sur les remparts ?

Il reçu quelques appels. Il restait à peine une douzaine de poneys aptes au combat sur les remparts.

-Il nous faut des renforts sur les remparts. Je répète, il nous...

Il vit une ombre au sol, regarda en l'air et se jeta en arrière pour éviter la chose qui chutait. L'objet s'écrasa sur la pierre dans un immonde bruit de chair et d'os brisés, et une vague de sang s'en échappa, couvrant le corps de Brush. Le colonel regarda le corps qui était tombé de ciel. C'était l'un des pégases envoyés en reconnaissance. Le cadavre était complètement disloqué, dans une position grotesque. Brush tourna une fois de plus son regard vers le ciel, pour voir une trentaine de points noirs se détacher sur le fond rouge.

-Tir Anti-Aérien ! Attaque Pégase ! Mais sortez les D.C.P., nom de Célestia !

Lui-même courut à l'un des canons, et s'y installa. Il manipula les commandes, pointant les canons vers le ciel, et appuya sur les gâchettes. Le canon se mit à cracher ses projectiles à intervalle régulier. Des explosions retentirent dans le ciel, et Crimson vit un des pégases dévisser et partir en vrille. Les autres canons de D.C.P. se mirent en marche, et le chemin emprunté par les pégases se couvrit de nuages de fumée.



Soarin effectuait de nombreuses manœuvres d'évitement. Les munitions anti-pégases explosaient trop près de lui.

-Aaaah !

Soarin tourna la tête pour voir Cloudchaser tomber en vrille. Derrière elle, il pouvait voir un objet longiligne tournoyer. Une de ses pattes. Il détourna les yeux, et se concentra sur sa descente, et son instinct. La variation de la pression, le sens du vent, la température. Il fit un brusque écart, juste à temps pour éviter l'explosion d'un autre projectile. Trente mètres. Une autre explosion derrière lui. Vingt mètres. Il fit des écarts plus brusque encore, empêchant le solaire de l'ajuster. Dix mètres. Le soldat ennemi sortit de son engin pour le viser de son fusil. Mais il était trop tard. D'un sabot, Soarin écarta son fusil tandis que l'autre s'abattait sur le crâne du malheureux avec la force d'une météorite, tandis que le pégase se posait avec violence. Il sentit son sabot s'enfoncer presque sans résistance. Soarin ne regarda même pas son œuvre. Rien que l'idée de ce à quoi pouvait bien ressembler le corps lui donnait la nausée. Il força légèrement pour retirer son sabot, et regarda autours de lui. Les autres pégases avaient percuté les rares soldats solaires encore présents avec la même rage. À quelques mètres de là, il voyait Flitter, les larmes aux yeux, s'acharner sur le cadavre de celui qu'elle venait de tuer, en hurlant de rage.

Puis il entendit une détonation derrière lui, le souffle d'une balle lui caressa la joue, ouvrant une entaille, et, en face de lui, Flitter rejeta la tête en arrière, un nuage de sang explosant derrière son crâne. Elle s'affala. Soarin se retourna. Il vit un poney violet, à la crinière rouge et aux yeux orange respirant la cruauté. Celui-ci jeta son pistolet et se jeta sur lui. Soarin tenta de lever son arme, mais l'autre fut sur lui avant, envoyer valser son arme et le frappant en plein visage, faisant tituber le pégase. Puis il sortit son couteau de combat et se jeta sur Soarin. Le pégase para aussi bien qu'il put, mais l'autre avait clairement l'avantage de s'y connaître. Il envoya son couteau vers le pégase, qui décala sa patte, mais l'autre le frappa au visage se son autre sabot, et Soarin fut sonné. Puis le solaire lui planta son couteau dans l'épaule, mais Soarin lui attrapa et lui bloqua la patte. Les deux poneys regardèrent dans les yeux. Soarin avait mal, mais il ne lâchait pas. Le solaire tourna le couteau dans la plaie, arrachant un hurlement à l'ExpAir. Puis il le frappa de son sabot libre, encore et encore, mais Soarin ne lâchait toujours pas. Au lieu de ça, il se décala sur le côté, dévoilant d'autres pégases, armes au sabot, visant le solaire. Voyant cela, l'ennemi frappa dans la gorge de Soarin, le faisant suffoquer et lâcher sa prise, et se jeta sur le côté pour éviter la volée de balle.

Vers le vide, côté Canterlot. Crimson Brush se reprocha sa stupidité durant la seconde où il ne tombait pas. Puis la gravité reprit ses droits. Il tomba, mais eu le bonheur de voir qu'un drapeau se trouvait juste en dessous de lui. Au moment où il passa à son niveau, il l'agrippa autant qu'il le put, se brûlant les pattes, mais il arriva au bout de l'étendard et reprit sa chute. Il s'affala lourdement au sol.

Soarin se dirigea vers le bord du rempart. Il vit le poney à terre en bas. Celui-ci bougea une patte pour se relever, mais un autre problème accaparait l'attention du commandant. Des soldats solaires arrivaient, assez nombreux pour submerger la vingtaine de pégases restant. Il fallait trouver le poste de commande des portes. Et vite. Soarin tourna son regard vers le dehors des remparts. L'armée n'était toujours pas arrivée.

-ExpAir, dit-il dans son micro. Retenez-les jusqu'à ce qu'on ai ouvert les portes !
-* Reçu *

Les pégases se mirent en postions en hauts des escaliers des murailles, et commencèrent à tirer sur les soldats qui montaient. Soarin, lui, se dirigeait vers la cabine de contrôle, à une trentaine de mètres de là. Il boitait, et se tenait la gorge. Il avait encore du mal à respirer. Il hésita à prendre une dose de Booster. Non. Ce n'était pas utile. Pas encore.

Il atteignit enfin la cabine, et ouvrit la porte. À l'intérieur, il trouva la console, un ramassis de boutons et de manettes. Il trouva celle qu'il cherchait, sous la forme d'une grosse manivelle rouge. Il posa le sabot dessus, mais un appel retentit à la radio.

-* Chef ! On a un énorme problème ! *
-Quoi ?
-* Soarin ! C'est Stalker. Falcons en approche, je répète, Dash est sortie ! Ouvre la porte et casse-toi ! *

Soarin regarda par la fenêtre, vers la ville. Au loin, il voyait le château, et une cinquantaine de points qui en sortaient et se dirigeaient vers eux. Même à cette distance, il reconnaissait la façon de voler de certains d'entre eux, pour avoir été leur coéquipier pendant des années.

Soarin eut un sourire. Et on voulait qu'il s'enfuit ?

-Hey, les ExpAir, Stalker me dit de me barrer face aux Falcons.

Une étrange paix régnait dans sa voix. Comme s'il était dans un rêve.

-Vous en dites quoi ?

Il y eut un silence surréaliste. Puis une voix tonna :

-* Ça va pas, non ? *
-* On va pas fuir toute notre vie ! *
-* Qu'il aille se faire foutre. On est pas des lâches ! *

Le sourire de Soarin s'élargit. Ils étaient des pégases. Les descendants d'un peuple de guerrier. Le défi était une part intégrante de leur vie. Et les ExpAir étaient des pégases. L'heure n'était plus à la fuite.

-Prêts à laver l'honneur des pégases, mes frères ?

Une vingtaine de « Prêt ! » se fit entendre. Soarin sortit sa seringue de Booster, se piqua à la cuisse, puis déversa son contenu. La douleur s'estompa immédiatement. Il sortit, et déploya ses ailes. S'ils devaient mourir, il mourraient en volant. Et il s'envola, suivit par ses pairs.

La porte de la salle de contrôle était toujours ouverte, et la manette, toujours en place.



Les Falcons s'approchaient rapidement. Ils étaient nombreux. Trop nombreux pour les ExpAir. Stalker lança un regard vers les murailles. Les pégases lunaires s'étaient envolés, mais restaient sur place. Le sac de sable devant lui projeta des éclats, et il se remit à couvert. Flesh se releva à côté de lui, et lança une nouvelle rafale, puis se rebaissa.

-Jamais sous-estimer la fierté d'un pégase, Shade.

Le commandant allait répondre, mais s'interrompit. Il posa son fusil d'assaut et prit son sniper. Il lança dans sa radio :

-Stalker aux infiltrés. Descendez-moi autant de pégases que possible. Armes lourdes, tirs de suppressions sur unité au sol. Terminé.

Puis il visa le ciel. Flesh sortit de son couvert et assura un tir soutenu vers les soldats solaires. Le sniper visait les points qui s'approchaient rapidement. Ils avaient moins d'une minute pour en abattre un maximum. Il visa juste devant l'un des pégases, et tira. Volée de plume, et l'un des volants partit en vrille vers le sol, pour s'écraser au milieu de la ville. Il tira sur le percuteur, recommença à viser, et tira une nouvelle fois. Le pégase fit une embardée, puis se replaça dans la formation, mais il volait visiblement moins vite. D'autres poneys volants tombèrent sous les tirs des snipers de l'unité.

Plus loin, Night Shine rechargea son fusil, et visa. Ils pouvaient désormais distinguer les couleurs des pégases. Il visa un poney blanc à la crinière jaune.

-Tu as voulu t'envoler...

Simple pression sur la gâchette. La balle traversa l'espace, et toucha le pégase à l'aile. Le poney tomba et leur passa au dessus, pour se crasher derrière. Le reste des Falcons passèrent sans leur prêter plus d'attention. Night Shine pouvait voir la légendaire Rainbow Dash à leur tête.

Être si près de légendes telles qu'elle. Combattre à leur côté, ou contre elles. Il y avait un quelque chose d'à la fois apocalyptique et épique dans cette bataille. Son regard se posa sur le corps du pégase qu'il avait abattu.

-... Je t'ai remis les pieds sur terre.

Le corps bougea. Le pégase se releva difficilement. Night Shine la visa, mais la ponette se remit sur ses pieds d'un coup, et hurla. Puis elle partit comme un boulet de canon. Night Shine n'eut pas le temps de viser. Il n'aurait pas le temps de réagir. Il sentit de la chaleur sur son côté, et une trainée de fumée le dépasser. Un missile se dirigea vers la pégase, et les deux se rencontrèrent dans une explosion. Les flammes se projetèrent jusqu'à Night Shine, mais le contournèrent, déviées par un bouclier de force. Le poney se retourna pour voir Polished Drill, l'arme encore fumante, et la corne qui brillait.

-A force de papoter, t'es pas concentré.

Night Shine lui fit un signe de tête, et recommença à tirer sur les soldats qui apparaissaient.

La carcasse du pégase atterrit près de Flesh. Celui-ci pu sentir les effluves de chair, de poils et de plumes brûlées. Un sourire se dessina sur ses lèvres.

-J'aime l'odeur du pégase brûlé au petit matin.
-On a pas vu de « matin » depuis treize ans, Flesh, lui dit Windvision.
-Il est très tôt.
-Qu'est-ce que tu en sais ?
-J'ai encore trois chargeurs pleins.

Sur ce, il se releva, et tira sur les soldats. Stalker secoua la tête.

-On en a pas éliminé assez. Soarin va avoir du mal.

Il prit sa radio.

-Ici Stalker. On va donner un coup de sabot aux ExpAir. Reculez jusqu'aux murailles.
-Shadow...
-Quoi, Wind' ?
-On a un gros problème.
-Quoi ? demanda-t-il en regardant par dessus les sacs de sables.

Il ne voyait que de la fumée et le brouillard de guerre formé par les tirs et les explosions. Impossible de voir à plus d'une centaine de mètres au sol. Mais il n'avait pas le don de Windvison.

-Les Aveuglées, lui dit son assistante.

Stalker vit une lueur à travers la poussière, et un rayon d'énergie frappa les défenses, faisant voler les barricades. Les hurlements des blessés se firent entendre. Les tirs redoublèrent vers l'origine du trait, mais d'autres encore traversaient le nuage, frappant ici et là la ligne tenue par les infiltrés. Stalker jeta un rapide coup d'oeil à ses soldats. Ils étaient trop peu nombreux pour faire face aux licornes de Twilight. Et Soarin n'avait pas ouvert la porte. Il prit sa radio.

-Jack, tu fonces aux murailles et tu ouvres les portes ! Night-Ops, on tient la lignes jusqu'à l'arrivée des renforts. Flesh et les licornes lourdes, on tient la position. Octavia, Night Shine, prenez les tireurs, contournez-les et harcelez-les sur les flancs.
-* Si on se disperse, vous serez trop peu nombreux * fit la voix de Black Jack. * Vous ne pourrez pas tenir. *
-Avec toi, on est toujours trop peu nombreux. Soarin occupe les Falcons. Va ouvrir les portes, qu'on puisse avoir des renforts.
-* Mais... *
-VA OUVRIR CETTE PUTAIN DE PORTE !

Les poneys aux alentours regardèrent leurs leader avec des yeux ronds. Les colères du commandants étaient rares.

-*... Reçu. *

Petit à petit, sous les tirs ennemis, les Fantômes reculèrent, jusqu'à être hors de la zone de combat, puis ils s'échappèrent en galopant. Les Night-Ops continuaient d'ouvrir le feu sur les licornes qui se détachaient de la fumée, entourées d'une centaines de soldats solaires.

Leur position était intenable, Stalker le savait. Les Night-Ops n'étaient pas entrainés à rester au même endroit de la sorte. De plus, leur nombre avait drastiquement diminué, surtout sans les Fantômes. Mais s'ils reculaient, rien ne garantissait que les Licornes ne les massacreraient pas sur le chemin. Les solaires avaient leurs tares militaires, mais leurs unités spécialisées étaient efficaces. Des rayons d'énergies continuaient de frapper la ligne lunaire, arrachant son lot de souffrance et de mort.

Octavia s'était éclipsée par une ruelle transversale, suivit de trois poneys armés de fusils de précision. Elle monta à une échelle, et atteignit les toits. Elle se dirigea vers le bord, et les poneys se mirent en position de tir. De l'autre côté de la rue, elle pu voir Night Shine et deux autres poneys faire de même. En bas, les combats faisaient rage, mais les solaires avaient clairement l'avantage. Elle prit son fusil, mit l'oeil à la lunette, et visa une licorne. Un détail attira son attention.

Aucune licorne ne semblait être blessée, ou même touchée. Elle décala sa visée.

Un bouclier. Les licornes avaient mit en place un bouclier. Tout ce que les Night-Ops leur envoyait ne servait à rien. Elle repassa aux licornes, pour trouver une faille dans leur défenses. Puis elle s'aperçut de quelque chose d'insolite. La licorne qu'elle visait la regardait. Sa corne brilla. Octavia tira, mais elle pu voir la balle s'arrêter devant le visage du poney magicien. Puis un rayon d'énergie partit de la corne du poney, et sortit de son champ de vision.

Les sons furent coupés. Juste un long et lancinant sifflement. Une étrange chaleur envahi son torse. Octavia baissa les yeux. Elle était debout sur ses pattes arrières. Du sang coulait en cascade sur son bassin. Elle continua de baisser la tête vers sa poitrine. Il n'y avait plus rien. Rien qu'un gigantesque trou fumant et sanglant. Ses lèvres tremblaient. Elle tomba à genoux. Une étrange mélodie commença à sonner à ses oreilles.

Elle aurait tant voulu...

Windvision vit le corps d'Octavia tomber du toit, et s'écraser la tête la première contre les pavés de la rue. Elle détourna les yeux. La radio de Stalker grésilla.

-* Ils ont des boucliers ! Je répète, ils ont des boucliers ! *
-Reçu, Shine, répondit le commandant.

Puis il se mit à couvert.

-Et merde.
-J'EN AI MAAAAARREEEEEUUUUUUU !

La voix de Drill tonna au-dessus des tirs. Windvison tourna des yeux ronds vers elle. La corne de la ponette brillait intensément, tandis que les missiles gravitaient autours d'elle et partaient en chaine dans son arme, puis étaient tirés sur les licornes, dont le bouclier les protégeait des explosions. Les yeux de la ponette commençaient à briller.

-MAIS RAAAAAAH !

Elle visa au sol, et tira. Au lieu d'exploser, le missile disparu. Il y eut un temps de latence, seulement entrecoupé des tirs que s'échangeaient les deux partis.

