Bon, fallait bien que je me lance alors voilà ma première fic MLP ! Moi qui étais un vieux routard des fics SW et cie, ça me fait bizarre de développer le monde des poneys.
'fin bon.

Plus concrétement, c'est un UA, donc, un univers alternatif où Equestria se place dans notre réalité, au beau milieu du début du XX° siècle.
J'en dirais pas plus pour pas spoiler mes travaux de recherche et vous gâcher tout le plaisir de la découverte.

On va attaquer gentillement par un très court prologue avant de se plonger véritablement dans le coeur du sujet.

Prologue

Le soleil chauffait la ville de Sarajevo en ce mois de juin.
La foule de badauds, en tenue d'été s'était massée nombreuse pour tenter d'apercevoir l'illustre hôte de la ville, l'archiduc François-Ferdinand, l'héritier de la Double Couronne d'Autriche Hongrie ainsi que son épouse.
Après tout, ce n'était pas tous les jours que la noblesse austro-hongroise quittait Vienne pour se rendre aussi loin au sud, dans les Balkans, presque à la frontière de l'Empire.
Et puis la foule était curieuse de voir le futur empereur, qui, disait-on, serait prêt à donner plus d'importance au peuple serbe une fois assis sur le trône de la Double Monarchie.
Les curieux n'avaient pas été déçus : l'archiduc était apparu dans un magnifique uniforme militaire bleu et son épouse portait un chapeau à plume mauve qui ferait des envieuses pendant longtemps dans les cercles de la bonne société bosniaque.
Mais une surprise de taille attendait la foule venue voir François-Ferdinand : trottant aux côtés de la voiture impériale, les habitants de Sarajevo et ceux qui avaient fait le déplacement, purent découvrir une jument de grande taille, d'une couleur blanche comme la neige, aux puissantes ailes repliées sur le flanc et dotée d'une corne sur le front.
Chez les badauds, on murmura, on détailla et on se pinça. Est-ce que c'était une illusion collective ?
Qu'il y ait des chevaux dans l'escorte de l'archiduc, pourquoi pas mais enfin, un animal aussi étrange ?
Avec des ailes et une corne ? Et une crinière multicolore, qui semblait danser dans les airs alors qu'il n'y avait pas de vent, comme si elle était faite de gaz ?
Soit les yeux de tous les spectateurs leur jouaient un mauvais tour à tous en même temps, soit les garçons de café de la ville avaient eu la main lourde sur la bière ce matin !
Quelques rumeurs traversèrent la foule, se déformant et s'amplifiant au fur et à mesure qu'elle passait d'une personne à l'autre. On disait que c'était un cadeau exceptionnel offert par la ville à l'archiduc ou au contraire, que c'était François Ferdinand lui-même qui venait apporter cet extraordinaire présent au maire de Sarajevo en guise de récompense pour sa fidélité à la Monarchie Danubienne.
L'animal était hors du commun mais après tout, on était au XX° siècle !
La science faisait des pas de géant chaque jour ! Peut-être était-ce une nouvelle espèce de cheval que l'on venait de découvrir à peine ?
Quelques spectateurs, les plus proches du convoi impérial, affirmèrent avoir entendu la jument s'adresser en allemand, au couple archiducal.
On rit franchement. C'était sûrement une gigantesque plaisanterie !
On avait maquillé cette jument pour en faire une licorne ailée et un ingénieux système devait donner l'illusion qu'elle parlait. Tout ça dans le but de jouer un tour à la foule. En son temps, Louis II de Bavière était connu pour ses coups de folie.
Ca ne serait pas la première fois que la noblesse faisait part d'excentricité pour impressionner son peuple.
On rit moins quand on vit une bombe tomber droit sur la voiture impériale, rebondir sur sa capote et atterrir dans le véhicule qui suivait l'archiduc avant d'exploser dans un fracas assourdissant.
Le temps sembla brusquement se figer dans Sarajevo et dans l'Empire tout entier. Une bombe.
Quelqu'un avait lancé une bombe sur l'archiduc !
Mouvements de foule.
Cris, pleurs, hurlements des blessés. Pourtant, une fois la fumée dissipée, on s’aperçut que l'héritier austro-hongrois était sauf et le convoi repris sa route.
Les policiers arrêtèrent un jeune homme qui s'était jeté dans le fleuve juste après l'attentat, sur la base de plusieurs témoignages qui le désignaient comme le lanceur de l'engin explosif.
Pour l'heure, toute la ville oublia la mystérieuse jument.
Près de trois quart d'heure plus tard, après une halte à la mairie, François Ferdinand et sa femme étaient remontés dans leur voiture et le convoi s'était ébranlé vers l'hôpital, le couple souhaitant se rendre au chevet des blessés de l'explosion.
Près du pont Latin, alors que le convoi ralentissait pour permettre au chauffeur de tourner, un jeune homme parvint à ratrapper la voiture, à franchir l'escorte, à pointer son pistolet et à tirer à trois reprises.
Trois coups de feu simples, tirés avec une petite arme de poing.
La première balle atteint l'archiduchesse au ventre, la seconde frappa François Ferdinand au cou et la dernière alla se loger, en rebondissant sur la portière de la voiture, en plein dans le cœur de l'étrange jument.
Les blessés portèrent respectivement mains et pattes à leurs blessures alors qu'on se précipitait pour les aider et que l'on se saisissait du tireur.
On transporta en catastrophe le couple archiducal à la résidence du gouverneur mais c'était peine perdue : François Ferdinand et son épouse succombèrent à leurs blessures quelques minutes plus tard. La mystérieuse jument elle, fut tuée sur le coup.
En cette matinée du 28 juin 1914, à Sarajevo, il ne faudrait pas plus de ces trois coups de feu pour embraser l'Europe et la précipiter dans la plus formidable guerre qu'elle n'avait encore jamais connue.
Au sang versé par l'archiduc et de sa femme, ferait écho celui d'un continent tout entier.
Et par celui de sa souveraine Celestia, tuée par hasard dans l'attentat, la Principauté d'Equestria allait se joindre à la danse macabre du grand suicide européen.

