- Nanomachin a écrit:
- Enfin rattrapé mon retard.
C'était bien la peine de me taner parce que j'étais en retard tiens
- Citation :
- Sur la forme d'abord, pour commencer par les choses ennuyeuses. Quelques répétitions ici et là, et des phrases ici et là maladroites, mais dans l'ensemble la lecture est fluide. Personnellement, j'ai tendance à préférer quand le narrateur s'en tiens au point de vue du personnage qu'il est en train de suivre (même s'il change plus tard, c'est sans importance), mais il t'arrive de parler de détails sans qu'ils n'apparaissent à la vue de qui que ce soit, comme pour rentrer dans l'histoire d'un lieu ou parler de ce qu'on peut trouver dans son kit de premier secours. ça me choque un peu, mais si c'est ton style, pourquoi pas.
Yep, je sais, j'ai un style un peu bizarre, je suis une idée qui en enchaine une autre, qui enchaine une autre, qui en enchaine une autre...puis je change de ligne d'idée.
Moi même je me l'explique pas. Je suis un mystère
- Citation :
- Comme je te l'ai dis dans ma chatbox, Rarity est mon personnage préféré. Elle fait avancer l'intrigue, elle est au coeur des évènements les plus importants, et elle est partagée par des dilemmes moraux intéressants qui permettent de définir ses priorités et son caractère, même si elle doit beaucoup sacrifier pour cela. Et les personnages comme ça sont toujours très intéressants. Fluttershy et Pinkie sont des personnages tragiques perdus dans un contexte qui ne leur correspond pas. Elles ne trouvent pas vraiment leur place bien qu'elles fassent de leur mieux pour se trouver une identité au sein de la guerre. ça permet de belles retrospectives sur ce qu'elles ont perdu, mais à la fois, ça en fait des personnages passifs, donc intéressants pour l'image mais à l'avenir un peu vague. Et dans ce sens, elles passent donc au second plan de l'histoire.
Les trois personnages me permettent d'aborder la guerre sous un autre angle sue le côté baston qu'on voit avec Dashie. Et si c'est vrai qu'on voit plus Rarity évoluer dans l'Histoire, la vraie, Pinkie et Shy me permettent de montrer un angle plus quotidien du conflit, chacune à leur manière.
Après c'est vrai, elles font moins bouger les choses que la licorne...pour l'instant.
- Citation :
- Applejack est, comme Rarity, active car elle a de toute évidence choisis son bord dans le conflit, mais on l'a très peu vue jusqu'ici, et elle passe un peu au second plan par rapport à Fancy Pants, donc elle est moins intéressante pour l'instant que la licorne. Elle n'a pas l'air particulièrement convaincue par la résistance, c'est juste une fermière spoliée qui veut récupérer ce qu'elle a perdu. Et donc, elle a moins d'intensité dramatique que Rarity, qui mets en jeu ses amitiés et sa famille pour ses idéaux.
Concrétement oui, AJ s'est retrouvée dans la résistance sans rien y comprendre et cherche plus à retrouver Sweet Apple Acres qu'à faire tomber Luna par principe. Mais encore une fois, ça me permet d'évoquer un peu le front italien et de parler des relations dans le camp opposé à celui de l'Impératrice.
- Citation :
- Twilight... prépare sans doute quelque chose, du moins je l'espère. A moins que ce ne soit une dépression. Dans les deux cas, j'attends d'en voir plus pour me prononcer.
Twilight reviendra bientôt. Faut juste que je me décide enfin de ce que je veux lui faire faire ^^
- Citation :
- Rainbow Dash est le deuxième personnage de la fic à mes yeux, bien qu'elle en soit apparemment le personnage principal officiellement. C'est celle qui a sans doute le plus mûrit, apprenant à la dure les réalités de la violence pendant la guerre, et devenant incapable de tirer plaisir des choses qui la passionnaient avant. C'est un revirement classique que j'aime beaucoup, le naïf enthousiasme trébuchant face aux conditions de vie dans ce nouveau monde. ça lui correspond bien, même si ça a l'air de la rendre un peu apathique, comme si elle ne savait plus vraiment où elle allait ni comment. Elle se contente de suivre le mouvement pour l'instant, en introspectant. De fait, encore une fois, Rarity lui est supérieure et est le best pony.
Sans forcément parler de naïveté qui est la première victime de la guerre (platoon ref inside powa) Dashie est dans ma tête plus piégée par son élement de la loyauté qui l'a précipitée dans une guerre auquelle elle n'était pas prête et qu'elle n'approuve pas au fond.
Mais comme elle est rainbow Dash la loyale, elle ne veut pas laisser tomber Equestria, peu en importe le prix.
- Citation :
- Pour ce qui est de l'intrigue, on la voit clairement se dessiner maintenant. Un monarque fou, épaulé de conseillers malhonnêtes, qui va vouloir précipiter le conflit avec des armes terrifiantes pour assouvir ses besoins de gloire, et de l'autre côté, une coalition encore décousue mais appelée à se solidifier de combattants cherchant la fin des hostilités. Le seul point flou est le rôle des CMC dans tout ça, mais elles n'ont probablement pas vraiment besoin d'en avoir un, juste d'être mignonnes et marrantes comme d'habitude.
Luna n'est pas nécéssairement folle. Jusqu'au boutiste, autoritaire, oui mais pas folle. Elle refuse d'envisager quoique ce soit autre que la victoire totale mais c'est avant tout pour venger sa soeur et punir les humains.
- Citation :
- Dans l'ensemble, on sent se dessiner une toile qui donne envie de connaître la suite des évènements, car il est encore difficile de deviner comment les choses vont se dérouler. A suivre, donc ~
Et tu sais le plus beau ? La suite, la voilà !
Assis ou allongés en cercle autour des grands feux, les partisans s'adonnaient à ce qui se rapprochait le plus d'un repas ordinaire.
Alors que les flammes jaunes léchaient le ciel noir, les poneys avaient piqué leur nourriture au bout de grands bâtons et la faisaient griller ou simplement chauffer, selon leur préférence. La plupart n'avaient ni assiette, ni couverts. Ils mangeaient directement au sabot et se partageaient les quelques choppes de bois qu'ils possédaient.