Puis ce fut l'apocalypse. Le sol sous les Aveuglées explosa, et les cris des solaires paniqués eurent peine à couvrir le bruit du tremblement de terre. Certaines licornes utilisèrent leur magie pour ralentir leur chute, mais beaucoup des corps qui volaient étaient désormais sans vie. Windvision se tourna vers Drill, qui vacillait, puis s'effondra à terre. Les Night-Ops poussèrent un cri de triomphe, et les tirs redoublèrent, fauchant les poneys sans protections. Windvison vit une licorne préparer une attaque, et elle épaula son fusil et tira une volée. Les projectiles pénétrèrent son torse et transpercèrent son crâne. L'énergie emmagasinée dans la corne se relâcha, et une explosion souffla les quelques soldats qui se trouvaient à côté. Windvision parcouru les ennemis du regard. Elle ne voyait Sparkle nulle part. Elle nous pense sûrement sans intérêt. Les Night-Ops allaient lui montrer qu'il ne fallait pas prendre les lunaires à la légère.

Soudain, elle sentit quelque chose d'électrique dans l'atmosphère. Elle l'avait suffisamment ressentit par le passer pour réagir de suite.

-A TERRE !

Les Night-Ops se jetèrent au sol, tandis qu'une gigantesque explosion colorée eu lieu au milieu de leur ligne. Windvision vit le corps disloqué de Roads voler et tomber devant elle. Elle se releva, et regarda vers les solaires. Au loin, un cercle de licorne était en pleine concentration. Leurs cornes brillaient, l'intensité lumineuse augmentant de seconde en seconde. Elle hurla dans sa radio.

-Night Shine ! Groupe d'Aveuglés à l'arrière !
-* J'ai vu. *

Il y eu un temps, puis Windvision entendit :

-* Tu avais la puissance d'un Dieu... *

Elle entendit une rafale, et deux licornes s'affaissèrent. Les autres déclenchèrent leurs boucliers pour se protéger.

-* … mais tu n'étais qu'un mortel.*

Windvision se retourna vers les remparts. Les Fantômes combattaient les soldats qui étaient venus défendre les murailles, mais le plus impressionnant était le combat aérien qui se déroulait dans le ciel. Des pégases tombaient. Une pluie de chair, de poils et de sang. Elle se souvint de ce vieil adage, datant d'avant la bataille pour le ciel.

Les plus grandes batailles débutent par une pluie de pégase.

Swift Wings avait les sabots pleins de sang. Elle en était à six. Six Faucons. Qui était la proie, qui était le prédateur, à présent ? Chaque pégase qui se présentait devant elle lui rappelait cette bataille qui lui avait couté sa vie et ses rêves. Ses rêves de voler. Ses rêves de vivre en pégase libre. Ses rêves d'une vie passée en compagnie de Middlecup. Sa vie avait été ruinée ce jour-là. Par un unique pégase. Et Swift Wings la cherchait des yeux.

Les pégases volaient à des vitesses effrayantes, enchainant les acrobaties les plus périlleuses pour éviter de se faire tuer, ou prendre par surprise un ennemi inattentif. Les poneys volants étaient concentrés. Concentrés sur leur vol, donnant le meilleur d'eux-même tout en tentant de se ménager pour l'avenir de la bataille ; concentrés sur leurs ennemis, qu'ils ne quittaient des yeux que pour vérifier que personne ne les avait prit en chasse. Concentrés sur la manière de tuer leur victime, de façon rapide et efficace. Les combats se réglaient au corps-à-corps, car toute tentative de tir se soldait par une esquive et un risque de tir ami. Les pégases avaient mit leurs fusils en bandoulière, quand ils ne les avaient pas tout bonnement lâchés, et avaient sortit couteau et lames, car les pégases étaient entrainés aussi au maniement d'armes blanches, plus efficaces. Les coups de machettes pleuvaient, ripant sur les protections aux bras, ou tranchant des membres aussi facilement qu'un fil tranche le beurre. Le pire était quand c'était l'aile qui était visée. Les pégases tombaient, hurlant, incapables de freiner leur chute.

Cependant, la bataille se déroulait peu en altitude. Les ExpAir, inférieurs en nombre, avaient opté pour un combat d'agilité, zigzagants dans les ruelles, profitant de l'aspect tentaculaire et labyrinthique de la capitale, mettant en œuvre des trésors d'ingéniosité de pilotage. Ils se battaient à un contre trois ou quatre, mais ils en emportaient toujours dans la tombe.

Swift Wings repéra un pégase qui la prenait en chasse, et fonça vers le sol. Elle prit une rue transversale, et suivit la rue, le pégase sur les ergots. La rue décrivait une courbe, et elle prit un maximum de vitesse. Une ombre passa au-dessus d'elle, et elle vit un autre Falcon se poster devant elle, un sabre au sabot. Elle déploya ses ailes, et fit un virage risqué à 90 degré, pour s'engager dans une étroite ruelle. Mais les deux pégases la suivaient à la trace. Elle employait toute son agilité pour esquiver les divers obstacles qui entravaient sa route, enchainant tonneaux, vrilles, rasant le sol et remontant. Mais les deux autres ne la lâchaient pas. Elle mit le sabot à sa ceinture, en décrocha une grenade, et jeta un coup d'oeil furtif vers l'arrière. Les pégases se rapprochaient, et ils commençaient à profiter de l'aspiration fournie par elle-même. Elle dégoupilla la grenade et la garda sur son cœur.

Les murs défilaient sur ses côtés, à peine assez éloignés pour lui permettre de déployer ses ailes. Elle plongea vers le sol, rasant les poubelles et obstacle de cette sinueuse ruelle. Ses yeux enregistraient des centaines d'information, et ses autres sens de pégase lui indiquait ce qu'elle ne pouvait pas voir.

Et pendant ce temps, dans sa tête défilaient les chiffres « Six... Sept... Huit... ». A neuf, elle lâcha la grenade, et fit une nouvelle accélération, sous les protestations de ses ailes qui la faisaient souffrir. Les pégases furent surprit de cette accélération, et redoublèrent d'efforts pour la rattraper.

Ils passèrent au-dessus de la grenade au moment où Swift comptait « Dix ».

L'engin explosa sous le ventre d'un des poursuivant, et il fut rejeté en l'air sous le choc, le thorax déchiré et brûlé. L'autre fut propulsé contre un mur, rebondit et s'écrasa sur l'autre, puis tomba en vrille et s'écrasa dans les poubelles. Swift ralentit, puis fit un looping pour se retourner. Le corps au milieu des récipients métalliques fumait. Puis il y eut un raclement, et le poney essaya de se redresser. Ses pattes avants flageolèrent et il s'écroula de nouveau. Swift Wings se rapprocha de lui. Il était en mauvais était. Son poil, bleu à l'origine, était plus sombre, roussi, et certaines touffes avaient été brûlées jusqu'à la peau. Une de ses pattes arrière formait un angle étrange, et son aile droite était réduite en miette.

Le pégase leva les yeux vers elle, puis détourna son regard et fixa son regard droit devant lui. Swift Wings sortit son pistolet de son holster, et lui tira une balle dans la tête. Le corps eut un dernier sursaut, puis retomba lourdement.

Elle en était à huit. Soudain, elle entendit un hurlement au-dessus d'elle, puis un corps tomba, percutant le toit et valdingua en chutant dans la ruelle. Il s'écrasa au sol dans un bruit de chair assez atroce. Rumble. Le jeune pégase qui avait refusé de suivre son frère dans l'armée de l'air solaire. Swift Wings leva les yeux.

Elle.

Les yeux de Swift Wings s'écarquillèrent. Puis elle sentit un feu naitre dans ses entrailles. Ses membres commencèrent à trembler, et sa mâchoire se contracta. La haine fit le tour de son corps, tandis qu'elle détaillait la robe bleue cyan, la crinière débraillée multicolore, ainsi que sa queue. Tout en elle déchainait la fureur de Swift. Elle la haïssait. Elle revit le corps chutant de Middlecup, le regard de la pégase quand elle l'avait visé, son air fier quand elle avait dévasté leur base d'un unique Rainnuke.

Puis Rainbow Dash baissa les yeux vers elle. Des yeux rose, qui détaillait d'un air blasé le poney qui se trouvait sous elle. Elle parut légèrement intriguée, comme si elle était surprise de l'attitude de la ponette. Elle ne fuyait pas, et pointait sur le leader des Falcons un regard non pas empreint de crainte, mais de fureur et de haine pure.

Rainbow Dash eut un sourire en coin. Puis elle s'éloigna. Swift Wings déploya ses ailes, et décolla, traversant en un instant l'espace entre le sol et les toits. Elle se retrouva à l'air libre, et chercha dans la direction qu'avait prit l'héroïne. Celle-ci volait à vitesse soutenue, mais on sentait qu'elle ne se pressait pas. Puis elle se retourna.

Rainbow Dash vit que la pégase au regard enflammé l'avait suivit, et fonçait droit sur elle. Elle fit rouler ses épaules, et détendit ses muscles. Elle ferma les yeux un court instant...

Puis elle les rouvrit, et fonça sur cette pégase. Les deux poneys volants se rapprochaient à une vitesse effroyable, mais aucune des deux ne trahissait la moindre hésitation dans son regard. Elle fonçaient droit devant elles, se rapprochant du point d'impact à une allure telle qu'aucune des deux ne survivraient au choc.

Puis le moment arriva, et les deux pégases s'évitèrent, chacune d'entre elle se mettant sur le flanc gauche pour éviter l'impact. Mais chacune tenta de lancer sa patte armée vers l'autre, dans l'espoir de toucher leur ennemi. Swift Wings continua son tonneau, et sentit la lame de Rainbow Dash lui raser le ventre, tranchant même quelques poils. Par contre, elle-même n'avait pas assez d'allonge pour inquiéter son adversaire.

Les deux pégases se dépassèrent, et montèrent en chandelle, tournant l'une autours de l'autre pour se jauger, trouver des faiblesses dans la garde de l'autre. Rainbow Dash était une experte dans le combat contre les pégases, mais en attestait les membres postérieurs rougeâtres jurant avec la robe de la pégase qui lui faisait face, elle non plus n'était pas en reste. Et ses yeux... Des yeux dans lesquelles dansaient des flammes. Rainbow Dash n'avait aucune idée de ce qui se passait dans la cervelle de son ennemie, mais sûr, elle lui en voulait. Et c'était plus profond que simplement un sentiment de revanche contre celle qui était considérée comme une traitresse à sa race. Elle avait dû lui faire du mal personnellement.

Swift Wings décrocha, et fonça sur la Falcon. Le pégase cyan avait eu un moment de relâchement, et Swift Wings devait profiter de cette chance. Rainbow fut à peine surprise, et se mit en garde avec sa lame. Rainbow Dash avait un fauchon, une lame à un tranchant assez court, très maniable. Swift, quant à elle, avait un simple couteau, cependant plus gros que la moyenne. Elle atteignit l'héroïne, dégagea sa lame d'un coup de patte sur laquelle se trouvait les brassards métalliques, partie indispensable de la tenue de combat des pégases, et plongea sa patte armée vers le torse de son adversaire. Mais Rainbow fit un mouvement tournant de son bras libre, et dévia son coup, puis se roula en boule et se rejeta en arrière. Une fois à l'horizontale, elle détendit ses sabots arrières et envoya une ruade dans le visage de Swift Wings. Celle-ci eut à peine le temps de faire un semblant de garde, et se prit ses propres pattes dans les naseaux. Elle fut légèrement sonnée et tomba dans le vide. Elle vit dans son champ de vision troublé la forme bleutée de son ennemie plonger sur elle. Elle déploya ses ailes, et augmenta sa vitesse de chute. Mais Rainbow Dash était bien connue pour être la plus rapide des pégases, et la rattrapait très vite.

Il ne restait que quelques dizaines de mètres avant le sol.

Swift Wings fit un tonneau de rétablissement et reparti à l'horizontale à travers les rues de Canterlot, Rainbow Dash toujours sur les talons. Elles entamèrent une course-poursuite à travers la ville, sous le regard surprit des gardes qui affluaient de partout. Swift Wings réfléchit à toute vitesse, se demandant comment renverser la situation. Soudain, elle vit son salut. Une banderole était pendue en travers de la route. Elle tendit les pattes avant, et attrapa au vol la corde de soutient de la banderole. Celle-ci se tendit tel un élastique, et Swift Wings fit une pirouette autours et s'aida de cela pour faire un brusque demi-tour, dans le but de surprendre l'héroïne.

Mais lorsqu'elle fut retournée, elle ne vit personne. La pégase cyan avait disparu. Swift Wings regarda rapidement aux alentours, vers le ciel, mais ne la voyait nulle part.

Puis elle ressentit une affreuse morsure dans le dos, qui se prolongeait jusqu'au thorax. Elle baissa les yeux. Une lame ensanglantée surgissait de l'endroit où se trouvait son cœur. Ses ailes ne parvinrent plus à la supporter, et elle commença à chuter, mais elle fut immédiatement rattrapée par la Falcon, qui la maintint tout contre elle. Elle lui chuchota à l'oreille.

-Très joli. Mais je connais mieux cette ville que toi.

Swift Wings aurait dû répondre, mais elle se contenta de cracher du sang. Rainbow Dash raffermit sa prise sur elle.

-Tu t'es bien battue, continua l'héroïne. La meilleure adversaire que j'ai affrontée depuis des lustres.
-Pas... Assez...

Rainbow Dash l'enserra plus fort, tout en veillant à ne pas bouger la lame enfoncé dans le dos de la pégase.

-Pourquoi ? Pourquoi est-ce que tu ne t'es pas enfuie ?

Swift Wings tourna lentement la tête, et croisa les yeux roses de l'élément de Loyauté.

-Tu... l'as... tué...

Rainbow Dash soupira.

-J'ai tué beaucoup de poneys. Mais pas tout le monde ose m'affronter pour les venger.
-J'ai... fui... une fois...

Rainbow Dash regarda attentivement la pégase. Comme si elle cherchait dans ses souvenirs. Mais finalement, elle secoua la tête.

-Je ne me souviens pas de t'avoir croisé.

Swift Wings sourit faiblement.

-Tant pis...

Puis Swift Wings leva brusquement son sabot tenant encore son couteau vers le visage de Rainbow Dash. Celle-ci se jeta en arrière pour éviter l'arme, retirant par là sa propre lame du corps de la ponette. Celle-ci mourut immédiatement, et chuta vers le sol, sur lequel elle s'écrasa mollement.

Rainbow Dash regarda le corps écrasé. Elle avait mal au museau. Elle mit son sabot sur celui-ci, et constata qu'il saignait. Ce dernier coup lui avait entaillé le bout du visage.

Elle sourit. En treize ans de guerre, c'était la première fois qu'elle était blessée durant un corps-à-corps.



Soarin observait la bataille aérienne. Il ne restait plus beaucoup d'ExpAir en vie. Il pencha son regard sur le cadavre qu'il tenait dans son sabot. Son visage était tourné dans le mauvais sens. Une de ses anciens équipières, Fleetfoot. Les Wonderbolts avaient tous succombé aux appels de sirène de leur leader, Spitfire. Mais pas lui. Et aujourd'hui, il rendait son honneur à son ancienne équipe. Même s'il fallait en passer par une purge. Il laissa tomber le corps, qui s'écrasa au sol, et jaugea la situation. Il ne devait pas rester plus d'une demi-douzaine de pégase lunaires, mais le tribut prélevé chez l'élite des forces aériennes solaire était plus que conséquent. C'était même la preuve de l'échec de cette « unité d'élite ».

Le rêve de Soarin. Mettre fin à cette prétendue suprématie des solaires. Montrer que les lunaires pouvaient voler de la même manière. Prouver que le ciel était un endroit libre, sans frontières. Il respira. L'air était vicié du sang des blessés, et des combats qui se déroulaient plus loin. Les Night-Ops luttaient contre des troupes qui arrivaient de partout, des rayons d'énergie frappant leur ligne. Un groupe de poney progressait difficilement dans la direction des remparts, sans cesse stoppés par des vagues de gardes et de soldats ennemis.

Soarin regarda derrière lui. Les troupes lunaires n'étaient toujours pas là. Il battit des ailes plus raidement, et commença à prendre de la hauteur. De là-haut, il parviendrait peut-être à...

Levant les yeux, il aperçu une boule de flamme lui tomber dessus. Il opéra un rapide changement de cap, évitant de justesse le projectile tombant sur lui.

Non, ce n'était pas un projectile. La boule orangée décrit un arc, et s'arrêta à son niveau.

-Alors, Soarin, dit Spitfire. On rêvasse ?
-Spitfire...
-C'est moi.

La pégase fonça sur lui, et il fit de même. Les deux pégases se regardaient droits dans les yeux. Spitfire prit son couteau, Soarin ajusta ses renforts aux sabots. Il y avait peu de distance entre eux deux, mais chaque millième de seconde leur apportait leur lot d'information sur l'ennemi, sa posture, la façon dont il allait se battre, les intentions qui transparaissaient dans leurs yeux, mais aussi sur l'air, la façon dont ils pourraient utiliser les variance de pression pour se battre.