Héhé, déjà que je me trouvais particulièrement salaud d'avoir mis les poneys en spectateurs de nos guerres, tu franchis un pas en les projetant dans la plus grande boucherie organisée de l'histoire humaine !

J'attends la suite bien évidemment.

Sinon, petit conseil, pense aux balises "spoiler" (onglet Autres) autour de tes textes pour faciliter la navigation quand ta fanfic prendra de l'importance. Ah, et pense à aérer, ça coûte rien et ça facilite la lecture !

Merci Coltington, conseils appliqués

J'attends le premier chapitre pour avoir un avis, Trollestia qui claque des le prologue pour éviter d'avoir quelque chose à faire ^^

Sérieux, ça m'a l'air génial.
J'attends la suite avec une put*** d'impatience.

Jona Aps a écrit:

J'attent le premier chapitre pour avoir un avis, Trollestia qui claque des le pologue pour éviter d'avoir quelque chose a faire ^^

C'est pourtant la mort de Cellestia le point de départ de toute la fanfic. Donc, elle sert bien à quelque chose. Ou sa mort, tout du moins

Fitz a écrit:

]Sérieux, ça m'a l'air génial. J'attends la suite avec une put*** d'impatience.

C'est gentil de m'accorder autant de crédit juste d'après le mini prologue ^^
La suite (enfin, le chapitre un) est déjà écrit mais je préfère gratter un peu de pixels avant de vous le livrer. Je veux pas vous habituer à un postage quotidien alors que c'est trèèèèèès loin de mes habitudes (dixit le mec qui en moyenne, passe pas moins d'un an sur ses fics).

J'attend la suite avec impatience. J'écrois moi même une fanfic et j'espére un jours atteindre ton niveaux.

Au passage es-tu sur fanfiction.net ?

Mercury Night a écrit:

J'attend la suite avec impatience. J'écrois moi même une fanfic et j'espére un jours atteindre ton niveaux.