Le cercle où avait pris place Applejack devait se composer d'une dizaine de poneys alors que les autres brasiers eux, en comptaient largement une trentaine, sinon plus. Elle se sentait un peu gênée d'être auprès des chefs de la résistance, persuadée qu'elle serait plus à sa place avec des poneys plus ordinaires mais Fancypants avait personnellement insisté. La licorne, installée à sa droite, grignotait avec appétit un épi de maïs doré, toujours sans se départir de ce flegme qui le caractérisait tant. En revanche, le Prince Blueblood lui, allongé en face de Fancypants semblait plus qu’embarrassé par le manque de style du repas.
Il passait plus son temps à regarder les plats d'un air dégoûté qu'à les manger.
Ce genre de pseudo-barbecue ne dérangeait pas l'ancienne fermière, bien au contraire. Elle avait toujours préféré manger dehors ou pique-niquer dans la nature. Et le fait que tous les repas des résistants se passent ainsi, à partager leur nourriture autour de grands feux, ça lui rappelait un peu la maison.
En réalité, la plupart des repas mangés par les partisans étaient pris sur la muraille, à la va-vite, sans prendre le temps de s'assoir et de digérer tranquillement. La mobilité était essentielle et ils ne pouvait pas se permettre la moindre perte de temps.
Cela dit, de temps en temps, les groupes se rassemblaient autour d'un grand repas comme c'était le cas maintenant, pour retisser un peu le lien social de poney à poney. Après tout, tant qu'ils étaient ensemble dans la montagne, unis dans une même cause, ils étaient leur propre famille.
Avec un soupir amer, Applejack se souvint du dernier repas qu'elle avait partagé avec ses amies.
Avec toutes ses amies avant qu'elles ne se séparent à cause de la guerre. Ca devait être juste après l'enterrement de la Princesse Celestia, quand Rainbow Dash avait été dans les premières à faire un pas en avant et à sortir des rangs quand Luna avait appelé aux volontaires pour constituer le corps expéditionnaire.
Toutes ses amies l'avaient regardée, sans bien comprendre ce qui se passait, sinon que la pégase s'engageait dans quelque chose de terrifiant. Elle serait peut-être blessée, tuée, amputée...il fallait faire quelque chose pour la raisonner.
Elles avaient tenté le coup au diner préféré de Spike, l'établissement où elles avaient terminé la soirée du Grand Galloping Gala à manger des pâtisseries et à boire du chocolat chaud. Elles s'étaient toutes attablées et avaient tenté de parler avec Rainbow Dash. Leur amie était une fille obstinée, elles le savaient bien et elles concevaient parfaitement que pour Dashie, répondre à l'appel de Luna était une question d'honneur. Mais elles préféraient encore voir une Rainbow Dash à la fierté meurtrie mais indemne que l'inverse.
Mais elles s'étaient heurtées à une surprise de taille : non seulement Rainbow n'avait voulu rien entendre mais en plus, Fluttershy, la plus gentille et la plus douce de leur groupe avoua d'une toute petite voix qu'elle irait rejoindre elle aussi le corps expéditionnaire.
On avait cru à une plaisanterie et Pinkie n'avait pu s'arrêter de rire pendant cinq bonnes minutes. Mais la gardienne de l'Element de la Gentillesse avait exposé ses raisons : elle ne souhaitait pas laisser partir Rainbow Dash seule au front et était persuadée qu'elle pourrait aider au mieux ceux qui en auront besoin en allant là bas.
Twilight et Applejack s'étaient entreregardées, terrifiées. Elles avaient demandé de l'aide à Rairty et à Pinkie Pie pour convaincre les deux pégases de revenir sur leur décision mais les deux amies avaient fait face à une nouvelle déconvenue : Rarity avait calmement expliqué qu'elle ne souhaitait pas personnellement se battre mais qu'elle comprenait et qu'elle refusait de juger le choix de ses amies.
Pinkie Pie, elle, avait exprimé sa peine à l'idée que ses amies partent mais qu'elle ferait une grande fête la veille de leur départ.
Et c'était ainsi que leur groupe s'était scindé en trois : Rainbow Dash et Fluttershy qui partaient à la guerre, Twilight et Applejack qui s'opposaient à cette idée de toutes leurs forces et Rarity et Pinkie Pie qui estimaient n'avoir rien à y dire.
Au fil des mois, après le départ des pégases pour le front,la situation s'était glacée entre les ponettes restantes. Surtout entre les filles et Rarity qui se rapprochait doucement de l'Impératrice Luna.
Et puis Pinkie avait disparu et Applejack était entrée en conflit ouvert avec Luna. Cela avait été le coup de grâce contre un groupe déjà très affaibli.
Depuis qu'elle se terrait dans les montagnes, Applejack priait l'âme de la Princesse Celestia de faire en sorte que les pégases survivent au front et qu'elles puissent toutes se retrouver en paix à Ponyville, comme avant.
L'ancienne fermière n'avait pas de doute que la force de leur amitié leur permettrait de surmonter ce malaise qui s'était installé entre elles depuis trente mois. Elle s'accrochait à ce rêve et était persuadée qu'un jour, tout rentrerait dans l'ordre.
Après tout, comme le disait si bien Granny, peu importe la force de l'hiver, un pommier finit toujours par fleurir. Et aussi loin qu'Applejack se souvienne, il n'y avait pas une fois où un dicton de sa grand-mère se soit trompé. Plus qu'à espérer que ça marchait aussi métaphoriquement.
_Ca suffit, déclara sèchement une voix désagréable qu'Applejack identifia sans peine à celle de Blueblood. Je refuse de manger de cette...de cette...
_De cette aubergine, précisa un des poneys, venant au secours du Prince.
_Quel nom laid. Et indigne de ma bouche royale.
_Sans vouloir vous vexer Prince, dit Fancypants en éloignant l'épi de maïs de sa bouche, je crains que si vous ne cherchiez qu'à manger des mets de la cour, vous risquez de faire le plus drastique des régimes. La situation particulière où nous nous trouvons exige quelques sacrifices.
_J'veux bien votre aubergine si vous en v'lez pas ! s'exclama Applejack, qui en tant qu'agricultrice, avait toujours du mal à voir les poneys dédaigner les produits de la terre.
_Si ça vous fait plaisir, commenta Blueblood d'un air dégoûté en faisant passer le légume intact jusqu'à Applejack qui le partagea avec les autres poneys qui en voulaient.