Ce fut le choc. D'un geste, Soarin para l'arme de son ennemie, mais celle-ci utilisa son bras libre pour dégager ses sabots tendus, et lui envoya sa tête dans le thorax. Il entendit un craquement, mais ne sentit rien. Le Booster faisait encore effet. Cependant, ses yeux floutèrent un court instant, dont profita la pégase de feu pour lui envoyer une ruade de plus dans le ventre. Soarin eut le souffle coupé. Spitfire ne lui laissa pas une seconde de libre, se jetant une fois de plus sur lui. Soarin se laissa tomber, mais au moment où la pégase l'atteignit, il déploya brusquement ses ailes, faisant un mouvement pivotant qui lui permit d'esquiver le coup de son ancienne partenaire, et lui donna un coup de sabot dans le visage. Le museau de la pégase craqua, et elle se jeta en arrière, évitant un deuxième coup de l'étalon.

Les deux pégases se jaugèrent à bonne distance. Soarin osa un rapide coup d'oeil à son état. Il était couvert de sang, et beaucoup provenait de lui-même. Il avait du mal à bouger certains membres avec fluidité, malgré l'absence de douleur. C'était un des effets dérangeants du Booster. Quand on ne ressentait pas la douleur, on ne faisait pas attention.

Spitfire était légèrement en meilleur état. Elle s'était battue avant de défier Soarin, cela se voyait. Elle arborait quelques blessures, mais l'étalon se doutait que la majorité du sang couvrant son corps n'était pas le sien. Autours d'eux, la bataille aérienne s'achevait. Les derniers ExpAir tombaient.

Soarin eut un sourire. Spitfire prit une expression étonnée, et l'étalon fonça vers elle.

Choc.

Soarin ne parvenait plus à respirer. La pégase l'avait attrapée au cou, et l'étranglait. Soarin sentait qu'ils montaient, mais le manque d'oxygène, le sang qui le quittait et les blessures l'empêchaient de réfléchir correctement. Il ne pouvait même plus bouger.

-Soarin, Soarin... Mon pauvre Soarin...

Spitfire descendit la tête du pégase au niveau de la sienne, et planta son regard dans le sien. Elle rapprocha son visage, et mit son museau à son oreille.

-Tu a toujours été...

Soarin ressentit un choc dans son ventre. Puis une étrange chaleur, qui s'écoulait le long de son corps.

-Faible.

Autre choc.

-Misérablement faible.

Autre choc.

-Faible, faible, faible, FAIBLE, FAIBLE, FAIBLE, FAIBLE !

Chacune de ses injonctions était ponctué d'un nouveau coup de couteau dans la chair tendre du pégase. Sa vue se brouillait, des tâches noires apparaissaient par intermittence. Mais aucune douleur.

Spitfire continua de s'énerver sur le pégase, lui hurlant dessus pendant une trentaine de seconde, puis elle l'écarta d'elle, et le lâcha. Il se sentit tomber, mais il n'y accordait aucune importance. Il était mort en volant, dans une superbe chute. Il écarta légèrement l'aile avec les dernières forces qu'il lui restait, et entama une vrille vertigineuse. Son champ de vision s'obscurcit. Dans un dernier sursaut de vision, il vit le sol se rapprocher. Il se rappela des paroles que lui avait enseigné son maitre, Bro N'Air, à l'école de pilotage. Au sujet des chutes.

Si tu tombes, il y aura toujours quelque chose pour te rattraper.
Ne serait-ce que le sol.



Scamper vit le corps de Soarin le traitre s'écraser à terre. Il tourna la tête vers la pégase qu'il tenait encore. Il retira sa lame de son œil, et la laissa tomber sur le toit où il était posé. Il promena son regard sur la bataille qui avait lieu dans l'enceinte des murs. Un groupe de poneys tentait une percée jusqu'aux portes. Ils avançaient rapidement, mais payaient cher leur avance. Plus loin le long de la route, un autre groupe combattait, résistant vague après vague aux troupes de l'armée de Celestia leur envoyait. Mais leur groupe était bien amoindrit, depuis le moment où ils étaient passés au-dessus d'eux. Scamper était par contre effaré du nombre de Falcons qui étaient tombés. Sur les cinquante pégases, il n'en restait qu'une vingtaine.

Ils avaient été clairement surclassés par les pégases lunaires.

Scamper chercha Surprise du regard. Il avait perdu la pégase du regard lors de l'assaut, et désormais, il cherchait une scène de destruction massive pour localiser sa partenaire. Mais il n'y avait que deux zones de combats, et aucune d'entre elles n'était dans un chaos total. Scamper s'envola, prenant de la hauteur. Il dominait le champ de bataille. Il pouvait voir l'immensité de la capitale. Puis il entendit des froissements d'ailes à côté de lui. Rainbow Dash se tenait là, à la même hauteur. Ce qui choqua immédiatement Scamper, ce fut l'entaille qui ornait son museau. C'était si rare de voir leur chef être blessée.

Mais Rainbow Dash ne se souciait pas de sa blessure. Elle regardait, l'air inquiète, un point au sol derrière Scamper. Celui-ci tourna son regard, et comprit l'objet de l'inquiétude de la pégase.

Au-delà des remparts, une masse noire arrivait. Il pouvait sentir des vibrations dans l'air, et percevoir le mouvement des chenilles. Il voyait des poneys en marche. Il voyait une armée, à quelques centaines de mètres des remparts. Il se tourna vers Rainbow Dash.

-Qu'est-ce qu'on fait ?

La pégase secoua la tête.

-Tant que les portes ne sont pas ouvertes, ils ne peuvent rien faire. Nous allons faire en sorte qu'elles le restent. Toi, fit-elle en pointant Scamper, va prévenir Twilight et Celestia. Les Lunaires sont à nos portes.

Il salua.

-Bien comprit.

Rainbow se mit à marmonner des ordres dans sa radio, tandis que Scamper se dirigeait vers le château. Il jeta un coup d'oeil en bas, vers les combats qui se déroulaient entre les Licornes du Soleil et les soldats lunaires.

Et il la vit. Ou plutôt, il identifia les restes de sa carcasse. Les quelques poils non brûlés blancs, le reste de crinière jaune frisée.

Surprise.

Il s'arrêta. Qui avait fait ça ? Qui avait réussit à la toucher ? Elle était indestructible ! Qui avait osé ? Surprise était la seule à l'apprécier, bravant par là la règle tacite que Spitfire avait mis en place, à savoir faire en sorte qu'il quitte les rangs des Falcons. Elle avait été tuée, et il n'était pas là pour la couvrir.

Son corps était en miette. Comme détruit par un missile. Il chercha parmi les survivants des lunaires, et vit une licorne qui tirait se relevait difficilement, en tirant des projectiles avec son bazooka.

Faisant fi des ordres qu'il avait reçu, il plongea vers les lunaires retranchés.



Sterling Vision vit un pégase plonger en plein milieu des lignes lunaires. Profitant de la confusion engendré, ce dernier se jeta, dague au sabot, sur la foutrediacre de licorne qui les malmenait depuis quelques temps. Profitant de cette occasion, il s'adressa aux soldats qui l'entouraient.

-Soldats ! CHARGEZ !

Les soldats hésitèrent, les balles fusant toujours sur leurs positions. Le poney à la robe brûlée sortit son pistolet et tira dans le crâne du soldat solaire le plus proche.

-J'ai dit : CHARGEZ !

Les soldats empoignèrent leurs fusils, et galopèrent à travers le terrain découvert, Sterling Vision sur leurs talons. D'autres Licornes se joignirent à eux, apportant la protection que le poney quasi-aveugle ne pouvait pas leur apporter. Toute ses capacités magiques étaient concentrées à améliorer son champs de vision, et lui fournir une mince protection personnelle. Les balles s'écrasaient sur les boucliers magiques des licornes, tandis que les projectiles solaires les traversaient sans peine. Toutefois, les licornes trahissaient des signes d'épuisement. Un missile s'écrasa sur les protections, et une licorne s'évanouit, une bave écumeuse aux lèvres, parcourue de tremblements. Les boucliers perdaient de leur couleur à chaque pas. Puis ce qui devait arriver arriva, et une balle traversa le champ de force, frappant un soldat en pleine tête. Il s'effondra sans un cri, tandis qu'une autre licorne pliait les genoux, incapable d'avancer plus loin.

Ils étaient assez proches. Sterling Vision dégoupilla une grenade, et la lança au milieu des troupes ennemies. L'engin explosa, projetant trois corps dans les airs, et obligeant les autres à se mettre à couvert. Les solaires profitèrent de ce répit pour se protéger derrière les barricades.

Ils y étaient. Grâce à ce pégase.



Scamper ne s'arrêtait pas une seconde. Il mettait à profit toute son agilité de pégase pour éviter les blessures, mais cela ne l'avait pas empêché de récolté une balle dans la cuisse.

Il l'avait manqué. Cette licorne était une vraie furie, et s'était battu avec acharnement. Quand il avait fondu sur elle, elle avait esquivé au dernier moment, non sans récolter une méchante blessure sur le flanc. Mais elle avait répliqué avec tout son arsenal de magie, sans compter les autres lunaires qui s'étaient jetés sur lui, lame au sabot. Et ce n'était pas des guerriers ordinaires, Scamper en était sûr. Il avait eu un mal de chien à les éviter, tout en essayant de leur porter des coups, mais le fait était là : il avait joué au con. Seul, il n'avait aucune chance.

Soudain, un rayon d'énergie frappa un soldat lunaire proche de lui, désintégrant la moitié de son visage. Il tourna sa tête vers la provenance du tir, et aperçu avec soulagement qu'un contingent de solaire avaient avancé pour lui prêter sabot-fort. Il plongea derrière un couvert, et s'accorda quelques secondes de répit.

Il avait mit le sabot dans un truc bizarre. Il baissa les yeux, et failli vomir.

Surprise. Ou ce qu'il en restait. Ses membres tremblèrent. Il avisa un corps de lunaire non loin, et prit son arme, qu'il rechargea. Son regard fut attiré par des seringues dans l'équipement du cadavre. Du Booster ? Parfait. Il prit une seringue, et se piqua dans la cuisse. Puis il se releva et fit feu. Les lunaires se mirent à couvert, sauf une qui visait avec son lance-missile. Scamper la visa...

Un choc au crâne le fit tomber à terre. Il ne voyait plus que le sol et un sac de sable. Sur le sol, une grande tâche rouge se répandait. Il avait été touché. Son corps ne répondait plus. Des étoiles dansaient devant ses yeux.

Le plus étrange, c'était qu'il avait apparemment été touché à la tête, mais qu'il n'était pas mort. Non. Il était juste là, incapable de bouger. Il n'entendait même plus ce qui se passait. Rien.

Juste cette vision immuable d'une tâche rouge qui s'élargissait.



Sterling Vision avait vu le pégase se faire toucher par un tir des snipers qui étaient sur les toits. Dommage. Mais en même temps, ce crétin avait débarqué seul en plein milieu des lignes ennemies. Peu de poneys pouvaient se féliciter d'en ressortir vivant. En fait, Vision n'en connaissait aucun. Et il n'y en avait probablement pas plus. Mais au moins, son acte idiotement héroïque leur avait accordé une percée. S'ils s'en sortaient, il aurait une médaille posthume.

Les combats continuaient autours de lui. Il sortait régulièrement la tête pour tirer quelques coups de feu de son pistolet, puis il se remettait à couvert. Il rechargea son arme, et son regard se porta sur le poney à côté de lui. Il était accroupit, le sabot au fusil, mais ne se levait pas. Maintenant qu'il y pensait, Sterling ne se souvenait pas de l'avoir vu sortir.

Le poney leva les yeux, et vit que la licorne le regardait. Leurs yeux restèrent ainsi quelques instants, puis le soldat se déplia, prêt à bondir, et se leva brusquement pour se mettre à tirer. Immédiatement, une balle l'atteignit à l'épaule, et il s'effondra en arrière, gémissant de douleur. Puis une rafale partit d'un des toits, et frappa le corps, duquel gicla des petits geysers de sang. Le corps fut pris d'un spasme, et ne bougea plus, ne gémit plus.

Cependant, les solaires se rapprochaient, profitant de la percée opérée par Sterling et ses suivants. Les lunaires étaient débordés. Du peu qu'il en voyait, il devait en rester une dizaine au sol, et encore moins sur les toits. Mais leur défense était acharnée. Et quand bien même ce pégase était intervenu, cette maudite licorne était encore là, à tirer ses roquettes, qui d'ailleurs étaient désormais purement magiques. Cette traitresse à sa race allait bientôt finir épuisée.

Les solaires étaient encore nombreux. Très nombreux. Les Forces de Défenses étaient peut-être l'armée la moins active des forces de l'Empire, mais il fallait reconnaître que sous ses airs de paranoïa, la venue du Colonel Brush avait évité un sacré désastre. Et aussi le fait que les lunaires aient attaqué à cette heure-ci. Une heure plus tard, les Falcons étaient partis.

Il sortit de son couvert, visa un des soldats ennemi, et tira à plusieurs reprise. Les sacs de sables explosèrent à côté du lunaire, et une balle le toucha à l'épaule, le faisant reculer. Mais il se reprit, et tira une rafale dans la direction de la licorne. Une balle atteignit Sterling en pleine poitrine, arrêtée par son bouclier personnel, et la licorne se baissa. Sterling secoua la tête. Ses réserves de magie s'épuisaient, et sa vue se troublait de nouveau.

Maudit incendie. Maudits lunaires. Maudit attentat qui l'avait laissé brûlé, aveugle, et où il avait perdu sa corne. Celestia sois louée, elle l'avait sauvé, et depuis, ses talents la servait à jamais. Mais dans le cas présent, il aurait bien voulu qu'ils soient plus efficaces, ses « talents ». Il pencha la tête, de façon à voir les lunaires sur les toits. L'un d'entre eux tomba, touché, et la licorne vit un autre sniper prendre sa place. Il visa avec son pistolet, concentrant ses pouvoirs pour améliorer sa vision au détriment de sa protection. Puis il appuya sur la gâchette. Le poney rejeta la tête en arrière, et s'effondra, les pattes avants et la tête pendant mollement sur le bord du toit.

Sterling Vision nota que les tirs se faisaient moins entendre, et que moins de soldats solaires tombaient. Ils gagnaient.

Un étrange sifflement fit dresser les oreilles de Sterling Vision. Comme un sifflement d'...

La terre se souleva sous les solaires, et une explosion retentit. Puis d'autres cratères se formèrent, pulvérisant les pavés, la terre, la chair et les os. Le bombardement continua, prélevant à chaque projectile son lot de solaire. Les protections des licornes étaient impuissantes, et celles qui tentaient de résister finissaient à terre, la bave aux lèvres, pour finir par mourir quand même. Sterling entendait des hourras venir des lunaires retranchés, et les tirs redoublèrent, fauchant les soldats qui fuyaient pour trouver un abris. Ce qui impressionnait Sterling, c'était la précision des tirs. Ils atteignaient tous la route, sans frapper les maisons aux alentours, ou en tout cas, pas en direct.

Sterling avisa une ruelle transversale. Ils étaient en sécurité près des lunaires, mais cela tant que le bombardement continuait. Il fallait battre en retraite pour le moment.

-Soldat, avec moi !
-Non, fit l'un d'eux. Je veux pas mou...

Une balle dans le crâne mis fin à ses plaintes.

-Avec moi !

Les soldats lui emboitèrent le pas, et le groupe galopa le plus vite possible avers la ruelle, sous les tirs des snipers et des lunaires retranchés. Des solaires morts attestaient du chemin qu'ils avaient suivit, mais Sterling Vision arriva à s'en sortir avec une demi-douzaine de poneys.

Ce bombardement... D'où venait-il ?

Qu'y avait-il de l'autre côté des murailles ?



Iron Gear recalibra la visée du canon. Il surveillait les écrans du canon d'artillerie mobile, le général lui ayant ordonné de superviser le bombardement. Aucune erreur ne devait être commise, pour éviter le tir ami ou pire, de tirer sur des civils. Les pégases volants au-dessus d'eux regardaient dans leurs instruments, notant précisément les coordonnées des cibles, calculant les variations du vents en utilisant la technologie et leurs sens. Iron Gear, lui, comme tout les ingénieurs qui étaient présents, faisaient en sorte d'assurer un tir aussi précis que possible. Ou autant dire un tir parfait.