Mon niveau, mon niveau, du calme hein, je suis pas le meilleur auteur du monde loin de là. C'est juste qu'en cinq ou six ans de fanfics, on se rode et on finit par atteindre un niveau acceptable. C'est comme tout je pense, au début, on sait à peine alligner trois notes ou gribouiller au crayon de papier.
Avec la pratique, ça va tout de suite mieux

Citation :

Au passage es-tu sur fanfiction.net ?

Eyeup

Mais tout n'y est pas, c'est éclaté entre feufeu, fanfictions.fr et SWU.

Loin au dessus du champ de bataille, je volais. Ou je planais plus exactement : j'avais largement déployé mes ailes après avoir traversé les nuages et depuis de longues minutes, je scrutais le manteau blanc en décrivant de grands et de longs cercles, guettant la moindre activité ennemie.
Il y avait peu de chance qu'il se passe réellement quelque chose aujourd'hui, après tout, nous avions la maîtrise du ciel depuis quelques semaines mais ce n'était pas une raison pour que je ne sois pas attentive.
Ce vol presque stationnaire m’irritait. Si j'avais voulu n'en faire qu'à ma tête, je me serais mise à tourbillonner dans tous les sens, à tester de nouvelles figures, à arracher mon casque de cuir pour sentir à nouveau le vent dans ma crinière arc en ciel.
Mais je ne le pouvais pas. Je devais m'en tenir aux ordres et ils étaient trop importants pour que je gâche tout en me laissant aveugler par mon propre plaisir.
J'ouvris un peu plus largement la bouche, remplissant mes poumons d'un air frais. C'était délicieux.
C'était un des grands privilèges de nous autres, les pégases. Pouvoir respirer un air plus pur que celui auquel les poneys terrestres et les licornes étaient accoutumés. Il fallait d'ailleurs faire attention : respirer trop vite et trop fort devenait dangereux à une certaine hauteur. Quand j'étais à l'école de pilotage avec Gilda et les autres, j'avais vu un pégase qui avait fait l'erreur de vouloir monter le plus haut possible, juste pour nous impressionner.
Il était monté si haut que tous les élèves et les professeurs n'avaient plus vu qu'un petit point de couleur sur le ciel bleu. Puis brusquement, il était tombé à toute vitesse et rattrapé en plein vol par deux des instructeurs. Le pégase s'était tout simplement évanoui à force d'être allé trop haut.
Ivresse des hauteurs.
Bien sûr après cet incident, tous les élèves de l'école de pilotage s'étaient lancés dans le concours idiot de celui ou celle qui tiendrait le plus longtemps à la plus haute altitude possible. Des stupidités de gamine.

Je soupirais amèrement. Il était loin ce temps à l'école de pilotage. Comme le reste de ma vie Cloudsdale et à Ponyville d'ailleurs, tout ça semblait comme avalé par la brume. Peut-être que quand la guerre sera finie, je me souviendrais avec précision du goût des tartes aux pommes d'Applejack, du plaisir que l'on avait aux fêtes de Pinkie Pie ou des jolies robes que nous confectionnait Rarity quand nous allions à des soirées. Mais pour l'instant, tout ça n'existait plus vraiment.
Pour le moment, j'avais un combat à mener.
Un bruit, semblable à un bourdonnement d'abeille m'arracha à mes pensées nostalgiques. Je pointai la tête dans la direction du bruit et je le vis : un avion britannique, si j'en jugeais par sa cocarde.
Il surgit d'une trouée de nuages bien en dessous de moi, volant assez rapidement. J'étais à peu près sûre qu'il ne resterait pas longtemps. A en juger par son allure et sa quasi absence d'armement, ce n'était qu'un avion de reconnaissance. Les anglais devaient lui avoir ordonné de survoler nos lignes pour prendre des clichés et les rapporter au quartier général.
J'en étais navrée pour lui mais je ne pouvais pas le laisser faire ça.
Je plongeai jusqu'à un nuage en contrebas, passant la tête à travers la masse gazeuse pour estimer la position de mon ennemi. Il maintenait son cap sans dévier. J'étais prête à parier qu'il ne resterait pas en l'air plus d'une minute de plus nécessaire à sa mission : il allait voler droit jusqu'au dessus de son objectif, plonger, prendre ses photos et revenir le plus vite possible sur son aérodrome.
Il fallait que je frappe maintenant. Pattes en avant, je m'élançai si brusquement que je me surpris moi-même. Je sentis l'air fouetter mon corps et faire battre ma queue. J'adorais toujours autant voler vite. Je vis alors l'avion anglais se rapprocher de moi. Se rapprocher très près de moi.
Emportée par mon élan je pointai mes sabots droit sur ses gouvernes de queue, je serrai les dents, fermai les yeux d'instinct et attendis le choc. Renforcés par leurs protections en métal, mes sabots déchirèrent purement et simplement les gouvernes arrières de l'avion anglais, dans un fracas du tonnerre.
J'entendis un coup de feu et je vis une balle passer non loin de moi. Le pilote avait réussi à sortir son arme de poing et à me tirer dessus alors que je l'attaquais dans le dos ? Il était plutôt bon.
Mais moins que moi.