_Sire, demanda Fancypants après avoir fini son épi et s'être tamponné les lèvres d'un mouchoir de soie blanche, peut-être pourrions nous aborder le sujet dont je vous ai parlé un peu plus tôt.
_Ici ? Autour d'un feu de camp, comme de vulgaires sans-étable-fixe ? Ne vaudrait-il pas mieux se retirer dans ma tente ?
_Et bien je pense que ces étalons et ces ponettes ont assez prouvé leur valeur pour que nous puissions parler devant eux.
Blueblood leva les yeux au ciel, l'air de dire à Fancypants que cette idée était loin de lui faire plaisir mais qu'il était prêt à l'accepter, en lui faisant une faveur.
_Vous n'êtes pas sans ignorer sire, que nous manquons d'équipement. D'armes, de couvertures, de munitions, de médicaments...
Du sabot, il pointa le contenu des rares gamelles et de la nourriture qui grillait .
_Nous manquons de vivres. Nous avons pallié ce problème avec les italiens mais ça ne suffit plus.
_Je ne vois pas en quoi, contesta le Prince en levant un sourcil. Ces humains nous apportent tout ce que nous avons besoin, pour peu qu'ils ont leurs pierres. C'est un accord correct.
_On commence justement à tomber à court de gemmes, intervint un des chefs de groupe. Mes gars essayent de creuser autant qu'ils peuvent mais on a épuisé tous les filons du coin. Bientôt, y aura plus rien.
_Qui plus est, ajouta Fancypants, ça ne règle pas le problème des italiens eux-mêmes, qui en demandent toujours plus à chaque transaction et qui violent le territoire suisse pour venir nous trouver.
_Equestria est enclavée dans la Suisse, cracha dédaigneusement Blueblood comme s'il donnait un cours de géographie à des petits poulains. Les italiens sont obligés de passer par des montagnes helvétiques.
_Pas tout à fait, fit remarquer Fancypants, sans se départir de son habituel sourire poli. Il existe un col qui communique directement entre nos Alpes et celles des italiens. Mais les contrebandiers préfèrent gagner du temps et passent par le plus rapide et le plus facile. C'est là qu'ils traversent une zone neutre.
_On ne peut pas se passer des italiens, dit Blueblood après un temps de réflexion. Et puis s'ils traversent la Suisse, c'est leur problème, pas le nôtre.
_Ca l'sera si les suisses décident d'rejoindre les boches et Luna à cause de ça, fit remarquer Applejack.
_Sans même parler de ça, ajouta Fancypants d'un air sérieux, nous savons tous que ces hommes ne sont pas fiables. Ils finiront par nous attaquer un jour pour nous voler nos gemmes ou profiter de la situation pour faire main basse sur tout Equestria.
_J'ai confiance dans les humains, dit le Prince avec conviction. Quand nous avons essayé de renverser ma tante et que nous avons échoué, qui nous a aidé en nous donnant de quoi nous réchauffer, de quoi nous défendre ? Les italiens. L'Italie est dans l'Entente, Luna dans la Triplice. Et l'ennemi de notre ennemie est notre ami. C'est simple.
_Nous ne devons pas voir l'Entente comme des amis, tout au plus comme des alliés temporaires, rectifia la licorne. Ce sont des poneys qui doivent chasser Luna du trône et sortir la nation de ce chaos. Les humains ne nous ont apporté que des problèmes. Arrêtons les frais.
_Et que proposez-vous exactement Fancypants ? demanda le chef autoproclamé d'une voix cassante. Que nous descendions prendre Canterlot à la force de nos sabots ?
_Pas Canterlot, dit un des poneys. Mais il y a des dizaines de postes de garde en bas, au pied de la montagne. Une attaque éclair nous ravitaillerait. Ils sont gardés par une poignée de soldats. Ca serait vite fait. Et en plus, ça regonflerait de moral de tout le monde ici.
_Pour qu'après, tous les soldats de l'Impératrice nous donnent la chasse dans la montagne ?
_Ils savent d'jà où on est, dit Applejack en mâchant un bout de pain un peu rassis, autant leur envoyer un message clair.
_Non.
_Mais...
_NON ! répéta Blueblood, plus fort. Jusqu'à nouvel ordre, je suis encore le chef de cette armée de résistance. Et j'ai du sang royal. Voici ma décision : personne n'ira dans la vallée. Nous allons trouver un nouveau filon et acheter plus d'armes aux italiens en les priant de prendre le bon col. Vous tous ici, vous avez juré de me suivre et de m'obéir. Alors obéissez.
Applejack étouffa ses critiques, regrettant que l'Histoire ait choisi de confier une idée si novatrice à l'époque, s'opposer à la guerre et à Luna, à un idiot comme le Prince Blueblood. C'était sans doute le sentiment que se partageaient l'ensemble des partisans.
Mais si elle en jugeait le discret coup d’œil que venait de lui adresser Fancypants, tout espoir n'était pas encore perdu.
Elle en eu la confirmation quand la licorne vint la réveiller quelques heures plus tard, en la poussant gentiment du museau.
Applejack grommela en s'extirpant de sa couverture et passa sa patte sur ses yeux ensommeillés.
Fancypants posa un sabot sur sa bouche et lui fit signe de le suivre silencieusement, hors du haut plateau où elle avait posé sa couverture avec une dizaines d'autres poneys. Applejack s'exécuta et quelques minutes plus tard, se retrouva à l'écart du camp avec le chef occulte des partisans.
La licorne désigna d'un mouvement la tête la vallée qui s'étendait en contrebas et les points lumineux que l'on distinguait facilement, même à grande distance. Les châlets des gardes frontières.
_Tout ce dont nous avons besoin est juste là mademoiselle Applejack, murmura pensivement Fancypants. Plutôt rageant que nous ne puissions pas y aller n'est-ce pas ?
_On peut t'jours y aller, contesta Applejack. Ils avaient raison tout à l'heure, une attaque éclair et on s'rait de retour dans les montagnes avec de quoi nourrir et équiper tout l'monde. Mais vous étiez pas contre ce plan, vous d'jà ?
La licorne eut un petit rire.
_Disons que l'idée a fini par faire son chemin. Il n'y a que les imbéciles qui ne changent pas de fer aux pattes vous savez. Si nous nous débrouillons pour isoler un des postes de garde, nous pourrions le vider avant que le reste des soldats de l'Impératrice ne puisse venir jouer les trouble-fêtes.
_Blueblood v'dra jamais.