Les lignes lunaires faisaient face aux murailles, tel un siège, car les portes étaient closes. C'était un problème, et pas un petit. Mais un court appel radio leur avait signalé qu'une équipe était en court pour ouvrir les portes. Apparemment, les ExpAir avaient échoué.

-Merde, fit une voix à côté de lui.

Iron Gear quitta un instant des yeux ses instruments pour regarder le poney près de son engin. Un sniper de l'armée régulière. Un poney plus massif se posta à côté de lui.

-Qu'est-qu'y a, Arnaud ?
-L'uniforme des pégases, là-haut. C'est des Falcons.
-Hein ?

Iron Gear fut aussi surprit que le deuxième soldat. Les Falcons n'étaient pas sensés être là. Si ça se trouvait, l'échec des ExpAir était dû à la présence des troupes d'élites aériennes...

Il secoua la tête. Il tentait de sauver des vies. Les Night-Ops étaient en difficulté, et Luna avait ordonné un bombardement chirurgical sur les troupes qui les assaillaient. Iron Gear vit les coordonnées défiler devant ses yeux, entra des données de compensation, fit quelques rapides calculs. S'il n'était pas l'artilleur le plus talentueux au monde, les bébés dont il prenait soin chaque jour n'avaient aucun secrets pour lui. Il entra une nouvelle donnée, le canon fit un très léger mouvement, arrachant quelques grincements aux engrenages, et un clignotement lui indiqua que le tir était prêt.

-Attention ! hurla-t-il, et les poneys proches se bouchèrent les oreilles

Puis il appuya sur un bouton, et le tir partit, dans un sifflement qui s'éloignait. Au bout de quelques secondes, il entendit par-dessus la clameur des combats, un « boum ». Sa radio grésilla.

-* Joli coup, tête d'oeuf. En plein dans le mille. Prochaine cible : coordonnées 7- 22-... *

Iron Gear se remit à entrer des coordonnées. Soudain, une explosion se fit entendre depuis les murailles, et la terre explosa devant les lignes lunaires.

-ARTILLERIE SUR LES REMPARTS !

Iron Gear vit qu'effectivement, les défenses des remparts s'étaient mise en route. Mais les artilleurs ennemis n'en étaient qu'a l'ajustement. Leurs tirs étaient trop court. Mais il faudrait peu de temps avant qu'ils n'ajustent leurs visée.

-* A tout les artilleurs. Ordre de faire feu sur les remparts. Détruisez leur artillerie. *

D'un léger coup d'oeil, il vit le sniper à côté de lui avec la patte sur l'oreille, recevant certainement un ordre lui aussi. Il acquiesça, et épaula son fusil. Il se concentra quelques instants, et tira, rechargea, et se remit à viser.

-* Hé, tête d'oeuf, te déconcentre pas ! Coordonnées 3-10-... *
-Je peux tirer en direct, merci.
-* Hein ? *

Iron Gear regarda par l'écran de visée de son engin, et commença à manipuler les commandes. Il voyait un des canons ennemis. Celui-ci cracha du feu et de la fumée, et Iron Gear entendit le sifflement lui passer au-dessus de la tête, et une explosion avoir lieu derrière lui. Il entendit les cris de souffrance des soldats. Il manipula une dernière fois les commandes.

-Attention !

Il appuya sur le bouton, et le tir partit. Une seconde plus tard, le canon ennemis disparu dans un nuage de fumée. Iron Gear vit une silhouette tomber, et s'écraser devant les remparts. Quand la fumée retomba, le canon ennemi était tordu. Inutilisable. Un sourire passa sur les lèvres d'Iron Gear, et il se mit en quête de sa prochaine cible. Mais il fallait que ces satanées portes s'ouvrent.



Black Jack n'en pouvait plus. C'était interminable. Toutefois, ils progressaient, mais combien des leurs étaient morts ? Il avait bien tenté de passer par des routes transversales, mais toute cette partie de la ville était remplie de soldats solaires. Une autre escouade ennemie leur barra la route, et les Fantômes pointèrent leurs armes, et ouvrirent le feu. Quelques soldats furent fauchés, mais les autres brandirent leurs fusils et répondirent à leur feu.

Puis il y eu un tremblement, suivit d'un nuage de fumée dépassant les toits. Les soldats solaires surpris se retournèrent. Profitant de cet instant, les Fantômes les tuèrent jusqu'au dernier, puis continuèrent à avancer, tirant sporadiquement sur les soldats qui apparaissaient autours d'eux. Quand il passa au-dessus des cadavres, Black Jack ne put s'empêcher de ressentir de la pitié. Eux ne se battaient pas pour une idéologie. Ils se battaient parce que leur maison, leur famille était en danger. Peu leur importait qui était dans le droit ou non. Ils se battaient pour protéger.

C'était l'un des aspect de cette guerre que Black Jack haïssait le plus. Dans son esprit, la raison était certes du côté des lunaires, mais ceux qu'ils combattaient n'était pas les fous tels que les Aveuglées ou Celestia. Non, c'était des gens lambda qui pensaient défendre leur foyer contre des envahisseurs. Mais pour mettre fin à cette guerre, il fallait leur passer dessus, comme il était en train de le faire.

Par dessus les toits, il vit les remparts. Ils étaient enfin arrivés. Il regarda ses soldats. Ils étaient une vingtaine encore debout. Black Jack leva a nouveau les yeux. Les remparts devaient être bien gardés. Comment passer pour atteindre la console de commande ?

Black Jack pouvait voir le centre de commande, là-haut, la porte grande ouverte. C'était désespérant...

Le porte ouverte ?

Une étincelle s'alluma dans l'esprit de Black Jack, et il sortit de son sac son « cadeau ». Il l'avait volé, il y avait quelques temps, dans un entrepôt secret bien gardé, derrière les lignes solaires. C'était d'ailleurs une des missions-test qu'avaient eu à subir les Fantôme. Cela étant, il avait récupéré cet engin. Un espèce de fusil blanc aux formes étranges, rondes, et trois crochets au bout. Sur le côté était peint un symbole, un cercle formée d'un myriade de petits triangles.

Le symbole du Pr. Science, un des plus grands génies à avoir parcouru Equestria. Le créateur de l'électromagie, et d'un nombre incalculable de machines dont l'une des plus importante se trouvait dans les sabots de la licorne. Le pire était que le vieil Aperture était un terrestre tout à fait normal. Juste intelligent, et qui souhaitait que la magie ne soit pas réservée aux licornes. Résultat, il avait créé un tas de machines pour permettre à des non-magiciens de réaliser des choses qui leur aurait été impossible autrement.

Et son bijoux le plus précieux était ce que Black Jack possédait désormais. Un fusil à portail, pouvant créer une entrée et une sortie sur n'importe quelle surface plane. Plus puissant qu'une téléportation de licorne, et cela permettait non seulement de voir à travers le portail, mais aussi de le traverser, et cela indéfiniment tant que les portails étaient en route. Il y avait deux limites. D'abords, une seule entrée et une seule sortie, soit deux portails. De plus, il y avait un problème de batterie.

Et il était désormais temps d'utiliser le chef-d'oeuvre du défunt poney. Black Jack eut une pensée pour la fin tragique du vieux professeur, qui avait simplement refusé d'accorder le monopole de l'électromagie à l'Empire...

Black Jack épaula le fusil, et visa la cabine. Il pouvait avoir l'intérieur...

-Hep !

Un des Fantôme posa le sabot sur le fusil.

-C'est qui le sniper, ici ? fit Coffee Crime.

Black Jack jaugea l'ex-Night-Op, puis lui donna le fusil. Coffee Crime visa quelques instants, concentrée, souffla longuement, et tira. Un trait d'énergie bleuté traversa l'espace, et se colla à l'intérieur de la salle de contrôle, formant une grosse tâche de la taille d'un poney à l'intérieur. Black Jack nota avec satisfaction qu'aucun soldat solaire ne semblait s'en être aperçu, occupés à tirer sur l'armée qui se tenait à leurs portes. Coffee Crime pointa le fusil sur le mur à côté d'eux, et tira une nouvelle fois. Le tir fut cette fois orange, et la tâche correspondante se forma sur le mur. Puis l'intérieur de la tâche devint transparent, et ils virent l'intérieur de la cabine.

-Putain, fit Frostbite. Ça marche, en plus.
-On peut traverser ? demanda Painless.

Black Jack s'approcha de l'ouverture. Des poneys s'agitaient à l'extérieur de la cabine, mais personne ne jetait de coup d'oeil vers eux. Il avança une patte... Et se retrouva dans la cabine, avec ses soldats qui le regardaient de l'autre côté. Il sourit, satisfait, et dirigea son regard vers la porte. Il perdit son sourire.

Un soldat à l'air mauvais le regardait. Il avait l'air d'avoir sérieusement dégusté. Il pointa son arme sur la licorne et ouvrit le feu. Black Jack se jeta à terre, sentant les balles lui siffler à proximité. Puis il entendit les Fantômes lancer un cri de guerre, et s'élancer à travers le portail en tirant sur l'intrus. Celui-ci battit en retraite, en hurlant des ordres. D'autres soldats solaires convergèrent vers la cabine de commande. Puis il y eut une autre explosion, toute proche. Le bombardement des remparts continuait. Coffee Crime aida Black Jack à se relever, puis fonça à la suite des Fantômes, qui établissaient un périmètre de sécurité autours de la salle de contrôle. Avant de sortir, elle lui lança.

-Ouvre les portes ! puis elle sortit.

Black Jack se retourna vers le panneau de commande. Mais qu'est-ce qui ouvrait les portes ?

Ah ! C'était assez évident, en fait.



Crimson Brush combattait ces ennemis venus de nulle part. Ils étaient apparus dans la cabine de contrôle. Puis il sentit un grincement sous ses sabots. Le pire venait d'arriver. Les portes s'ouvraient. Il vit une licorne noire sortir de la cabine de contrôle pour prêter sabot-fort à ses coéquipiers. Crimson le visa, mais un coup dans la patte lui fit lâcher son arme. Une ponette le toisa, une flamme de haine dans les yeux.

-Commandant Brush...
-C'est Colonel, lui répondit-il sur un air narquois. Je vous connais ?

Il sortit son couteau et se jeta sur la ponette. Celle-ci esquiva le coup, et lui envoya sa patte vers le visage du colonel, qui se prit le coup de plein fouet. Il tomba à terre.

-J'étais sous vos ordres, auparavant, continua la ponette. C'est ce qui m'a donner envie de changer de camp.

Crimson Brush était par terre. Sous lui, il sentait un petit objet. Un petit sourire naquit sur ses lèvres.

-Oh ! Une traitresse ? Savez vous le châtiment réservé aux traitres ?

Il se retourna sur le sol, dévoilant son pistolet qu'il avait récupéré.

-La mort.

Il tira trois balles, qui atteignirent toute Frostbite dans le crâne. La ponette vacilla, et s'effondra au sol. Sol qui tremblait, par ailleurs, nota Brush. Il étira le cou, et regarda en bas des remparts. Des chars traversaient la porte, escorté d'une myriade de poneys, qui tiraient sur les soldats lunaires dépassés. Certains d'entre eux montaient sur les remparts, pour aider leurs camarades. Brush se releva, et galopa le long des remparts, vers un escalier plus éloigné. Pendant qu'il allait, il prit sa radio.

-Colonel Brush aux Forces de Défense. Remparts pris. Je répète, on a perdu les remparts.

Il déglutit. La prochaine phrase avait du mal à passer.

-Repli immédiat. Je répète, repli immédiat. Regroupement sur la ligne de défense Béta.

Il jeta un dernier coup d'oeil aux combats qui se déroulaient dans la rue principale. Les canons des chars lunaires venaient en aides aux unités qui s'étaient infiltrés.

Il jura. Canterlot était envahie.

C'est pas moi qui te l'ai conseillée celle-là?

-Elle vise les licornes.
-Elle s'aperçoit qu'elles sont protégées.
-Elle voit que la licorne qu'elle vise la repéré et prépare une attaque.
-Elle tente un tir désespéré, mais la balle s'écrase contre le bouclier.
-La licorne tire son projectile, et la suite on la connait.

La bataille fait rage dans les rues de Canterlot. Grâce aux opérations perpétrées par Shadow Stalker et ses Night-Ops, les forces de la République Lunaire sont parvenues à atteindre la capitale sans se faire repérer par l'Empire Solaire. Les commandos s'infiltrent à l'intérieur des murs et commencent à faire diversion pour que les pégases des ExpAir de Soarin ouvrent les portes à l'armée au sol. Mais les Falcons de Rainbow Dash interviennent et s'engage alors une bataille aérienne meurtrière au cours de laquelle Spitfire tue Soarin en duel. Alors que les Night-Ops se font massacrer par les Licornes du Soleil, Black Jack et ses Fantômes utilisent une technologie novatrice, et parviennent à ouvrir les portes, ce qui oblige le colonel Crimson Brush, responsable de la défense de la ville, à ordonner la retraite...

Minor Impact tremblait. Dans la cave éclairée uniquement par une lanterne centrale, entouré de sa famille, il attendait. Quoi ? Il ne saurait le dire. La fin du cauchemar, sans doute. La lueur de la lampe vacillait tandis que le sol tremblait, et des volées de poussières se détachaient du plafond, ajoutant à l'angoisse initiale celle de voir leur foyer s'écrouler sur eux.

Et le bruit des chenilles. Les éclats de voix, les claquements secs des tirs échangés, les cris de souffrances, et surtout, les bruits d'écroulement, comme si ailleurs, d'autres n'avaient pas eu la chance de garder leur domicile intact. Minor essaya de penser à leurs amis, qui vivaient par delà la cité, voir même à ceux qui combattaient au nom de...

De quoi ? Qui était dans le bon droit ? Sont-ce les Lunaires, qui brandissent le flambeau de la liberté, mais on toujours attaqué dans le dos, pillent des villages, et massacrent ceux qui font allégeance à la Princesse, ou les Solaires, qui font exactement la même chose pour préserver l'Empire ? Minor s'était toujours peu intéressé à la politique. Il était du côté solaire pour la simple et bonne raison que c'était avec la Princesse du Soleil qu'il avait grandi, qu'il était sous un régime stable, et que rejoindre la cause Lunaire était une entreprise pour ceux qui n'avaient pas peur de mourir. Or, Minor Impact avait peur. Là, en ce moment, il avait peur. Et c'était la raison pour laquelle il n'arrivait pas à penser à qui que ce soit d'autre qu'à lui même et à ses deux chéries qu'il enlaçait. Étant le mâle dominant, il se devait de donner l'impression de protéger sa famille, même piégé au fond d'un trou à rat. Mais il ne pouvait rien.

Il n'était qu'un simple, un pauvre et un impuissant civil.

Et tout ce qu'il pouvait faire, c'était attendre, serrer sa famille, proférer des mots doux pour calmer sa fille en pleur, caresser la crinière de sa femme qui tremblait, et ne pas montrer qu'il était aussi terrifié qu'elles. En haut, il entendit un bruit sourd, un bruit de canon de gros calibre, et la poussière tomba une nouvelle fois du plafond. Il avait envie de hurler à l'aide, mais à qui ?

Oui, à qui ? Personne de mortel. Ses pensées divergèrent vers la Princesse. Puis à cette image s'ajouta celle des autres princesses alicornes. Celestia ne pouvait pas les aider, depuis son château. Ou alors, peut-être était-elle en train de combattre, elle aussi ? La princesse Luna devait mener les troupes des Lunaires. Elle ne devait sûrement pas se soucier des civils. En tout cas, pas tant qu'ils se terraient chez eux. Et Cadence... Les poneys avaient peu entendu parler de cette princesse, jeune par rapport à ses consœurs millénaires, jusqu'à son mariage avec le Prince Shining Armor. Et quand tout a basculé, quand Luna a décidé d'organiser une rébellion pour renverser sa sœur, Cadence et Armor se sont enfuis vers les contrées zèbres, le capitaine de la garde ne voulant pas servir contre ses frères, et la princesse déchirée par la haine qui grandissait entre les sœurs. Sans compter qu'il y avait apparemment quelque chose qui liait ces deux-là à la Chef Suprême des Licornes du Soleil, Twilight Sparkle, quelque chose qui les avaient fait fuir ce que l'héroïne était devenue.

Quoiqu'il en soit, personne ne pouvait les aider. Ils n'avaient personne à... prier.