Je repris de la distance et avec elle, de la vitesse. J’amorçais une courbe et je me cabrai pour revenir frapper mon ennemi sous le ventre, là où il ne pourrait pas m'atteindre.
Le pilote anglais se rendit immédiatement compte de ma manœuvre et piqua du nez pour m'avoir droit devant lui. Alors que nous nous rapprochions l'un de l'autre à grande vitesse, l’absence de tir me confirma qu'il n'avait pas d'autre arme que son revolver. Il m'aurait déjà descendue depuis longtemps sinon.
Au fur et à mesure que je voyais l'hélice et son appareil tout entier devenir de plus en plus grand, je me concentrai pour tenter d'apercevoir le pilote. Quand je le verrai sortir le bras hors du cockpit, il serait temps de décrocher.
Quelques secondes passèrent et plus concentrée que jamais, j'attendais le moment propice. Je devais bien calculer mon coup. Trop tôt et il pourrait m'avoir dans le dos, trop tard et il pourrait me loger une balle dans le crâne si je n'étais pas déchiquetée par les pales de son hélice avant.
Pas encore...pas encore...
Je vis son bras droit sortir du poste de pilotage et me viser. Ca y était presque...
Je le vis armer le chien.
Vraiment presque.
Maintenant !

Je tournai brusquement sur le côté droit, me retrouvant à la gauche de mon adversaire. Surpris, celui-ci n'eut pas le temps de changer son pistolet de main alors que je brisai ses soutiens d'aile. Le côté gauche des ailes du biplan de mon adversaire s'effondra sous son propre poids et l'appareil piqua du nez. Satisfaite, je restai en hauteur alors que l'avion ennemi disparaissait dans les nuages.
Il n'était pas nécessaire d'aller plus loin. Il était hors d'état de remplir sa mission mais pas assez abîmé pour qu'il se crashe immédiatement.
Le pilote britannique devrait pouvoir voleter jusqu'à son aérodrome ou au moins, s'écraser loin du no man's land.
C'était mieux pour lui et pour moi. Je n'aimais pas avoir du sang sur les sabots.
Peut-être paradoxal pour une pégase de l'armée de l'air equestrienne mais j'étais comme ça. J'aimais voler, j'aimais gagner.
Pas tuer.
Je laissais ça aux troupes au sol.
Je continuai mon vol de supériorité aérienne pendant encore deux heures puis je tournai les sabots et rentrai à la base.
C'est avec regret que je laissais l'immense ciel bleu derrière moi pour retrouver le brun de la boue et le vert de la forêt. Je volais encore assez haut pour ne pas me faire tirer dessus par une batterie de DCA un peu trop prompte au carton.
On avait déjà perdu plus d'un pégase comme ça. Je rejoins rapidement nos lignes, dépassais les tranchées et commençais à ralentir au fur et à mesure que je me rapprochais du village où nous avions installé nos quartiers.