_Ce que le Prince ignore ne peut pas lui faire de mal mademoiselle Applejack. Est-ce que nous nous comprenons ?
_J'crois que oui, lâcha l'ancienne fermière après un temps de réflexion. J'suis juste pas très à l'aise à l'idée de descendre là bas en désobéissant aux ordres du chef.
_Qui vous parle de désobéir ? demanda Fancypants avec une intonation si convaincante qu'Applejack aurait été prête à lui donner un rôle dans une pièce de la Veillée Chaleureuse. Nous ne faisons que discuter, nous partageons nos avis...
La licorne faisant quelques pas, comme pour se dégourdir les pattes et arriva à proximité d'un gros rocher.
_Nous parlons du fait qu'il serait amusant de regarder sous cette roche et d'y découvrir l'équipement nécessaire à une petite équipe de poneys pour prendre d'assaut un de ces châlets en pleine nuit. Dans une nuit noire comme celle-ci. Du fait que trois poneys motivés pourraient avoir tous l'envie de se dégourdir les pattes hors du camp à cet instant précis.
Incrédule, Applejack vit trois poneys terrestres à la robe sombre surgir de l'ombre et entourer le rocher.
_Et toujours au conditionnel, que cette petite équipe de poney n'aurait plus besoin que d'une chef de groupe, quelqu'un habitué aux travaux d'efforts, une championne de rodéo par exemple, dit-il en posant ses yeux sur Applejack, toujours avec ce même flegme dans la voix. Du fait que les gardes postés en éclaireur cette nuit sauraient qu'un commando devrait rapporter de quoi manger et se défendre...nous ne faisons que parler d'hypothèses mademoiselle Applejack. Juste d'hypothèses.
Il étouffa un bâillement.
_Et maintenant si vous voulez m'excuser, je vais devoir me retirer. Il s'avère que je dois passer la nuit auprès du Prince à établir un inventaire de dernière minute. Dommage pour lui qui comptait personnellement surveiller les allées et les venues du camp ce soir. Je suppose que ça sera pour une autre fois.
Puis, sans ajouter un mot, il s'en alla silencieusement après avoir essuyé son monocle. Restée seule avec les poneys, Applejack ne put s'empêcher de sourire alors qu'on lui apportait un minimum d'équipement et que les trois terrestres se plaçaient en triangle devant elle.
Pour une fille de la campagne comme elle, elle avait du mal à l'avouer mais il y avait vraiment des fois où elle admirait le style de certaines licornes canterlotiennes.
Quand tout ça serait fini, se promit-elle, elle lui offrirait quelques pots de confiture zap.
Il l'aurait bien mérité.
Plus bas dans la vallée, dans le corps de garde, les soldats malgré l'heure avancée, ne dormaient pas. Fire Beard avait décidé de monter la garde au dehors, tant pour effectivement surveiller les alentours que pour guetter Agile qui commençait à accuser quelques jours de retard. Le pégase ne s'était toujours pas montré et l’inquiétude grandissait dans le châlet. Certes, Agile ne volait plus aussi rapidement qu'avant qu'un obus d'un cuirassé britannique ne rase le bâtiment où il se trouvait à Gallipoli mais tout de même, mettre autant de temps, ça en devenait inquiétant.
S'il ne se montrait pas avant l'aube, Fire Beard se servirait du télégraphe pour avertir leurs supérieurs, tant pis.
A l'intérieur, l'ambiance était moins morose, due à la présence forcée des trois pouliches qui avaient égayée le quotidien paisible des soldats mutilés.
Elles semblaient trouver en Spark Impulse une sorte de figure paternelle, que ce dernier ne faisait rien pour briser et elles passaient leur temps à essayer de convaincre Banana Beam de se joindre à leurs jeux. Le jeune étalon avait d'abord renâclé mais avait fini par céder.
Depuis sa blessure, il s'était habitué à se tenir à l'écart de la population valide, provoquant malgré tout messes basses et regards en coin. De se voir considérer comme un partenaire de jeu ordinaire l'avait assez motivé pour se retrouver à courir avec elles dans les champs entourant le châlet, à jouer à chat ou aux devinettes.
Elles restaient malgré tout leurs prisonnières et ils ne les laissaient jamais sans surveillance. Mais les soldats savaient qu'elles n'étaient que de petites pouliches et ils s’efforçaient de rendre cette situation aussi agréable que possible. Ne serait-ce que pour les faire s'arrêter de se disputer.
Pour l'heure, les Croisées étaient réunies près du grand feu, devant lequel Spark Impulse s'était installé, dans un rocking-chair. Tout en tirant de bouffées régulières de sa pipe en bois et en se balançant au rythme de ses paroles, il leur contait des histoires. Banana lui, restait attablé un peu à l'écart, à écrire quelques lignes dans le journal qu'il tenait depuis Ypres.
C'était à la fois un journal intime, un carnet de notes, de croquis et grosso modo, un fourre-tout pour tout ce qu'il avait dans la tête.
C'était aussi le meilleur moyen qu'il avait de faire passer ses crises. Elles avaient commencé juste après qu'il soit devenu infirme et se traduisaient par une violente migraine, accompagnée d'une irrésistible envie d'envoyer ses sabots dans tout ce qu'il y avait à proximité.
Le docteur qui l'avait examiné avait vaguement expliqué que cela devait provenir de sa blessure à la tête, sans qu'il ne puisse lui fournir un bon moyen de s'en défaire. Banana avait fini par découvrir lui-même que lorsque il sentait le mal de tête pointer, il n'avait qu'à se saisir d'une feuille blanche et d'un crayon avant de laisser son sabot tracer des mots et des dessins tous seuls. La plupart du temps, ça ne voulait rien dire et il n'y comprenait rien mais ça marchait.
Une fois quelques pages noircies, la migraine s'en allait et il n'avait plus envie de taper sur personne. Avec le temps et l'expérience, il s'efforçait de répéter la mécanique tous les soirs, comme pour se vider de ce mal à petites doses. C'était plus prudent de le faire toutes les nuit et de passer le lendemain en paix.
Le poney laissant la mine de carbone tracer des arabesques sur le papier, releva la tête vers les pouliches qui semblaient boire la moindre parole qui sortait de la bouche du vieux poney.