Minor Impact, et sûrement la majorité des Canterlotiens ne s'étaient jamais préoccupés de la guerre. Et la voilà qui frappait juste à leur porte de leurs balles d'acier, réduisant à néant tout ce qu'ils avaient connus. La Longue Nuit apportée par Nightmare Moon n'avait que retardé le lever du soleil, le Chaos signalant le retour de Discord n'avait, en réalité, pas fait plus de dégât que des nuages de barbe à papa et des pluies de chocolat. Même l'attaque des Changelings n'avait pas autant bouleversé le monde dans lequel vivait le pauvre poney. Parce qu'à chaque fois subsistait un espoir.

Et là, Minor Impact le voyait, Celestia était dépassée, Luna était dans son délire de liberté, Cadence et Shining Armor s'étaient enfuis, et les six héroïnes s'entre-tuaient.

Qui prier pour que cette folie s'arrête enfin ?



Rarity se mit à couvert, tandis qu'une explosion faisait éclater la rue à quelques mètres d'elle. Les éclats de pavés et de terre retombèrent au sol, salissant sa robe blanche et couvrant sa crinière de poussière. Mais au final, après trois jours de vadrouille, cela n'avait plus aucune espèce d'importance. Sa robe s'était tâchée de boue il y avait quelques temps déjà, et sa coiffure ne ressemblait plus à rien, écrasée par son casque qu'elle avait vite resserré au début de l'engagement.

-Qu'est-ce que je ne donnerais pas pour un bon bain...

Si tout ce petit monde se retrouvait dans un spa pour profiter des massages d'Aloe et Lotus, elle était sûre que la guerre finirait instantanément. Mais il fallait croire que personne ne songeait aux pattes expérimentées des deux ponettes du spa de Ponyville.

De plus, elles étaient probablement dans le tas. Pourquoi pas l'une contre l'autre, tant qu'on y était ?

Rarity fut secouée par un poney orange.

-Woh ! Rarity ! Ça va ?

Rarity regarda autours d'elle, surprise. Il y avait plus de Lunaires qu'elle n'en avait vu il y avait quelques secondes, et moins d'éclats de balles. Ils avaient avancés pendant qu'elle était restée à terre. Applejack regarda son amie l'air inquiet.

-T'es sûre qu'ça va part'naire ? Ça fait plusieurs fois qu'tu nous fais l'coup !
-Désolée, fit la belle en raffermissant sa prise sur son arme. Je te suis.
-J'espère bien.

Et la fermière reprit sa course à travers les rues de la ville, Rarity lui emboitant plus ou moins le pas. La terrestre avait raison. Depuis le début de cette histoire, Rarity passait un temps non négligeable à se perdre dans ses pensées, la plupart du temps incluant la fin de la guerre avec une idée ridicule inspirée par la situation dans laquelle elle se trouvait. Mais le stress, la pression, la peur de mourir, l'angoisse permanente de devoir tirer lui donnait envie de quitter la réalité.

Car oui, elle n'avait pas tiré une seule balle. Pas sur un ennemi en tout cas. Enfin, personne de visible, et cela pour deux raisons. La première était qu'elle ne parvenait toujours pas à se faire à l'idée de tuer. Elle avait subit son entrainement il y avait à peine quelques semaines, et cette bataille était son premier combat. Elle qui avait passé les treize dernières années à vouloir sauver des poneys en leur confectionnant les meilleures protections que son cerveau pouvait concevoir, au détriment de son savoir artistique, voilà qu'elle voulait prendre part à ce qui serait la bataille la plus meurtrière de l'Histoire. Du moins, où les deux camps ripostaient. Et elle n'était pas prête. Mais elle n'aurait reculé pour rien au monde, pas quand ses trois amies ayant participé à cette guerre étaient présentes. Et cela était la raison pour laquelle elle ne se laissait pas distancer par Applejack.

D'ailleurs, celle-ci était la seconde raison pour laquelle Rarity n'avait pas encore tué. Qui, de toutes façons ? Applejack, elle, n'avait aucun problème à tuer. Et hormis les rares instants de lucidité pendant lesquels elle s'occupait du bien-être de la licorne, elle s'adonnait pleinement au massacre de l'ennemi, privant Rarity de toutes ses cibles. Pire encore, Applejack était fervente partisane du corps-à-corps, secondée par une chance -ou un talent- exemplaire. Elle s'était rarement pris des balles, et toutes avaient été arrêtées par le gilet que Rarity lui avait confectionné. Et renforcé. Rarity n'aimait pas le favoritisme, mais la perspective de perdre son amie à cause d'une protection inefficace l'avait empêché de dormir quelques nuits. Alors, elle avait renforcé son équipement.

« Perdre son amie ».

Rarity leva les yeux au ciel. Les Falcons avaient battu en retraite vers le château. Elle se demanda si Rainbow Dash avait survécu. Oui, sûrement. Et d'après les survivants des Night-Ops, Twilight ne s'était pas montrée non plus. Elles étaient toutes saines et sauves. Pour le moment. Rarity se demanda ce qui se passerait si elles se retrouvaient. Si elles étaient toutes les quatre réunies, l'arme au sabot, si visant mutuellement. Tireraient-elles ? Est-ce que l'amitié qui les unissait il y avait quelques années comptait encore à leurs yeux ? Elle connaissait sa réponse personnelle. Elle ne pourrait pas. Elle chérissait le souvenir de ses amies telles qu'elles étaient quand la vie était belle et sans soucis à Ponyville. A quoi ressemblaient Twilight et Rainbow, aujourd'hui ? Elle ne parvenait pas à se défaire de l'idée que leur apparence n'avait pas changée. Elle regarda Applejack, et la réalité la rattrapa, encore. Elle était en train de défoncer le crâne d'un ennemi contre un mur, tandis qu'un lunaire en abattait un autre qui la menaçait. La licorne était de son côté complètement inutile, perdue dans les brumes de son propre esprit, qui déniait la réalité de tout cela.

C'était exactement ça. Elle déniait cette guerre, même plongée en plein milieu d'une bataille qui en déciderait le vainqueur. Elle pensa un instant à Fluttershy et Pinkie. Que devenaient-elles ? Vivaient-elles en paix dans la forêt, loin de tout ça ? Comment se sentaient-elles ? Savaient-elles ce qu'était devenu leurs amies ?

Reviendraient-elles après tout cela ?

-Grenade !

Rarity fut plaquée à terre par un soldat juste avant qu'une explosion se produise à côté d'elle, et tous les sons se coupèrent, remplacés par un long sifflement. Elle ferma les yeux, sentant le corps massif du soldat la protégeant des éclats. Puis, après quelques secondes, le soldat se releva, et Rarity ouvrit les yeux pour voir Big Macintosh lui tendre le sabot, qu'elle prit, puis elle s'en aida pour se relever.

-Rarity, tu d'vrais rester en arrière. T'es pas à ta place, ici.
-Mais.
-C'est un ordre. Reste à l'arrière. Va rejoindre les Night-Ops et les Fantômes.
-BigMac...

Le poney la regarda droit dans les yeux, un air sévère plaqué sur le visage. Elle perdit toute velléité de protester.

-Bien mon Capitaine.
-Je vais rejoindre A.J. Soldats, avec moi !
-Chef, oui, chef, répondirent les soldats qui suivaient le grand poney carmin.

Rarity les regardait la dépasser, puis se retourna et galopa vers l'arrière des forces Lunaires. Dans l'autre sens courraient des centaines de poneys en arme et des dizaines de véhicules blindés. Au-dessus du vacarme du déplacement de ces engins, Rarity pouvait entendre les bruits de combat plus avant dans la ville. Elle leva les yeux. Les bâtiments commençaient à accuser le choc de la bataille. Des éclats de balles constellaient les murs, certaines portions de maisons avaient été arrachés par le passage des tanks. Mais le pire était ces centaines de cadavres qui jonchaient le sol, dans les ruelles, couchés au pieds des murs dans un sommeil éternel, ou disloqués en morceaux de taille variable à cause des explosions.

Enfin, elle arriva au carnage initial. Les commandos, Night-Ops et Fantômes, rangeaient les corps de leurs morts. Il restait moins d'une dizaine de soldat à Stalker, et une vingtaine pour Black Jack. Elle les rejoignit, et vit Flesh tendre la patte vers un pégase noir au rayures bleue, qui posa de l'argent de mauvaise grâce dedans.

-Je t'avais dit qu'elle tiendrais pas, Rocket.
-Ta gueule, Flesh...

Rarity resta interdite. Il avait parié sur sa participation au combat ? Outrée, et surtout touché à un endroit sensible, elle fit demi-tour, l'air décidé. Mais en se retournant, elle tomba museau à museau avec Windvision.

-Calme-toi, Rarity.

La ponette verte lui fit un signe de tête, et la licorne la suivit. Elles se dirigèrent vers Shadow Stalker, qui regardait les corps alignés de ses soldats. Rarity vit le corps d'Octavia, une musicienne qu'elle admirait beaucoup, le torse percé d'un énorme trou sanglant, et le crâne défoncé. Elle avait envie de vomir. Voilà ce que Stalker créait. D'une artiste accompli dont la musique transportait au-delà des frontières, il avait fait une machine à tuer qui, finalement, était morte de façon horrible. Et certains se demandaient pourquoi elle refusait catégoriquement que le petit dragon qu'elle protégeait, malgré son potentiel martial indéniable, entre dans les rangs de l'armée. Elle jeta un regard dur à Stalker, mais celui-ci ne sembla pas y réagir.

-Bien sûr... dit-il en la voyant.
-« Bien sûr » quoi ? demanda-t-elle, agressive.

Pour toute réponse, Stalker mit son fusil en bandoulière et cracha son brin de paille.

-La pause est finie. On y retourne.
-Aye Aye ! répondirent les soldats.

Rarity vit les commandos, Fantômes inclus, prendre leurs armes et se diriger vers le lieu des combat. Stalker passa près d'elle.

-Mais... fit-elle. Que faites-vous ?
-Notre travail. Finir cette guerre.

Rarity contempla les corps alignés au sol. Stalker souffla.

-Nous auront le temps de les pleurer après, si on gagne. Et pour gagner, nous avons besoin de toute les forces disponibles.

Il se tourna vers elle.

-Peu importe ce que vous pensez de moi. Le fait est que vous avez voulu et vous êtes préparée pour être ici. Je ne sais pas pourquoi vous avez été envoyée en arrière...

Il recommença a marcher.

-...Mais vous feriez mieux d'arrêter et de vous battre.

Il tourna sa tête pour la regarder.

-Pour que ça en finisse.

Puis il rejoignit ses soldats et ils partirent au galop vers le centre-ville. Rarity renâcla, puis elle desserra légèrement la sangle de son casque. Elle était moins opprimée. Elle vérifia son arme, comme Applejack lui avait apprit, et s'élança sur les traces des commandos.



-Tenez la position !
-L'ennemi fait une percée sur la droite !
-TAAANK !

Explosion. Crimson Brush fut propulsé en arrière, jeté au bas de la barricade sur laquelle il se tenait. Le monde tournait autour de lui, et ses oreilles sifflaient, mais il se remit debout tant bien que mal. La barricade avait explosé, et au-delà il voyait les formes des soldats ennemis qui se dirigeaient vers la brèche, entourant la forme massive du blindé qui avait détruit les défenses. Les balles fusaient, et Brush battit prudemment en retraite derrière des sacs de sables non loin. Mais au moment de prendre son arme pour faire feu, il s'aperçut qu'il l'avait lâché lors de sa chute.

-Putain de bordel de...

Il se mit à couvert au moment où une mitrailleuse balaya ses positions. Trois soldats furent fauchés et s'écroulèrent à terre, les autres repliés sur eux-même, attendant que la tempête passe. Crimson Brush osa un regard par dessus la barricade. Le tank défonçait la première ligne de défense, et les soldats Solaires galopaient en sens inverse pour s'abriter sur la seconde ligne, où se trouvait Brush. Beaucoup tombèrent à terre pendant cette traversée. Crimson prit sa radio :

-Mais bordel, OÙ SONT LES UNITÉS ANTICHAR ?
-Mortes, mon colonel.
-ET VOUS NE SAVEZ PAS RÉCUPÉRER UNE ARME, SOLDAT ?
-Désolé, colonel, elles sont sur la ligne Bêta.
-ET ?
-... Nous sommes tous coincés sur la ligne Gamma.

De rage, Crimson rangea violemment sa radio. En clair, sans armes antichar, ils ne pouvaient pas récupérer les armes antichar. Il fit un tour du regard de la situation. Les Solaires avaient réorganisés leurs défenses sur la place centrale de Canterlot, sur trois lignes, Bêta, Gamma et Delta. C'était la dernière vraie défenses qu'ils avaient à opposer avant de devoir se replier vers le château. Crimson ne préférait même pas penser à cette solution. Ils devaient tenir cette position.

Mais c'était impossible. Il devait bien y avoir la moitié de l'armée lunaire qui s'était jetée sur la ville, et les défenses de Canterlot étaient affreusement limitées. Ils étaient fichus sans renforts. Et cet idiot de Général Stormbreak qui avait réquisitionné les véhicules blindés pour une offensive de type « Guerre Eclair » sur la frontière, soit-disant pour palier leur défaite dans la guerre des tranchées. Résultat, cinq pauvres tanks Solaires devaient faire face à ces foutus monstres d'acier qu'étaient les chars Lunaires.

Crimson ne savait pas qui étaient les ingénieurs qui avaient retouchés ces machines, mais il aurait bien voulu avoir les même dans son camp. Car pendant que les Lunaires augmentaient leurs puissance terrestres, les Solaires, eux, avaient mis le paquet sur les forces aériennes et magiques.

Et aujourd'hui, les Nuitards avaient évité les deux. Ne restaient pour les forces de Celestia que des Falcons décimés, des Licornes du Soleil qui, si elles s'étaient bien débrouillées contre les infiltrés, ne faisaient pas le poids face à une véritable armée, et des centaines de paires d'yeux pour pleurer. Sans compter que les Traitres étaient passés maitres dans l'art des combats urbains, des années de guérilla oblige, alors que les forces le l'astre du jour s'entrainaient plus souvent au combat sur champs de bataille, restants de millénaires de guerre avec lances et épées. Le boom technologique récent avait été mal réceptionné par les Solaires, tandis que Luna avait bien comprit tout les enjeux de cette nouvelle façon de faire la guerre.

En bref, ils n'étaient clairement pas à leur avantage. Et Brush devait reconnaître que les Lunaires avaient un don pour passer sous les filets. Comment, par le Tartarus et par les Alicornes, ces enfoirés étaient-ils arrivés jusqu'ici sans être détectés ? Il repensa à ce Nicholaus. Définitivement, quelqu'un aurait dû écouter ce paranoïaque.

Soudain, Crimson vit des silhouettes grimper aux bâtiments bordant la place, et d'autres prendre place sur les toits. Il prit rapidement sa radio.

-SNIP...

Il se prit une balle dans le cou, et s'effondra à terre. Il vit la radio tomber non loin de lui, et ses soldats, même à couvert, tomber, le crâne défoncé. Soudain, il sentit quelqu'un le prendre. Il fut mis sur le dos, et vit un médecin qui le tirait en arrière. Sa vue se brouillait, et il avait du mal à respirer. Il fut trainé pendant une éternité, le médecin n'ayant visiblement pas été prit pour cible par un des snipers. Puis le soigneur le lâcha, et se pencha sur lui, lui appliquant des compresses. Il entendit un vague :

-... de la chance... pas mortel... arrêter hémorragie.

C'était tout ce qui lui fallait. Il tâtonna dans sa veste, et sortit une seringue, qu'il se planta dans la patte. Presque immédiatement, ses sens se stabilisèrent. Il se releva, et constata qu'ils étaient sur la troisième ligne de défense. La dernière.

-Colonel, vous devriez...
-Vous avez arrêté l'hémorragie ? demanda-t-il d'une voix plus rauque que d'habitude.
-Oui, mais...
-Alors allez soigner d'autres blessés et laissez-moi !

Puis le colonel se reconcentra sur la bataille. La ligne Gamma était tombée, comme la Bêta avant elle. Dans une des brèches des barricades, il vit un poney orange, coiffé d'un Stetson, qui achevait les soldats Solaires en les écrasant à terre, un masque de rage sur le visage. La Terreur des Tranchées, l'héroïne Applejack. Crimson regarda par terre, et avisa le cadavre d'un soldat, auquel il prit son fusil, puis visa la terrestre.