L’aérodrome n'était rien de plus qu'un vaste champ de terre battue depuis lequel des avions et des pégases n'arrêtaient pas de décoller et d’atterrir. Je me posais avec douceur en marge du champ. Quelques pilotes, humains ou pégases, me saluèrent alors que je repliai mes ailes et que j'arrachai enfin le casque de cuir qui m'emprisonnais le visage.
Je passais plusieurs fois mon sabot dans ma crinière pour en démêler les nœuds et le ressortis gluant de sueur.
J'aurais pas été contre un bon bain chaud.
Mon aide de camp, un pégase à la robe gris perle vint à ma rencontre pour me débarrasser de mes affaires.
Je lui confiai mon casque et mon harnachement de pilote de guerre, soit le blouson de cuir et les renforts métalliques de mes sabots.
Je gardai toutefois mon écharpe blanche autour du cou, frappée d'un éclair multicolore. Le foulard m'avait été tissé par Rarity au moment de mon départ pour le front et j'évitai de l'enlever le plus possible. Quand je le portais, j'avais un peu l'impression que mes amies étaient avec moi.
_Pas trop dur le vol d'aujourd'hui, lieutenant ? me demanda mon aide de camp.
_Si ça c'était mal passé, je serais pas là pour m'en vanter, lui répliquais-je du tac au tac. Si tu veux bien avoir la gentillesse de laver tout ça et de les porter dans mes quartiers, lui demandais-je en pointant du museau mes affaires, ça serait gentil. Tu me feras aussi préparer une baignoire d'eau chaude.
Mon ordonnance porta son sabot à hauteur de la tempe :
_Ca sera fait mon lieutenant ! Et avant que j'oublie lieutenant, le commandant Koëning veut voir voir au plus tôt.
Je haussais un sourcil :
_Il t'a dit pourquoi ?
_Négatif lieutenant, répondit mon aide de camp en secouant la tête. Juste qu'il demandait votre présence au quartier général sitôt votre vol fini.
Bon. Et bien le bain devrait attendre encore un peu on dirait. Quittant le champ, je me dirigeai donc en premier lieu vers le village qui se trouvait à côté. La bourgade n'était pas très grande, comme la plupart des villages locaux. Une cinquantaine d'habitants devaient y vivre avant-guerre.
Depuis de longs mois, toute cette portion du front était tombée entre nos mains et puisque les tranchées françaises et anglaises nous empêchaient de pousser plus en avant, nous étions condamnés à une guerre de position.
Je trottais devant des maisons vides ou transformées en casernes de fortune. Certaines portaient encore la trace des combats livrés ici-même pour le contrôle de la région.
La mairie était un grand bâtiment de pierre blanche où le commandant Koëning avait naturellement installé le quartier général. Je passais devant les sentinelles de garde, traversais le hall dallé et me retrouvais dans l'arrière-cour ombragée, là où le commandant aimait tenir ses réunions.
Et effectivement, Koëning était regroupé avec ses officiers d'état-major autour d'une table d'extérieur en bois, en train de fumer un gros cigare et de lisser pensivement sa moustache poivre et sel.
Quand on fit discrètement signe au commandant de ma présence, il m'invita à avancer.
_Approchez lieutenant, je vous en prie, approchez !
Je fis quelques pas en direction du groupe mais je me gardais de trop m'avancer : les officiers avaient la désagréable manie de joindre chacune de leurs inspirations d'une bouffée de cigarette et de former au dessus d'eux un nuage malodorant. La fumée était si épaisse au dessus de leurs têtes, en dépit du fait que nous étions au dehors, qu'on ne voyait presque plus l'étandard impérial noir, blanc et rouge.
Voyant mon dépit à faire un pas de plus, Koënig prit sur lui de franchir la courte distance qui nous séparait encore et me tendit la main. Je la touchai de mon sabot droit. Le commandant sourit.
_Je suis content que vous soyez revenue entière de cette mission.
_Ce n'était qu'un vol de routine, rétorquais-je en haussant les épaules.
_Il n'empêche, maintint mon officier supérieur. Wilfried ! cria t-il à l'attention d'un des hommes qui se détacha du groupe pour venir nous rejoindre.
Le nouveau venu était la parfaite caricature de l'officier prussien : grand, mince et effilé avec monocle, fume-cigarette doré et une moustache démesurément longue.
_Wilfried, lança Koënig avec un sourire qui s'élargissait au fur et à mesure qu'il parlait, je voulais te présenter le lieutenant Rainbow Dash.
_Ainsi je vous rencontre enfin, siffla le prussien d'une voix qui me sembla étonnement aiguë. Rainbow Dash, la meilleure pilote de tout Equestria. Vous savez qu'on parle de vos exploits dans tous les salons de Berlin ? A ce qu'on dit, Sa Majesté l'Empereur Guillaume lui-même aurait tenu un pari avec un de ses cousins sur qui de vous ou du capitaine Richthofen est le plus grand as de l'armée impériale ?
_Sauf votre respect colonel, lui répondis-je en déchiffrant son grade, je ne suis pas techniquement dans l'armée impériale. Le corps expéditionnaire equestrien...
_Nous nous comprenons, me coupa l'officier. Je ne vais pas vous retenir plus longtemps lieutenant, j'imagine que vous avez beaucoup à faire. Cela dit, je dois rester encore quelques temps sur cette zone du front. J'espère donc que nous serons encore amenés à nous revoir.
Ne sachant pas quoi répondre, je me contentai d'un hochement de tête alors que le colonel prussien battait en retraite vers le groupe d'officiers, me laissant seule avec le commandant Koënig.
_Vous vouliez me voir en particulier monsieur ?
_Je voulais simplement vous introduire en personne auprès du colonel von Aesch, me répondit-il en mâchouillant son cigare.
Alors c'était tout ? Il m'avait privée du plaisir immédiat d'un bon bain chaud et de me décrasser un peu les ailes juste pour me montrer à son ami ?
Décidément, plus je fréquentais les militaires, moins je les appréciais.
_Permission de me retirer mon commandant ?
_Accordée, lâcha Koënig. Vous pouvez rentrer vous reposer lieutenant. Rompez.
J’acquiesçai, tournai les sabots, traversai le hall à vive allure et déployant mes ailes, décollai au dessus du village en quelques secondes.