_Et là, articula Spark Impulse avec application pour donner plus d'effet à son histoire, la Princesse Celestia a regardé le poney charmant dans les yeux avant de lui dire "je suis flatée de votre offre mais je ne peux pas l'accepter. Je ne peux quitter mon peuple qui a besoin de moi." Le poney charmant était déçu, bien sûr mais il respecta le vœu de la Princesse. Et il décida de lui faire un cadeau, pour qu'elle ne l'oublie pas.
_Qu'est-ce qu'il a fait, qu'est-ce qu'il a fait ? questionna Sweetie Belle qui ne pouvait plus tenir face au suspense.
_Il a tapissé les cieux de diamants pour la Princesse, répondit le poney bleu. Encore aujourd'hui, on peut les voir.
_C'est stupide, déclara soudainement Scootaloo, après avoir froncé les sourcils. On le saurait s'il y avait des pierres dans le ciel, non ?
_Et les étoiles petite maligne, tu crois qu'elles viennent d'où ? demanda le vieux poney avec un sourire entendu.
Banana qui avait relevé le museau de son carnet, étouffa un irrésistible rire quand il vit les trois bouches des pouliches, grandes ouvertes de stupéfaction, parfaitement de concert.
Puis l'éclair de douleur qui lui vrilla les tempes le poussa à se reconcentrer encore quelques minutes sur son carnet.
_Allez mes petites ponettes, déclara Spark Impulse en se levant avec précaution de son rocking-chair. C'est l'heure d'aller dormir.
_On veut encore des histoires ! se plaignit Applebloom.
_Demain, je vous raconterai l'histoire de la pâtissière folle qui transformait ses amies en cupcakes.
_En cupcakes ? répètent les pouliches, excitées et intriguées.
_Oui, en cupcakes, confirma Spark Impulse en déposant sa pipe sur le rebord de la cheminée. Mais c'est une histoire qui fait peur, le genre qu'on raconte qu'à la Nuit des Cauchemars, ajouta t-il d'un air très sérieux. Et seulement aux grandes.
_On est grandes ! s'emporta Scootaloo, piquée au vif.
_Oh dans ce cas, je suppose que vous l'êtes assez pour aller dormir et pas traîner à essayer de nous demander plus de temps comme des bébés, pas vrai ?
Prises au piège, les Croisées se drapèrent dans leur fierté et donnèrent un petit coup de museau avant de se retirer silencieusement dans la chambre de Banana, qui le leur avait prêtée pendant la durée de leur séjour ici. Aussi parce que c'était la pièce la plus éloignée de la porte d'entrée du châlet et qu'elle était facile à surveiller mais cela, les trois pouliches ne le savaient pas.
Spark Impulse alla fermer à double tour derrière les petites après les avoir mises au lit et revint à la pièce principale, refumer sa pipe. Il se balança quelques minutes d'avant en arrière sur son rocking-chair, tapotant régulièrement le bois de l'accoudoir de son moignon tout en fermant les yeux et en fredonnant à mi-voix quelques paroles de chanson. Une fois qu'on était passé par l'opéra de Las Pegasus, on en gardait toujours quelques choses, même des dizaines et des dizaines d'années après.
Il arrêta et rouvrit les yeux quand il sentit le parfum du café chaud que Banana Beam versait dans trois grosses tasses en fer blanc.
C'était leur tradition, d'accompagner celui qui montait la garde pour la nuit en buvant eux aussi du café. Banana se saisit de la tasse de Fire Beard du bout des sabots, pour ne pas trop se brûler et lui apporta à l'extérieur, talonné par Spark Impulse. Les trois poneys entrechoquèrent leurs tasses comme pour trinquer et burent leur café à petites gorgées. La nuit était noire et on entendait que le vent qui caressait la plaine et les champs.
_Les gamines sont au lit je suppose ? demanda pensivement Fire Beard, toujours en scrutant le ciel.
_Oui, confirma Spark Impulse en s'appuyant contre la barrière. Elles dorment.
_Vous trouvez pas que c'est bizarre ? demanda soudainement Banana. Je veux dire, qu'on se retrouve avec trois pouliches, comme ça, on joue avec la journée, on leur raconte des histoires le soir mais elles sont toujours nos prisonnières ? Faudrait les renvoyer chez elles, non ?
_C'est bizarre, confirma le poney barbu, mais on gère aussi bien qu'on peut le faire. Prenez ça du bon côté, ça nous change un peu du quotidien. Et puis les renvoyer chez elles, je suis moyennement chaud moi. Je continue à croire qu'il y a un truc pas net derrière.
_Fire, contesta Spark Impulse d'un air choqué, c'est de pouliches dont on parle là. Des gamines qui ont même pas encore eu leur cutie mark. On est pas ici pour enfermer des petites.
_On est là pour obéir aux ordres, caporal, le rappela Fire Beard en l’appelant par son grade, ce qu'il ne faisait ordinairement jamais, et les ordres, ils sont simples. Quelqu'un essaye de descendre la montagne dans notre zone ? On repousse. C'est trop gros pour qu'on repousse ? On sonne l'alarme jusqu'à Canterlot. Quelqu'un essaye de grimper dans la montagne ? On l'arrête. C'est ça notre boulot les gars.
_On nous avait jamais prévenus qu'on pourrait se retrouver avec des petites sur les pattes, grommela le vieux poney.
_C'est la guerre grand-père, lâcha cyniquement le poney, il se passe un tas de trucs qu'on avait pas prévu. J'avais pas prévu de laisser ma poitrine se faire démonter par le chlore des anglais, Banana avait pas prévu de se faire arracher la tête par les belges, ni toi de laisser ta patte au combat. Pareil pour les ailes d'Agile.
_D'ailleurs, il est en retard, fit remarquer le jeune étalon.
_Merci, j'avais pas remarqué, cracha ironiquement Fire Beard en noyant son amertume dans son café. Quoiqu'il en soit, dit-il en reprenant le fil de ses pensées, on fait avec ce qu'on a et si ça veut dire héberger les gamines, on héberge. De toute façon, Agile finira par se pointer avec des instructions précises des chefs. On saura quoi faire à ce moment-là.
_Et s'il se ramène pas ? supposa Banana d'une voix anxieuse. Genre pas du tout ? On fait quoi des petites alors ? demanda t-il en désignant le châlet du sabot.
Fire Beard laissa filer un blanc, qui ne fut brisé que lorsque il but son café jusqu'à la dernière goutte.