S'il parvenait à faire ça, le moral de l'ennemi en prendrait un coup. Mais juste avant de tirer, il vit le poney rouge massif tout à côté, qui le visait. Crimson se jeta à terre juste avant que les balles ne s'éclatent sur les barricades. Cependant, il vit un soldat qui était derrière lui se faire déchiqueter par la rafale, et s'affaler lourdement à terre. Il releva la tête, et jeta un coup d'oeil au champ de bataille. Les Lunaires avaient parcourus la moitié de la distance jusqu'à la ligne Delta, et arrosaient celle-ci. Les Solaires se risquaient peu à découvert, et les rares intrépides se faisaient laminer.

Cette position était perdue. Crimson Brush hurla un juron, puis reprit un semblant de calme, prit une radio qui trainait à terre, passa sur la fréquence générale, et lança.

-Repli sur le château.

Un silence plana sur les lignes Solaires, qui ne fut cependant pas entendu à cause des tirs de l'ennemi. Cet appel était lourd d'implication.

Ils avaient perdus la ville. Il ne leur restait plus qu'a défendre le château jusqu'à la mort, ou les renforts.

Qui ne viendraient probablement jamais.

Peace Napper avait entendu l'appel, comme tout les autres, et galopait, baissé, à travers la ville-haute, vers le château. Ce n'était cependant pas une fuite désordonnée. Des poneys couvraient leurs camarades qui se repliaient, puis ceux qui reculaient gardaient leur position et couvraient la première équipe pendant qu'elle se repliait à son tour. Cependant, les Traitres approchaient, les munitions s'épuisaient, l'air sentait la fumée, la sueur et le sang, et la peur tiraillait ses entrailles.

Était-ce ainsi lors de toutes les batailles ? Y avait-il toujours cette angoisse ambiante, ce malaise permanent ? Peace Napper avait vu plus de mort et de sang en quelques heures que durant les trois dernières vies qu'il avait eues, il en était sûr. Non pas qu'il croit en la réincarnation. Mais l'image y était. Cependant, l'adrénaline lui donnait le courage suffisant pour ne pas craquer. Il évitait de penser à sa famille, car s'inquiéter n'avait aucun intérêt, au contraire, cela pouvait l'empêcher de réagir promptement.

Il avait tué aussi. Beaucoup. C'était la première fois, mais il n'avait rien ressentit de particulier. Il y était préparé depuis longtemps, et le chaos général ne lui laissait pas le loisir de s'apitoyer sur ses actes. Pour le moment, l'important, c'était de survivre. Et de couvrir ses alliés. Il se mit à couvert, mit un nouveau chargeur dans son fusil (technique qu'un vétéran lui avait enseigné : toujours avoir un chargeur plein, et garder ceux qui étaient entamés à un endroit différent), puis se mit à tirer sur les ennemis qui approchaient. Des éclats de balles volaient partout le long de la rue, et des morceaux de plâtres et de pavés s'envolaient, lâchant des volutes de poussières, tant et si bien que le gros des forces de la nuit était cachée par la fumée. Un vrai brouillard de guerre, duquel surgissaient des balles qui allaient frapper pierre, plâtre et parfois chair. Un allié de Napper s'effondra sans un bruit sous l'impact d'un projectile, et le poney se mit à couvert, jetant un coup d'oeil à l'autre groupe, espérant qu'ils étaient en position de couverture.

Puis il le vit. Dans une ruelle transversale, il vit la tête d'un poulain regarder l'action, puis s'enfuir. Peace Napper écarquilla les yeux, secoua la tête et tapota l'épaule de son chef d'unité.

-Sergent, civil ! hurla-t-il.
-Tant pis, c'est pas le moment !
-J'y vais, alors !

Le sergent le considéra. Puis il secoua la tête.

-Fais vite, Napper.

Le poney acquiesça, puis s'engagea dans la ruelle. Il voyait l'ombre du poulain devant lui, et galopa à sa poursuite, mais le jeune poney prit peur, et redoubla de vitesse. Jurant, Peace Napper accéléra, hurlant au poney de ralentir, lui disant qu'il allait le protéger. Mais à quoi cela servait-il ? Le gamin avait vu des choses qu'il n'aurait pas dû voir, et devait être complètement paniqué. Le poulain prit une ruelle a droite.

Merde, non !

A droite, c'était vers les Lunaires. Peace galopa le plus vite qu'il pu, réduisant la distance qui le séparait du gamin. De toutes part, il entendait les échos des tirs qui résonnaient dans les ruelles sombres, et le poulain continuait d'essayer de le semer, zigzaguant, prenant un maximum de tournant. Napper était désormais perdu, mais cela passait en second dans ses priorités, la principale étant de mettre cet enfant à l'abri.

Soudain, le gamin pila, et Napper fut rapidement sur lui. Mais avant de pouvoir lui parler, il vit ce qui l'avait arrêté. À quelques mètres devant, un soldat Lunaire les observait, un long fusil à lunette au sabot. Napper poussa le gamin derrière une poubelle, et visa le tireur d'élite, qui fit de même. Le sniper tira une balle qui ricocha contre un mur sans dommage, et Napper appuya sur la gâchette. Une demi-douzaine de balles sortirent du canon dans un bruit de tonnerre, avant que le claquement fatal ne se fasse entendre. Napper regarda son fusil avec horreur.

Il avait oublié de recharger.

Heureusement, le sniper vacilla, et tomba a terre. Il remua encore, rampant pour se mettre à couvert. Napper soupira de soulagement. Il l'avait eu. Il se tourna vers le poulain terrifié, lui adressant un sourire apaisant. Il tourna la tête vers le sniper, et ce qu'il vit lui fit serrer la mâchoire. Un soldat venait d'apparaitre, fusil au sabot, et le visait. Napper ferma les yeux. L'image de sa femme et son bébé s'imposèrent dans son esprit.

Feather, Gift, je suis désolé...



Rengoxx tendit le sabot vers Arnaud à terre.

-Ça va ?
-J'ai mal.

La licorne sniper prit son sabot, et le poney le releva. Une balle avait éraflé son épaule, mais la plupart des munitions avaient impacté son gilet. On pouvait dire ce qu'on voulait sur la Demoiselle Rarity, ses gilets étaient putain d'efficace. Rengoxx sortit une seringue de sa veste, mais Arnaud la repoussa en secouant la tête.

-Pas besoin.

Rengoxx acquiesça, puis se dirigea vers le corps du solaire. Il ne bougeait plus. Le poney rouge le toucha du bout du canon. Mort, définitivement. En même temps, sa mâchoire à moitié défoncée pouvait faire foi. Mais qu'est-ce qu'il foutait là ?

Soudain, un bruit tout proche le fit sursauter et il pointa son arme vers l'origine du bruit. Le poulain qui se trouvait là hurla de peur et se recroquevilla encore plus dans son coin. Rengoxx baissa son arme, et vit Arnaud et le reste de son unité le rejoindre. La licorne bleue regarda le gamin avec surprise. Il le désigna d'un geste de la tête.

-On en fait quoi, caporal ?

Rengoxx réfléchi, ce qui lui était un peu difficile, le temps que la brume du combat cesse de brouiller ses pensées. Il avait tendance à ne plus réfléchir en pleine bataille, laissant son instinct prendre le dessus. Il ne s'en plaignait pas, après tout, ça lui avait sauvé la mise plusieurs fois. Le problème, c'est que le sergent de l'unité était mort, et qu'il lui revenait de diriger son groupe. Et ce n'était pas facile quand le sang était la seule chose qu'on avait en tête. C'était la raison pour laquelle il déléguait au sniper, d'ailleurs. Il était meilleur stratège que le caporal, et chacun couvrait l'autre avec une relative efficacité, en se complétant mutuellement. Enfin, la rage de combat s'était suffisamment estompée pour lui permettre de tenir un raisonnement. Il s'accroupit pour se mettre au niveau du gamin.

-'Faut pas rester là, mon p'tit.

Le gamin le regardait avec des yeux terrifiés, sans émettre un son. Rengoxx roula des yeux. Ça allait être plus difficile que prévu. Il choppa le gamin par la crinière, et le releva, puis il le regarda droit dans les yeux :

-Tu me suis, c'est bien clair ?

L'autre le regardait, les larmes aux yeux.

-C'est bien clair?

Le gamin acquiesça avec de rapides mouvements de tête, et Rengoxx le lâcha, puis l'unité se mit en route. Rengoxx avisa une porte non loin, et la défonça d'un coup de sabot. Il fit un mouvement de tête pour montrer l'intérieur.

-Planque-toi là dedans, et ne bouge surtout pas avant que la bataille soit terminée.

Puis il replanta ses yeux dans ceux du poulain.

-C'est clair?

Le poulain s'engouffra le plus vite possible dans la maison, et le soldat referma aussi bien qu'il pu la porte, considérant que la serrure avait explosée. Puis il se détourna et secoua la tête. Les civils avaient des comportements tellement étranges lors des batailles. Enfin bref... Il réajusta son arme, et fit signe à sa troupe de continuer. Maintenant que sa rage de sang était calmée, il repensa au solaire, qui s'était présenté seul, et avait lutté au lieu de battre en retraite. Voulait-il protéger le poulain ?

Dans ce cas, il aurait mieux fait de faire comme Rengoxx, le mettre à l'abri dans un bâtiment quelconque.

Et après, on disait que c'était lui qui ne réfléchissait pas.

La troupe traversa les ruelles de Canterlot, pour rejoindre l'assaut principal. Les forces Solaires se repliaient sur le château, et les partisans de Luna avançaient rapidement. Cependant, l'escouade de Rengoxx avait été déviée dans les coins les plus sinueux de la ville par des snipers qui couvraient la retraite de leurs camarades, ces snipers qui avaient abattu leur sergent et avaient propulsé Rengoxx au rang de chef d'unité. C'était la loi de la guerre. Pas le temps de pleurer les morts, la chaine de commandement ne devait pas être rompue.

Enfin, le poney se demandait pourquoi on avait pas nommé Arnaud à un grade plus élevé. La licorne était clairement plus talentueuse en ce qui concernait la stratégie, et Rengoxx n'aurait pas pu s'en sortir si il n'avait pas été là. Il ne regrettait pas que le sniper eut été rattaché à son unité.

Petit à petit, les cris des soldats et les bruits des combats se firent plus forts. Ils revenaient vers une artère principale. En effet, les Lunaires devaient emprunter les grosses avenues à cause des blindés, les troupes à sabot servant à se débarrasser d'éventuels sniper et tireurs à armes lourdes. C'était d'ailleurs la raison pour laquelle l'escouade de Rengoxx s'était perdue. Enfin, le caporal avisa l'avenue principale au bout de la ruelle. Il força l'allure, commandant à ses hommes de se presser. Il s'engagea dans l'avenue.

Une rafale de balle le fit reculer immédiatement à couvert, la douleur explosant dans tout son corps. Il s'adossa au mur, et glissa pour se retrouver assis, serrant les dents pour lutter contre la douleur. Arnaud se posta au coin, et jeta un bref coup d'oeil vers l'origine du tir.

-Merde. Une place fortifiée !
-Je pensais que les tarés étaient en train de fuir vers le château ? dit un des soldat.
-Faut croire qu'il y en a des plus dérangés encore pour ne pas reculer.

Rengoxx baissa les yeux vers son ventre. Une large tâche rougeâtre commençait à s'épancher depuis son abdomen. Sa vue se troublait, tandis que son corps se tendait. Arnaud se pencha sur lui.

-Rengoxx, ça va ?

Tuer....

-Caporal ? demanda Arnaud, inquiet.

Sang...

-Oh ! Reng...

Rengoxx se releva d'un bond, une lueur folle dans les yeux. Arnaud connaissait cette lueur. Le caporal était connu pour ses pertes de contrôle lors des combats les plus intenses. Arnaud observa mieux son caporal et ami, et ses yeux se emplir d'horreur. Rengoxx avait été sérieusement blessé. Sa patte avant droite pendait mollement, déchiquetée, et le poney se tenait en équilibre sur ses trois autres pattes. Mais pire encore, du sang s'écoulait en cascade de son abdomen, à présent qu'il était debout. Mais Rengoxx ne semblait pas s'en soucier. Son regard croisa celui du sniper. La licorne pouvait lire dans les yeux de son caporal l'état de rage dans lequel il était. Et aussi que le poney était conscient d'une chose : la blessure était trop grave.

En était-il vraiment conscient d'ailleurs, ou avait-il perdu toute sa capacité de raisonnement ?

Arnaud baissa la tête, tandis que Rengoxx prenait son fusil dans la bouche et galopait vers l'avenue. Le poney se posta sur ses pattes arrières, prit son arme dans sa patte avant valide et commença à tirer sur la place forte, en hurlant des obsénités. Arnaud se posta au coin et visa, tirant sur les Solaires dont les têtes dépassaient des sacs de sable. Les tirs provenant de leur position redoublèrent, et Arnaud se remit à couvert. Il regarda Rengoxx, dont le corps accusait les impacts de balles qu'il recevait, reculant tandis que des jets de liquide rouge éclataient de tout son corps. Mais le soldat ne semblait pas les sentir, continuant de tirer en hurlant jusqu'à ce qu'il n'ait plus de balle. Enfin, son arme émit les cliquetis caractéristiques, et Rengoxx lâcha son arme. Les tirs ennemis redoublèrent, et le poney s'écroula en arrière. Les Solaires continuèrent de s'acharner sur le corps quelques secondes, avant de stopper leur tir.

Arnaud prit sa respiration, puis se mit doucement en position de tir. Il regarda par sa lunette. Les Solaires attendaient la prochaine vague, et ne l'avaient pas remarqué. Arnaud cligna des yeux. Décontraction. Maitrise de la respiration. Compensation.



Un tir éclata, et un soldat se renversa en arrière, tomba dans l'enceinte des sacs. Immédiatement, les fidèle de l'astre solaire se mirent à faire feu vers l'origine du tir. Sterling Vision regarda le corps jeté à bas des barricades, puis l'enjamba. L'un des soldats en position sur le mur protecteur hurla :

-Sniper !

Sterling monta sur les barricade, tête baissé, puis jeta un coup d'oeil vers l'extérieur. Il vit le corps d'un poney qui n'était pas là il y avait quelques minutes. Un sourire satisfait s'afficha sur son visage. Parfait. Ils étaient parfaits. Le radio s'approcha de lui, nerveux.

-Hum, seigneur Vision, le QG insiste sur la retraite vers le château.
-Nous ne nous enfuirons pas ! hurla la licorne brûlée. Nous tiendrons cette position aussi longtemps que Celestia nous le permettra !
-Celestia nous ordonne de battre en retraite, en fait.

Sterling tourna son regard vers l'origine de la voix, mais ne pu pas discerner quel soldat avait commit cet affront.

-Nous ne fuirons pas ! Nous seront une épine plantée dans le sabot de ces traitres, un îlot de résistance dans cette tempête qui s'abat sur cette citée au centre du monde ! Et nous serons ici pour prêter assistance à nos camarades, en détournant l'attention d'une partie des forces ennemies pour...

Il fut interrompu par une rafale tiré par l'un de ses soldats, imité par ses camarades. Puis les tirs s'interrompirent. Sterling demanda :

-L'avez-vous abattu ?
-Négatif, commandant.

Sterling Vision redescendit dans l'enceinte de la place fortifiée. Ils étaient cinq soldats ici, attendant une mort glorieuse pour la survie de l'Empire, pointe d'une percée qui permettrait de briser l'assaut des Traitres. Comme à son habitude, Sterling avait dû passer outre les ordres pour mettre en place cette défense, mais cette technique avait su prouver son efficacité. Même si les détracteurs de la licorne prétendaient qu'elle était coûteuse en soldats de valeur.

Tout à ses réflexions, Sterling vit le chef d'unité se diriger vers lui.

-Seigneur licorne, malgré tout le respect que je vous dois, je me permet de mettre en doute la légitimité de vos ordres.
-Pardon ? tiqua le poney cornu.

Pour toute réponse, le sergent regarda les corps de ses soldats morts. Sur trois corps, deux avaient pour toute blessure un trou dans le front. Le seul qui n'avait pas été abattu par la Licorne du Soleil était celui qui venait de se faire descendre par le sniper. Et tout cela pour quoi ? Seules deux escouades de nuitards étaient passées par là. Toutes les autres étaient déjà au château. Ils ne servaient à rien. Ils attendaient juste de se faire descendre. Soudain, un soldat hurla :

-Tank !

Le sergent monta sur les barricades et regarda dans l'avenue.

-Non, fit une voix derrière lui. Il vient du château.

Le sergent se retourna, pour voir qu'un véhicule blindé se dirigeait effectivement vers eux, venant du front du château. Le blindé tira un coup de feu, qui explosa les barricades, faisant voler deux soldats qui retombèrent lourdement dans l'enceinte. Le sergent se dirigea rapidement vers les corps à terre. L'un d'entre eux bougeait encore, mais il n'y avait plus rien à faire pour l'autre. Le sergent secoua la tête. Bloqués entre un sniper et son escouade, et un char. C'était la mort assurée.

-Seigneur Vision, nous...
-Nous combattrons jusqu'à la mort !

Le sergent se retourna vers la licorne. Il affichait un immense sourire, extrêmement inquiétant. L'impression qu'avait eu le poney lorsque la licorne leur avait demander de mettre en place cette position fortifiée s'était transformée en certitude. Le cornu était complètement fou.

Sterling se tourna vers les soldats sur la barricade, un air inspiré sur le visage.

-Notre sacrifice permettra à nos troupe au château d'affronter un ennemi blindé de moins ! Si nous luttons jusqu'à ce que notre dernier souffle traverse nos lèvres, nous...

Détonation. Sterling cligna plusieurs fois des yeux. Une douleur piquante lui traversa la poitrine. Les sacs devant lui était couvert d'éclaboussures de sang. Il avait du mal à respirer. Il se retourna lentement, pour découvrir le chef d'unité, un pistolet encore fumant au sabot, pointé vers lui.

-Gu... Traitre...

Puis il tomba sur les sacs. Le sergent rangea son arme.

-On se repli vers le château, et vite, si vous avez un quelconque restant d'instinct de survie !

Puis il partit, suivi par la totalité des soldats encore vivants, dans une ruelle transversale. Sterling resta seul, ayant pour seule vision la forme floue du char qui se rapprochait. Le canon tourna pour suivre les soldats, mais ces derniers disparurent de son champ de tir avant qu'il ne puisse faire feu. Cependant, le char continuait d'approcher. Le souffle haletant et la vision trouble, car sa magie était désormais trop faible pour lui permettre de voir clair, Vision tâtonna pour trouver son arme, qu'il ne parvenait pas à trouver. Cependant, la forme du char continuait de grossir de seconde en seconde. Sterling Vision tenta de se redresser en s'appuyant sur les sacs, mais glissa et s'étala à terre. Il leva les yeux, pour voir l'ombre du monstre de métal juste au-dessus de lui.

Il n'eut pas le temps de crier avant que les chenilles du blindé ne l'écrase sous des tonnes d'acier.



Le général Clerical ouvrit la trappe de son char tandis que le pilote finissait de détruire les barricades en roulant dessus. Les obus devaient être gardés pour des choses plus importantes. Il se hissa au-dehors, et vit une escouade Lunaire sortir du couvert d'une ruelle. Le vieux poney leur lança :

-Alors, qu'est-ce que vous faites ici ?
-Désolés, fit un sniper, à en juger par son arme. Mais nous avons eu des contacts sur le trajet.

Le vieux général hocha la tête, puis d'un signe de patte leur fit signe de les suivre.

-Allez, on va être en retard à la fête.

Le char fit un demi-tour sur lui-même, et se remit en route vers le château.

Iron Gear crevait de chaud. L'intérieur du véhicule était très mal aéré, il s'en rendait compte, maintenant. Il faudrait qu'il pense à prévoir ça la prochaine fois qu'il améliorerait ses bébés. Il n'avais pas l'habitude de prévoir le bien-être des passagers du véhicule au-delà de ce qu'on lui demandait, et à présent qu'il partageait leur fardeau, des tas de détails qui lui avaient échappé lui sautaient aux yeux, ainsi que des solutions pour palier.

Qu'est-ce qu'il faisait chaud. Dire qu'avec un circuit d'air en dérivation récupérant l'air extérieur, on pourrait diminuer la température de chausse d'au moins cinq degrés. Sans compter qu'on pourrait récupérer cet air pour le refroidissement du moteur. Mais ça nuirait à l'étanchéité de l'habitacle par rapport à l'extérieur...

Iron Gear secoua la tête, et vit le général reprendre place au-dessus d'eux, et refermer la trappe. Gear grimaça. L'ouverture de la trappe avait permis de refroidir un peu l'endroit quelques temps. Le général consulta ses écrans, puis dit à l'équipage :

-Bon, on a récupéré les retardataires. Ne les distancez pas.
-Reçu, répondit le pilote.

Gear sentait le véhicule se déplacer, mais lui-même n'avait pas de vue sur l'extérieur. Son travail de chargeur ne le mettait en face d'aucune fenêtre ou écran. Ceci étant, il se débrouillait bien. Connaissant son bébé comme sa poche, il était rapide pour charger les munitions, et les moindres petits dysfonctionnements qui étaient apparus avaient été maitrisés en très peu de temps. Ils s'étaient fait prendre pour cible plusieurs fois, et Iron Gear avait entendu avec une certaine anxiété les balles ricocher sur le blindage. Il suffisait d'un coup de chance pour qu'elles touchent un organe sensible et immobilisent le char...

Bon, un gros coup de chance. Mais tout de même. Mais le pire était quand le général repérait des tireurs armés de lance-roquette, ou pire (relativement parlant), des licornes. Dans ces cas-là, c'était à celui qui tirait le plus vite et le plus juste. Et malgré ses récents efforts, la tourelle tournait toujours trop lentement à son goût. La faute à la stabilité de la visée. Pour viser juste, il fallait viser plus lentement. Et les électromagiciens n'avaient pas encore trouvé d'algorithme permettant de mieux compenser l'inertie.

Les joies de la conception. Toujours faire des choix.

Iron Gear n'était pas rassuré au milieu du champ de bataille, mais d'un autre côté, voir ses enfants, ces monstres de métal qu'il connaissait presque unitairement, chacun avec ses propres problèmes, ses propres dysfonctionnements qu'il avait passé de longues heures à réparer, cela lui faisait plaisir. Il voyait le fruit de ses efforts, et se sentait moins inutile.

Mais il y avait l'autre aspect de la guerre. Celui des morts et des amis perdus. Et à chaque explosion, il tendais l'oreille. Il en était venu à reconnaître le son d'un char mit hors de combat. Et le général leur faisait part du déroulement de la bataille, incluant les chars immobilisés, inutiles, voire pire, détruit, avec équipage. Le cœur d'Iron Gear se serrait encore à cette pensée. Quelques heures plus tôt, le général avait annoncé la destruction du char Death Flower, et la mort de son équipage.

C'était le char auquel avait été affectée son amie technicienne Oiled Water. A vrai dire, tout les techniciens de son équipe avaient été affectés à différents chars, en place de chargeur, pour s'assurer du bon fonctionnement des engins. Et à chaque fois que le nom des chars correspondant sonnait à la radio, les muscles du pégase se tendaient.

-On arrive, les enfants, dit le général.

Soudain, les bruits de combat s'intensifièrent, et Iron Gear entendait par dessus les bruits de chenille et le ronronnement du moteur les cris des soldats. Des sifflements suivis d'explosion faisaient se contracter le pégase. Le général remit son casque d'écoute sur ses oreilles, et parla au micro.

-Moon Punishment à Commandement. Nous arrivons sur zone. Quelle est la situation ? À vous.

La voix qui répondit sorti du haut-parleur. Le général ne cachait rien à ses poneys.

-La situation s'est stabilisée. Les Solaires se sont retranchés dans le château même et défendent depuis les différentes ouvertures. Impossible de dépasser les jardins. Nous mettons en place un siège. À vous.
-Un siège ? Platinum, nous ne pouvons pas nous permettre un siège.
-Je sais, Clerical, mais nous ne parvenons vraiment pas à passer. Toutes les L.D.S. nous canardent depuis les fenêtres, Sparkle à mis un champs de force en place pour nous empêcher d'avancer, les Falcons font des raids, bref, c'est la merde.
-Hum...

Il y eut des paroles échangé du côté de l'interlocuteur du général, puis il reprit.

-Platinum Armor à Armée Lunaire. Maintenez un tir de suppression sur les murs du château. Faites saturer le champ de force. Restez alerte. Les nôtres tentent de percer les lignes.

Clerical reprit le micro.

-« Percer » ? Je pensais qu'on ne pouvait pas passer.

Il y eu une manipulation de l'autre côté, et le général Platinum dit, l'air amusé :

-Tu connais un endroit au monde où Stalker ne peut pas aller ?



Night Shine visait l'étrange oiseau qui s'envolait de son nid. Les Falcons diminués faisaient régulièrement des raids au-dehors pour larguer des bombes sur les tanks qui pilonnaient les murs du château. Le bâtiment lui-même n'était pas conçu pour résister à un siège, et rapidement les fenêtres avaient volée en éclat, et les murs étaient constellés d'impacts imposants, traces des tirs de tanks et des armes des licornes lourdes. Cependant, la Licorne Suprême avait mis en place un champ de force empêchant quoi que ce soit de le traverser dans le sens « entrée ». Par contre, il n'empêchait pas les balles de sortir.

On pouvait dire ce qu'on voulait, la miss Sparkle était puissante.

Quoi qu'il en soit, le Falcon se dirigeait rapidement vers les lignes lunaires.

-Quand le poussin quitte le nid...

Il appuya sur la gâchette. Peu après, la tête du pégase fut rejetée en arrière, et le poney ailé tomba en vrille et s'écrasa dans les jardins.

-... Il tombe de l'arbre.

Night Shine sentit une pression sur son épaule, et vit Flesh qui lui fit signe de le suivre. Le pégase suivit son congénère, restant tête baissée pour éviter les tirs qui fusaient depuis la forteresse, et bientôt ils rejoignirent les autres Night-Ops et les Fantômes regroupés. Night Shine regarda les Night-Op et secoua la tête. Stalker, Windvision, Flesh, Drill, Moonface, Storm et lui-même. C'était tout ce qui restait des commandos. Et pourtant, ils ne semblaient pas s'en soucier plus que ça. Ils étaient tous préparés à mourir.

Stalker avait déployé un espèce de plan du château au sol, et montrait des passages qui semblaient situés sous le sol. Il vit Night Shine et Flesh arriver et hocha la tête.

-Bien, comme je le disais, pour faire court, certains des passages souterrains n'ont pas été bouchés, et nous allons emprunter des tunnels pour pénétrer directement le château. Des questions ?
-Euh... fit Night Shine, commandant, vous l'avez eu où, ce plan ?
-Whisper.
-Ah.
-Comme les infos sur les passages non-bouchés.
-Et pourquoi ne pas en avoir parlé à l'état-major ? demanda Black Jack.
-Ils sont au courant, répondit le poney rouge. Mais cette information n'était pas réellement utile jusqu'à présent. Les plans de base du château sont public, et le plan initial consistait en une attaque frontale du château.

Il secoua la tête.

-On n'avait pas prévu le champ de force. Et les passages souterrains ne peuvent pas être empruntés par les blindés.

Il traça une route sur le plan.

-Les Night-Ops, nous allons emprunter les tunnels pour infiltrer le château, désorganiser leurs défenses de l'intérieur et couper le champ de force. Une force réduite sera plus discrète qu'un assaut plus massif. D'autant que les tunnels n'ont pas été empruntés depuis des lustres et sont sûrement oubliés. Black Jack, pendant ce temps, trouve un moyen de faire saturer le champ de force et de créer une voie depuis l'extérieur.

Il regarda les poneys présents.

-On ne peut pas tenir un siège. Il faut que l'on perce les défenses dans les prochaines heures, d'une manière ou d'une autre. Comprit ?

Tous les poneys présents acquiescèrent. Stalker se releva.

-Ramassez vos armes, on y va.

Night Shine remit la sangle de son arme par-dessus sa tête, et les Night-Ops se mirent en route, vers la ville désormais silencieuse. Sur le chemin, le pégase noir rayé aperçu quelques portes entrouvertes, derrière lesquelles des civils regardaient si le cauchemar était fini, et rentraient prestement quand ils voyaient les soldats passer. Night Shine se rapprocha de Rocket Storm.

-Tu trouves pas ça bizarre ?
-De quoi ? demanda l'autre.
-Que Black Jack ait obéi sans proposer que les Fantômes participent à l'infiltration.
-Faut croire qu'il a eu sa dose, répondit son camarade en haussant les épaules.
-Hum...

Stalker les mena auprès d'une bouche d'égout, et ils la soulevèrent, puis descendirent dans les entrailles de la ville. Ils se déplacèrent à la lumière de la corne de Drill, puis s'arrêtèrent devant une portion de mur. Stalker fit un signe de tête, et Flesh donna un puissant coup de sabot dans la zone, qui s'écroula, dévoilant un tunnel envahi par les toiles d'araignées. Stalker prit la tête, et les commandos poursuivirent leur périple souterrain.

Au bout de quelques minutes, ils commencèrent à entendre des grondements sourds au-dessus d'eux. Ils avaient atteint la zone de combat, et la sortie de devait plus être très loin. Les commandos sortirent leurs armes, et continuèrent d'avancer. Mais au bout de quelques mètres, Stalker leur fit signe de s'arrêter, et Drill coupa la lumière. Ils attendirent quelques secondes, puis ils entendirent des bruits de pas derrières eux, et une lumière diffuse à un virage un peu plus loin. Storm et Moonface, qui formaient l'arrière-garde pointèrent leurs armes vers l'origine du son et de la lumière. Puis les intrus s'engagèrent dans le boyau où les Night-Ops attendaient, patiemment, prêt à faire feu au moindre signe d'hostilité. Night Shine ne parvenait pas à identifier les poneys, à cause de la lumière qui les cachaient, mais ce fut Windvision qui calma les esprits.

-Fantômes. C'est Illusion.

Les deux Night-Ops baissèrent leurs armes, et Moonface siffla. Les poneys qui arrivaient stoppèrent net, puis sifflèrent à leur tour. Ils les rejoignirent rapidement, et Stalker passa à l'arrière.

-Je ne vous demande pas ce que vous faites là...
-Jack se disait que tu refuserais pas si on était déjà presque arrivés, dit Mind Illusion.

Stalker les considéra quelques secondes. Il y avait cinq Fantômes pour prêter sabot-fort aux Night-Ops diminués. Finalement, il se détourna et reprit la tête de la formation, cependant Night Shine aurait juré voir l'ombre d'un sourire sur le visage de son commandant. Le soldat reprit sa marche, mais quelqu'un lui toqua à l'épaule. Il se retourna, pour voir Rocket Storm.

-Tu disais quoi, tout à l'heure ?
-Je t'avais bien dit que c'était bizarre.

Soudain, après quelques dizaines de mètres, le commandant stoppa à nouveau la colonne. Au-dehors, les combats faisaient toujours rage, et de la poussière tombait du plafond. Le couloir s'était élargit mais malgré le fait qu'on puisse se déplacer à quatre poneys de front, les infiltrés avançaient toujours par binôme, Drill et Stalker en tête. Les soldats s'accroupirent, et la licorne coupa sa magie. Night Shine vu alors ce qui clochait.

Il y avait de la lumière plus loin. Il ne devait pas y avoir de lumière plus loin. Les commandos pointèrent leurs armes, et commencèrent à marcher, posant un sabot après l'autre, de façon la plus silencieuse possible. Ils n'entendaient pas de sons, hormis les combats qui se déroulaient à l'extérieur, atténués car ils se trouvaient sous l'enceinte du château. Enfin, ils arrivèrent à la source de lumière. Des torches. Et si les torches étaient allumées, cela voulait dire que...

-Commandant, fit Drill. Vous êtes sûr que ce passage est oublié ?

Ils entendirent un raclement devant, après un virage, puis le silence. Les douze soldats visaient la courbure, les muscles tendus, prêts à faire feu sur tout ce qui se présenterait. Les oreilles de Night Shine tiquèrent. Il se gratta, mais la démangeaison continuait. Il tendit l'oreille, et entendit un sourd bourdonnement qui s'amplifiait.

-L.D.S. !
-Retraite ! lança Stalker.

Immédiatement, les commandos reculèrent, au moment précis où trois licornes apparaissaient au tournant, leurs cornes phosphorescentes pointées vers eux. Les infiltrés ouvrirent le feu, mais les licornes ne bronchaient pas, protégées par un bouclier. Puis les tirs d'énergies fusèrent, mais au lieu de frapper les soldats, ils frappaient le plafond. Night Shine regardait en l'air, et vit que les tirs des licornes fissuraient le haut du tunnel.

-Elles font ébouler le passage !
-On sort de là ! Au galop ! hurla le commandant.