_Dans ce cas là messieurs, déclara t-il en se léchant les lèvres pour apprécier le goût du café, on improvisera. On improvisera.
A l'intérieur du châlet, dans la chambre de Banana Beam, les trois pouliches n'étaient pas aussi endormies que leurs geôliers pouvaient le penser.
Si Sweetie Belle et Scootaloo étaient bien au lit, Applebloom faisait les cent pas en tournant en rond dans la petite pièce. Elle tripotait nerveusement son nœud du bout de la corne de ses sabots en marmonnant des paroles incompréhensibles ou l'on entendait parfois filtrer le mot "évasion" et "s'échapper".
_Et tu peux me dire comment tu comptes t'échapper ? s'emporta Scootaloo qui n'en pouvait plus de voir son amie répéter les mêmes gestes depuis plus d'un quart d'heure. Ils nous surveillent et la porte est fermée, je te signale.
_On peut essayer de l'ouvrir, contesta la petite pouliche.
_On a déjà essayé, ça a pas marché, intervint Sweetie Belle, se tassant contre le grand édredon qu'elles se partageaient.
_Faut dire que d'essayer de crocheter avec une fourchette...pouffa Scootaloo en pointant du sabot l'ustensile subtilisé plus tôt dans la journée et qui reposait maintenant, inutile et tordu, sur le planches du sol.
_Mare Bond y arrive bien elle, rétorqua la petite licorne.
_Ouais parce que c'est quelqu'un qui existe pas je te signale, souligna Scootaloo. A ce niveau là, on peut aussi espérer creuser un tunnel dans le sol à la petite cuillère comme Daring Do.
_On peut faire ça ? s'exclama Sweetie Belle, devenant soudainement enthousiaste. Ca pourrait marcher. Il nous faut juste aller dans la cuisine et...
_T'as reçu des cours de logique de la part de Pinkie Pie récemment ? demanda Scootaloo en s'écrasant le sabot contre le visage. Non ! s'exclama t-elle en sentant que son amie allait ouvrir la bouche pour répliquer. T'as pas à répondre.
_Les filles, intervint Applebloom, ça vous dérangerait d'arrêter ça et de m'aider à trouver un moyen de sortir ? Plus on attend, plus ça va être dur de retrouver ma grande soeur.
_On va la retrouver, lui assura Sweetie Belle d'un air confiant. On a décidé de t'accompagner jusque là, c'est pas pour te lâcher maintenant. Mais on peut rien faire tant qu'on est prisonnières ici.
_Crocheter ça marche pas, creuser le sol, on y arrivera pas, ils sous surveillent de trop près pour qu'on puisse s'enfuir dans la journée...énuméra Scootaloo en plissant le front. Pourtant doit bien y avoir un moyen de s'enfuir.
_Et avec le feu ? proposa la petite licorne. On est dans un châlet en bois. Et le bois, ça brûle.
_Comment est-ce que tu veux faire du feu ici ? contesta Scootaloo. On a pas Spike à côté de nous je te ferais dire.
_Quand moi et Applejack on faisait du camping, intervint Applebloom, on allumait les bûches en frottant un bâton dessus jusqu'à ce que ça chauffe. On pourrait essayer ici.
_Mais on a pas de bâton, protesta Sweetie Belle. Et les planches de la chambre sont trop solides pour qu'on les arrache.
_On a pas de bâton, c'est vrai, avoua Scootaloo mais on à autre chose, dit-elle en portant à nouveau les yeux sur la fourchette brisée.
_Tu crois que ça peut marcher ?
_Y a qu'un moyen de le savoir, répondit laconiquement la petite pégase quittant le lit et en s'approchant de l'ustensile en arborant un petit sourire. C'est de tenter le coup.
Si un quatrième poney s'était retrouvé sur le perron, à siroter une tasse de café brûlante avec les soldats et qu'il avait pensé à scruter plus attentivement les champs qui entouraient le châlet, il aurait peut-être aperçu l'extrémité d'un stetson qui pointait entre deux fleurs sauvages ainsi que la paire d'yeux verts qui appartenaient à la tête qui le portait. Mais il faisait nuit et le cuir brun du chapeau se perdait dans l'obscurité. Le bord du chapeau par ailleurs, ne resta que quelques secondes visible avant de disparaître entre deux pensées jaunes et noires.
Applejack revint en rampant jusqu'au groupe de trois poneys qu'elle avait laissé derrière elle quelques minutes plus tôt.
_J'en ai compté trois devant, rapporta l'ancienne fermière, mais j'sais pas si y en a pas d'autres à l'intérieur.
_On est quatre, fit remarquer un des membres du petit groupe. C'est jouable.
_Doucement, le tempéra un de ses compagnons, déjà tu l'as entendue, y en peut-être d'autres dedans. On est là pour piquer leur matériel, je te rappelle, pas pour tuer tout le monde.
_Je sais bien, répondit le premier poney en faisant la moue, c'est juste que j'aurais pas été contre m'essuyer un peu les sabots sur leur visage.
Applejack n'aurait pas été opposée à cette idée elle-même. Mais ils devaient penser à leurs camarades là haut, dans la montagne. Ils avaient besoin d'équipement, pas d'un bain de sang. Elle saurait ravaler sa colère contre Luna et ses soldats...pour l'instant du moins.
_J'vais faire le tour voir si y a une porte de derrière, expliqua l'ex cowgirl et je vais trouver un moyen d'nous faire entrer. Vous, restez là pour l'moment. Si y a un ver dans la pomme, vous me prév'nez en imitant le hibou, vu ?
Sans attendre leur réponse, Applejack s'empara d'une corde, la coinça entre ses dents et repartit en rampant dans l'herbe folle. Les trois partisans s'entreregardèrent avant que l'un deux ne brise le silence.
_Ôtez moi d'un doute...y en a un de vous qui sait faire le cri du hibou ?
Réponse négative de ses deux compagnons.
_Bon, lâcha le premier poney après un temps de réflexion, y a plus qu'à espérer que tout se passe bien alors.
Moins de cinq minutes plus tard, comme une réponse ironique à son souhait, ils virent la silhouette ailée d'un pégase se détacher sur le ciel étoilé et voleter avec difficultés jusqu'au perron. Les poneys s'entreregardèrent une nouvelle fois.
_Bon très bien, je vais le faire, finit par dire l'un des trois en grommelant. Mais je jure sur la tombe de Celestia que le premier qui se foutra de moi aura droit à mon sabot sur le museau.