Les soldats stoppèrent leurs tirs et tournèrent les ergots, puis foncèrent le plus vite possible. La galerie s'effondrait derrière eux, les rattrapant petit à petit, et la poussière cachait le peu de lumière qui leur restait, et qui s'atténuait au fur et à mesure. On se serait cru dans une aventure de Daring-Do, sauf qu'ici, le destin n'était pas décidé par un auteur soucieux de la survie de son héros. Cependant, bien vite Night Shine se rendit compte que le bruit de chute de pierre se faisait moins intense. Il regarda derrière lui, mais il n'y avait plus une source de lumière.

-Je crois que c'est fini...
-Putain, j'ai cru que toute le tunnel allait s'effondrer...

Night Shine identifia cette voix comme étant celle de Flesh.

-On y voit rien, dit Mind Illusion. Drill, c'est toi la préposée à la lumière, non ?

Silence.

-Drill ? demanda Stalker.
-Elle... elle n'est plus là, dit Windvision.

Il s'écoula quelques secondes dans le noir et le silence, puis une licorne des Fantômes alluma sa corne. Ils se passèrent en revue. Ils étaient tous là. Hormis Polished Drill.

-Elle y est restée ? demanda Flesh.

Stalker resta songeur un petit moment, puis il secoua la tête.

-Je n'ai rien vu. Wind' ?

La ponette regarda au loin dans le noir de la galerie, puis fit « non » de la tête.

-Rien avant les éboulis. Elle est en-dessous.
-Et merde ! fit Flesh. Foutu Whisper et ses conseils à deux bits !
-Sparkle a peut-être observé les plans quand la bataille à tournée. Si c'était moins récent, l'entrée du tunnel aurait été gardée.
-A moins que ne ce soit un piège, fit Windvision.
-Possible.

Le commandant soupira.

-Les souterrains sont bloqués. J'espère que Black Jack va trouver un moyen de détruire ce champ de force...



Black Jack baissa la tête juste à temps, et des projectiles éclatèrent le muret derrière lequel il avait plongé. La licorne secoua la tête. Ce champ était réellement surpuissant. Au train où ça allait, il leur faudrait pas moins de trois jours pour en venir à bout. Et ils n'avaient pas trois jours, ni les munitions pour maintenir un tir soutenu tout ce temps.

Twilight avait vraiment progressé. La pouliche qu'il avait connue lors de ses études en magie était déjà doté d'une puissance phénoménale, mais les évènements de ces dernières années lui avaient donné un boost sans précédent. Devenir l’Élément de la Magie avait dû aider. Son fanatisme et son envie maladive de protéger la Princesse contre tout et n'importe quoi aussi.

Twilight...

Black Jack se donna un coup de sabot dans la tête. Ce n'était pas le moment de laisser le passé intervenir. Il devait se blinder, comme le faisait Stalker. Se concentrer sur un moyen de percer le bouclier. La première solution, le saturer, ne donnerait rien. S'en prendre au lanceur serait une bonne solution, mais cela impliquait de passer ce maudit champ magique. Et Stalker mettait du temps. Trop. Il fallait envisager le fait qu'il ait échoué. Black Jack avait beau réfléchir, il ne trouvait pas de contre-sort qui permettrait de défaire un monument magique de ce niveau. Les faits étaient là : Twilight était devenue trop puissante pour une simple licorne comme lui...

Son esprit s'illumina. Il fouilla dans son équipement, et en sortit le fusil à portail. Peut-être que le vieil Aperture à conçu quelque chose pouvant outrepasser la puissance des licornes, après tout, c'était le but de sa vie, qu'il a donné pour ce but. Il dégagea la sécurité, et poussa l'énergie au maximum. Le nombre de coups serait très limité, mais il ne fallait pas perdre de temps à faire des essais. Il ne manquerait plus que Twilight se doute de ce qui se tramait. Black Jack sortit de son couvert, et tira vers les murs du château. Un rayon orangé fonça vers la lueur violacée du bouclier, et rentra en contact avec celui-ci dans un éclat de lumière. Puis il réapparut de l'autre côté, et une tâche orange ovale se forma sur le mur de château.

Bingo. Maintenant, il fallait faire en sorte de trouver un endroit dépourvu d'ennemi pour ouvrir le portail et infiltrer les Fantômes restants. Mais pour cela, il fallait trouver une fenêtre ouverte, de façon à ouvrir le portail à l'intérieur. C'était risqué. Black Jack se tourna vers Coffee Crime. Celle-ci écoutait sa radio en acquiesçant. Elle releva la tête vers lui.

-Stalker ne peut pas passer. Les L.D.S. bloquent les souterrains.
-Il a essayé un autre passage ?
-Apparemment, il a essayé trois tunnels. Ils sont tous occupés.
-Merde.

Il regarda le château. Toutes les fenêtres ouvertes ou brisées étaient illuminées par les tirs des soldats solaires qui arrosaient en contrebas. Il parcouru toute la façade du regard. Coffee observa son manège quelques instants en silence, puis demanda :

-Tu cherches quoi ?
-Une ouverture sûre pour ouvrir un portail à l'intérieur.

Coffee lui prit le dessous du museau et le pointa vers une petite fenêtre circulaire, presque au sommet de la façade. En se concentrant, Black Jack pu voir qu'elle n'était pas coaxiale avec l'ouverture dans le mur. Elle était entrouverte. Mais la fente était minuscule... Coffee lui toqua l'épaule, et tendit la patte.

-C'est qui la sniper, ici ?

Avec un sourire, Black Jack lui confia le fusil expérimental, et Coffee se mit en position de tir.



Twilight parcouru les couloir en pressant le pas. Sa tête la lançait continuellement, à cause de ces traitres qui pilonnaient son bouclier, mais elle tenait le choc. Heureusement, elle partageait le fardeau du déploiement d'énergie avec trois autres licornes, qui fournissaient leur magie pour maintenir le bouclier. Mais Twilight faisait quand même le gros du boulot.

Cette bataille était un vrai foutoir. Et un concentré de mystères. Comment est-ce que les traitres avaient pu traverser tout l'Empire sans être repérés ? Comment ce groupe était-il entré à l'intérieur des murs ? D'où sortaient ces pégases qui avaient botté les croupes des Falcons de Rainbow ? Sans compter que depuis que l'armée avait pénétré l'enceinte de la ville, alors là, c'était retraite sur retraite. Le colonel Brush était pourtant réputé pour son abnégation et son mépris total envers ses subordonnés pour s'assurer la victoire. Twilight avait été surprise de le voir arriver aux portes du château, blessé, avec sur ses talons des soldats ouvrant le feu sur des partisans de la lune qui s'approchaient très vite.

Mais l'autre avantage de Brush, c'est qu'il ne reculait que pour être sûr d'avoir un mur derrière lui pour se propulser en avant. En se retranchant derrière les murs du château, les fidèles de Celestia avaient moins de mal à tenir leurs position qu'en plein milieu de la ville. Tant pis pour Canterlot, s'ils parvenaient à résister le temps que des renforts arrivent, la capitale ne serait pas perdue longtemps.

Enfin, il avait quand même fallu que la licorne déploie sont bouclier. Maintenant, elle comprenait les migraines de son frère quand celui-ci avait protégé la cité contre les Changelings.

Ah, Shining... Cet imbécile et sa lâche d'épouse s'étaient réfugiés chez les zèbres plutôt que d'aider leur famille à anéantir les traitres à leur pays. Twilight se demanda s'ils reviendraient après la fin de la guerre. Et comment les accueillerait-elle ? Cadence serait sûrement en charge de la nuit, après la mort de Luna, à condition qu'elle prête une allégeance sans faille à la Princesse. Quand à Shining, peut-être lui rendrait-on sa charge de capitaine de la garde. Après tout, la famille, c'était tout ce qui lui restait après que ses amies l'aient lâchement trahie. Sauf Rainbow Dash, et encore, Twilight la soupçonnait de ne pas y mettre du cœur. Mais au moins, elle était loyale.

Rainbow, Shining et Celestia. C'était tout ce qui lui restait. Car oui, ses parents étaient morts il y avait un moment déjà.

Twilight pénétra un long couloir, et marcha tranquillement. Elle repensa au rapport qu'on venait de lui faire parvenir. Comme elle l'avait prévu, des unités infiltrées avaient tenté de passer par les souterrains. Une chance qu'au moment où le colonel avait ordonné de faire ce dernier carré dans le château, Twilight ait eu l'idée de consulter ces vieilles cartes. Apparemment, ces lâches de Lunaires aimaient les coups par-dessous de la queue, les récents évènements le prouvaient. Et la façon dont elle avait retrouvé les cartes prouvait autre chose : il y avait un espion dans leurs rangs. Ça la faisait rager. Elle avait exécuté personnellement cinq espions potentiels, tous de l'état-major, et les fuites persistaient. Mais qu'est-ce qui reliait toutes ces personnes ? Aucune n'avait même avoué être un espion. Ils avaient juste accès à ces informations, de façon parfaitement légale. C'était comme si l'espion arrivait à leur soutirer ce savoir sans qu'ils ne s'en rendent compte.

On se croirait dans une des parties de cartes de son ancien petit ami de l'école de magie. Comment s'appelait-il, déjà ? Ce type arrivait à lire dans les cartes de ses adversaires juste en les observant et en les écoutant parler.

Et pendant ce temps là, leur propre espion ne donnait même pas signe de vie. Twilight donna un coup de sabot au sol, qui se fissura. La licorne était saturée de magie. Les bruits des combats se faisaient plus forts à mesure qu'elle s'approchait du bout du couloir. Elle avisa une petite fenêtre ronde. Peut-être pourrait-elle jeter un coup d'oeil aux combats, bien que ça ne paraisse pas être fondamentalement intéressant de voir des soldats traitres à leur race tirer contre un mur violet en se faisant descendre.

Tiens, la fenêtre était ouverte...

Soudain, un éclair d'énergie orange passa devant la fenêtre et pénétra le couloir pour frapper contre le mur tout à côté. À l'endroit où le rayon avait frappé, il y avait désormais une grosse tâche orange. Twilight s'approcha de l'étrange phénomène. Qu'est-ce que c'était que...

La tâche s'effaça pour laisser paraître une image des jardins du château, et une petite troupe de soldats en uniforme lunaire. Et juste en face d'elle se tenait une licorne noire à la crinière d'or, tenant un étrange fusil dans son sabot. D'un coup, des souvenirs de l'école de magie remontèrent dans l'esprit de Twilight. L'étalon en face d'elle afficha un air surprit, comme tétanisé.

-Twi... Twilight ?

Son nom lui revint d'un coup lorsqu'elle entendit sa voix. Elle sentit la colère monter dans ses entrailles, et sa corne crépita d'énergie.

-Black Jack...

Quand elle prononça ce nom, la rage se concentra dans sa corne.

-SALE TRAITRE !

Au moment où Twilight relâcha son rayon d'énergie, une ponette rouge sauta sur Black Jack en hurlant. La tâche orange disparu au moment où le rayon atteignait le mur...



Une explosion retentit dans un des niveaux supérieurs du palais et arracha la Princesse Celestia à sa contemplation du champ de bataille. Il y avait tellement de morts. Le jardin était constellé de tâches foncées là où reposaient les poneys baignant dans leur sang. Le bouclier s'illuminait de lueurs violettes là où les projectiles s'écrasaient dessus. Celestia avait cherché longtemps, mais elle n'était pas parvenue à localiser sa sœur. Au lieu de cela, elle ne voyait que des poneys courir, tirer, hurler, tomber et mourir.

Depuis le premier coup de feu, elle n'avait pas cessé de trembler. Elle baissa la tête. Ses pattes flageolaient toujours, et son estomac lui faisait mal. Quoi qu'elle se dise, elle trouvait cela insupportable. Insupportable, car ils étaient trop nombreux. Des deux côtés, c'était une boucherie qui ne trouverait sa solution que d'une manière : la destruction totale d'un des deux camps. Coincés dans le château, les Fidèles ne pouvaient plus reculer, mais continueraient à se battre pour leur princesse jusqu'à la mort. Et en face, les Partisans ne pouvaient plus se permettre de faire un pas en arrière après ce qu'ils avaient sacrifier pour arriver là. Celestia n'ignorait pas que pour la plupart des soldats de sa sœur, rejoindre l'armée lunaire et se rebeller contre la princesse du soleil revenait à abandonner famille, amis et tout ce à quoi on tenait, pour leur assurer un avenir qu'ils pensaient meilleur. Et en face, d'autres soldats se battaient pour leur famille et leur amis, pour un avenir qui leur semblait meilleur.

Au fond, est-ce que Luna et elle-même ne menaient pas un même combat auto-destructeur ? N'y avait-il véritablement aucun moyen d'arrêter cet atroce massacre qui décimait ses enfants ? Toutes ces années, Celestia n'avait jamais désiré qu'une chose : le bien-être de ses sujets.

Et aujourd'hui, en cet instant, ses sujets étaient au plus mal. Elle ne supportait pas de les voir mourir

Il n'y avait qu'un seul moyen d'arrêter cette folie.

Celestia prit une profonde inspiration. Elle vida son esprit. Elle ne voulait pas penser aux répercussions qu'aurait son acte. Il n'y avait qu'un seul effet qui lui importait : l'arrêt des combat et de la mort de tout ces poneys, qui laissaient des proches en deuil derrière eux. La corne de l'alicorne brilla, et la porte-fenêtre s'ouvrit. Celestia se mit à marcher lentement, posant un sabot après l'autre sur le balcon. Enfin, elle arriva à la balustrade. De là, elle dominait le champ de bataille. À sa vue, certains soldats Lunaires stoppèrent leur tirs, et levèrent les yeux vers elle. Petit à petit, le champ de bataille sombra dans le silence, tandis que tous les yeux convergeaient vers la princesse. Celestia ferma les yeux, concentra sa magie dans sa gorge pour prendre la voix traditionnelle de Canterlot, et ouvrit la bouche.

À ce moment, elle entendit un « pop » derrière elle, et se retourna rapidement pour voir Twilight, le poil brûlé, qui s'était téléportée à l'intérieur de la salle.

-Princesse !

Sa corne brilla, et d'une formidable poussée magique, elle tira Celestia à l'intérieur de la salle. Puis, sans dire un mot, elle ferma la porte fenêtre, et sa corne ainsi que les fenêtres continuèrent de briller, comme si elle les bloquait.

-Twilight ! dit la princesse, qu'est-ce que...

La princesse s'interrompit, entendant un sifflement qui gagnait en intensité.

Puis une gigantesque explosion au-dehors, à l'endroit où étaient retranchés les lunaires. Puis d'autres sifflements se firent entendre, suivis par d'autres explosions. Celestia se releva prestement, et regarda par la fenêtre.

Un bombardement pilonnait les lignes lunaires. Mais, à la grande horreur de l'alicorne, certains tirs imprécis retombaient sur les maisons Canterlotiennes. En contrebas, c'était la panique. Twilight tomba à terre, essoufflée.

-Les... renforts...



Nicholaus regardait par ses jumelles, juché au sommet d'une des tours du mur de la ville. À côté de lui s'affairait une équipe de poneys qui prenaient des mesures et donnaient des coordonnées par radio. Par ses jumelles, il voyait les abords du château s'illuminer sous les feux des explosions d'obus. Un sourire satisfait s'afficha sur ses lèvres.

-Monsieur, dit l'un des poneys, nous touchons des bâtiments civils. Nous...
-Et alors ? fit simplement Nicholaus.
-Euh...
-Je prend toute la responsabilité des dégâts collatéraux. Maintenant, continuez le pilonnage, où il n'y aura plus de cours martiale solaire pour nous juger là-dessus.

Le poney hésita, puis se résigna.

-Bien, Monsieur.

Nicholaus baissa ses jumelles, et regarda en contrebas. Son instinct ne s'était pas trompé. Il avait eu raison de défier ses supérieurs et de faire demi-tour vers Canterlot. Tant pis pour ce qu'il adviendrait après. Soit ils perdaient et ça n'avait plus d'importance, soit la licorne à l'appendice brisée devenait un héros salvateur. Nicholaus se voyait bien avec une médaille sur la veste. Non pas qu'il soit très branché reconnaissance. Mais ça ferait un superbe coup de sabot dans le museau tout ceux qui le traitaient de paranoïaque.

Les chars de sa colonne commençaient à franchir les portes de la ville pour se diriger vers les forces ennemies. Nicholaus prit les escalier pour descendre et rejoindre son véhicule. Les canons-mortiers continuaient de pilonner les positions ennemies, mais il y avait fort à parier que ces derniers bougeraient bientôt.

Et Nicholaus serait là, pour les écraser un par un.