_C'est pas notre genre, répondirent ses compagnons en tenant de prendre l'air le plus sérieux au monde, tu nous connais.
_Justement...marmonna le poney avant de porter ses pattes en porte-voix et de prendre une grande goulée d'air.
Les deux autres poneys se tenaient déjà les côtes d'avance. Ils faudraient qu'ils pensent à remercier monsieur Fancypants s'ils se sortaient vivants des minutes qui suivraient.
On avait pas toujours l'occasion de rire autant dans la résistance.
Malgré son œil unique, ce fut Banana Beam qui fut le premier à repérer Agile qui venait vers eux. Le pégase peina pour arriver jusqu'au perron où il fut accueilli à la fois par des soupirs de soulagement et de reproches.
_Qu'est-ce qui t'as pris aussi longtemps ? lui demanda vertement Fire Beard après l'avoir briévement enserré dans ses pattes. On se faisait un sang d'encre nous.
_Désolé les gars, s'excusa Agile en pointant ses ailes du sabot, les petites marchent assez mal en ce moment. Je me suis bousillé quelque chose en arrivant au quartier général et j'ai dû prendre du repos forcé. Et puis c'est pas à côté non plus. Enfin bref, conclut-il en tirant une note du petit sac qu'il avait attaché sur le flanc, voilà les ordres des chefs.
Spark Impulse s'en empara et la lut à mi-voix alors que Banana retournait à l'intérieur chercher une nouvelle tasse de café pour le nouvel arrivant. Non loin, un animal cria.
_QUOI ? s'exclama la vieux poney, s'étranglant de stupéfaction. Ils veulent qu'on fasse quoi ?
_Y a quoi de marqué ? demanda Fire Beard.
_Ils veulent qu'on tue les gamines.
_PARDON ? questionna Banana qui passait la porte, la cafetière fumante au sabot.
_"Selon l'annexe, chapitre deuxième de la Seconde Convention de la Haye de 1907, concernant le traitement des prisonniers de guerre, gnagnagna, sont considérés comme des combattants d'après l'article premier, chapitre un de cette même annexe, blablabla..."
_On a signé quelque chose nous ? demanda Fire Beard en fronçant les sourcils.
_Pas nous directement, dit Agile en prenant sa tasse de café mais les allemands oui. L'Impératrice et Guillaume II ont passé une sorte d'accord qui fait que ça s'applique à Equestria par rebond. Enfin, je crois. En fait, j'ai rien compris.
_"Eut égard", poursuivit Spark Impulse sans s'arrêter, "que les ponettes capturées ne portaient aucun signe distinctif permettant de les identifier comme combattantes..."
_Heureusement, intervint Banana, c'est des gamines, pas des soldats !
_"...elles ne sont donc pas considérées comme prisonnières de guerre et perdent de fait, tous les droits accordés à ces derniers. Techniquement, elles doivent être considérées comme francs-tireurs, des espionnes et des terroristes. Vous prendrez donc les mesures qui s'imposent pour liquider cette menace. Au nom de Sa Majesté Impériale, recevez les félicitations de votre Etat-Major pour continuer à protéger aussi bien les frontières de notre Empire, blablabla."
Spark Impulse chiffonna la lettre et la jeta droit devant lui de rage :
_Ils sont complètement malades là haut ou quoi ? Depuis quand on colle au mur des petites ?
_Là où y ont pas tort, fit remarquer Fire Beard en se grattant la barbe, c'est qu'on a aucune idée d'où sortent les pouliches. Elles pourraient...
_Oui, lui lança sèchement Banana, tu viens de le dire toi-même "pouliches". Je me moque de savoir si elles se sont juste paumées ou si c'est l'arme secrète de l'Entente pour nous distraire pendant qu'ils font des guirlandes à Canterlot avec les tripes de Luna ! C'est des gamines...le premier qui touche à un poil de leur crinière, je le tue personnellement.
_Je suis avec Banana sur ce coup là, grommela Spark Impulse. J'ai signé pour servir mon pays mais pas pour fusiller des pouliches.
_Est-ce que "obéir aux ordres", ça vous dit quelque chose les mecs ? s'emporta Fire Beard. Si on obéit pas à un ordre écrit de la hiérarchie, c'est nous qu'on pourrait mettre au mur.
_J'm'en fous, dit Spark Impulse en haussant les épaules.
_Pareil que grand-père, lâcha Banana.
_Hey, vous pensez un peu aux autres dans tout ça ? intervint Agile. Pareil que vous, j'ai pas des masses envie de faire ce qu'il y a marqué là mais va falloir le faire.
_Nom de Celestia, s'emporta Spark Impulse, tu vas pas me dire que t'as pris goût au sang chez les turcs ? Ni toi Fire que les gaz t'ont fondu le cerveau avec les poumons ? On a tous vu des poulains de l'âge de Banana tomber comme des mouches partout où on était et on a tous payé assez cher notre participation à la guerre. Alors oui, si les italiens, les français, les anglais, les japonais, ce que vous voulez essaye de passer les Alpes sous notre museau je les renvoie personnellement de l'autre côté à coup de sabot dans l'arrière-train, oui, si les partisans essayent de nous attaquer, je leur fais comprendre que c'est pas parce qu'il me manque un sabot que je peux pas casser quelques têtes mais jamais, vous m'entendez, jamais, je ne ferais de mal à une pouliche. Et à trois encore moins.
_Vous voulez qu'on fasse quoi ? demanda un Agile exaspéré. Qu'on les laisse s'enfuir ? On nous tuera à la seconde où les chefs l'apprendront. Et ils enverront une autre équipe qu'aura pas autant de scrupules.
_Agile a pas tort là dessus, argumenta Fire Beard. On laisse les petites partir, on est fusillés pour avoir désobéi, ils les reprennent et les collent au mur. Tout le monde est perdant.
Les quatre poneys sentirent un mur invisible se dresser lentement entre eux. La tension montait.
_Alors on fait quoi ? demanda abruptement le pégase. On s'entretue pour savoir si on tue les pouliches ? C'est pas un peu complètement con comme idée ?
_Moins que les tuer pour rester en vie, objecta Spark Impulse.
_C'est la guerre, fit remarquer le poney barbu. On fait ça tout le temps.
_Sauf qu'on est ni à Ypres, s'emporta Banana, ni aux Dardanelles, ni en Champagne, ni...
Il tenta un discret coup d’œil à l'attention de Spark Impulse.
_La Marne, lui chuchota ce dernier.
_Merci. Ni sur la Marne ! On est à Equestria par les poils de Celestia ! Personne nous attaque ! Y a personne qui nous tire dessus depuis la montagne, personne qui est caché dans les champs aux alentours, s'exclama t-il en pointant les lieux du sabot, y a rien qui...
Fire Beard écarquilla les yeux.
_Désolé de t'interrompre mais
y a quelque chose dans les champs.
Effectivement, à seulement quelques mètres du perron, les soldats virent un spectacle pour le moins étrange : une tête de poney qui dépassait à peine de quelques centimètres au dessus d'hellébores en poussant des cris qui ressemblaient très vaguement à ceux d'un hibou tandis que les fleurs tout autour semblaient se gondoler de rire. Non, quelqu'un était vraiment en train de mourir de rire dans les champs, juste à côté d'eux !
La tête de poney croisa le regard ahuri des soldats et jura de concert avec les hellébores. Aussitôt, la tête disparut derrière un plan de bruyère, comme si elle venait de plonger dans les champs à l'abri.
_On rentre ! ordonna Fire Beard d'un ton sans appel à ses compagnons.
L'instinct de survie primant sur le conflit qui les opposait, les gardes-frontières se précipitèrent à l'intérieur du châlet. Fire Beard referma la porte avec une grosse cale prévue à cet effet et alla se poster à la fenêtre, tirant du râtelier ses renforts à sabots. Sous la pâleur de la lune, on voyait ondoyer les pensées et les autres fleurs sauvages mais les poneys étaient incapables de dire si c'était le fait de leurs assaillants ou juste le vent.
_Agile, marmonna le poney à la robe verte sans cesser de regarder au dehors, tu crois être capable de voler jusqu'au prochain châlet ?
_Il est qu'à cinq kilomètres à vol d'oiseau, c'est pas la mort, même pour moi.
_Tu peux le faire, oui ou non ? le questionna brutalement Fire Beard.
Agile hocha la tête.
_Bon, répondit son supérieur. Tu vas passer par derrière et sonner l'alarme là bas. Les pégases se relaieront à partir de là.
_Et si c'était rien du tout ? proposa Banana.
_M'en moque. Je prends sur moi si on s'excite pour rien. Qu'est-ce que tu fais encore là toi ? Allez, file ! cracha t-il à l'attention du pégase.
Agile ne se le fit pas dire deux fois et galopa hors de la pièce.
_Spark, ordonna Fire Beard, je veux que tu envoie un télégramme au quartier général. Je sais que ça marche une fois sur mille, je sais qu'il y a plus de chances pour que l'Impératrice Luna elle-même débarque ici en tenue de gala que le message arrive mais fais le. Des fois qu'il arrive quelque chose à Agile, faudrait pas que...
La fin de sa phrase fut perdue dans un bruit de lutte étouffée et de cris provenant du couloir voisin. Tous reconnurent la voix d'Agile.
D'un geste du museau, Fire Beard ordonna à Spark Impulse d'aller identifier le problème. A peine le vieux poney avait-il quitté le salon qu'il y revenait, projeté sur le sol, se tenant la poitrine en grommelant le douleur.
Fire Beard et Banana virent apparaître une ponette orangée avec un chapeau planté sur la tête, une corde passée autour de la taille et surtout, un regard qui n'annonçait rien de bon.
Le poney barbu déglutit avec difficulté, trouvant sa gorge extrêmement sèche. Puis après un bref regard à Banana, il se jeta sur la ponette en hurlant aussi fort que lui permirent ses poumons abimés. Le choc de la ruade qu'il reçut en plein visage l’assomma sur le coup et l'étendit au sol.
Banana Beam recula contre le mur au fur et à mesure que l'assaillante se rapprochait de lui.
_On a rien ici, supplia t-il. Récupérez les pouliches et allez-vous en...
_Les pouliches ? répéta la ponette au chapeau avec un accent incompréhensible.
_Oui...c'est pour elles que vous êtes là, non ? Pour les libérer.
_Elles ressemblent à quoi ?
_Elles sont trois, balbutia Banana Beam. Y a une licorne, une pégase et une terrestre. Elles disent qu'elles s'appellent les...
_Les Croisées de la Cutie Mark ? demanda t-elle, finissant la phrase de l'étalon défiguré.
Puis, voyant que Banana confirmait.
_Où elles sont ? questionna t-elle, bien plus durement.
_Dans ma chambre, dit le poney en tremblant de tous ses membres. Elles sont enfermées mais on leur a pas fait de mal, je vous le jure...
_Passe devant.
Banana Beam dut lutter pour mettre une patte devant l'autre, enjamber Fire Beard qui restait toujours KO et fouiller Spark Impulse qui reprenait lentement sa respiration pour récupérer sa clé. La peur au ventre, il guida la ponette orange jusqu'à sa porte et la déverrouilla avant de la pousser.
A l'intérieur, les trois petites pouliches étaient très occupées à essayer de faire tourner une fourchette brisée sur le sol.
_Elles sont là, exposa t-il en suintant de peur. Vous voyez, elles vont bien, on leur a rien fait.
Les trois petites regardaient la ponette au chapeau avec des yeux remplis d'étoiles de joie, surtout celle qui avait un nœud dans la crinière.
_Z'avez de l'équipement ici ? A manger, des médicaments...
_Nos armes sont sur le râtelier, expliqua le poney jaune et noir. La nourriture et tout le reste, c'est dans le cellier.
_Tu sauras rester gentil le temps que moi et mes amis on reparte avec les p'tites et deux trois trucs ou faudra que j't'assomme comme tes copains ?
_Je vais rester tranquille madame, promit Banana.
_Alors tiens, dit-elle en lui donnant la corde, tu vas m'ficeler tous tes amis ensemble et faire un beau nœud. Les filles, lança t-elle à l'adresse des petites, j'adorerais faire un câlin mais on manque de temps. Vous allez nous donner un coup de sabot pour ce qu'on a à transporter.
Les trois pouliches sautèrent littéralement au plafond ensemble :
_Croisade de déménagement, go !
Applejack sourit. Les Croisées avaient cette étrange capacité de rendre tout mignon et adorable, même les assauts nocturnes sur les postes-frontière.