Si aller de l'aérodrome au QG m'avait dégourdi les pattes, il était hors de question que je marche jusqu'à nos quartiers, assez éloignés du reste du secteur.
Le corps expéditionnaire equestrien, que les allemands avaient surnommés Die PegasusKorps, le Groupe des Pégases, en raison de la très forte concentration de poneys ailés du bataillon avait pris position dans un grand corps de ferme fortifié, bâti à l'écart du reste des villages du coin.
La ferme et ses dépendances avaient été laissées entièrement à la disposition des poneys qui avaient pu arranger les lieux à leur morphologie.
La bannière d'Equestria, les alicornes blanches et noires tournant autour du soleil et de la lune sur un tapis d'étoiles, flottait fièrement au vent, depuis le sommet du clocher de la ferme.
J’atterris dans la cour en terre battue, provoquant la frayeur d'une famille de poussins qui alla se cacher derrière une haie. Fluttershy, fidèle à ses convictions, n'avait pas pu se résoudre à laisser les animaux de la ferme et des environs sans soins et une bonne partie du corps de ferme était devenu une véritable ménagerie.
Je retrouvais mon amie dans la grange transformée en infirmerie pour poneys où les soldats equestriens blessés venaient reprendre des forces avant de repartir au combat. Fluttershy voletait d'un malade à un autre, leur donnant des médicaments, changeant leurs pansements ou simplement en leur tenant le sabot quelques minutes. Techniquement, étant donné son grade, elle n'avait pas à faire ça elle-même mais Fluttershy avait insisté pour s'occuper personnellement des blessés.
Quand je fis mon entrée dans la grange, Fluttershy arrêta sa discutions avec un autre poney-infirmier pour voler jusqu'à moi.
_Rainbow ? me demanda t-elle de sa toute petite voix habituelle. Tout s'est bien passé là haut ? Tu n'es pas blessée ?
_Ca va, la rassurais-je d'emblée.
_Mais non ça ne va pas ! me contredit-elle alarmée. Regarde ta patte arrière droite !
Surprise, je m'exécutai pour découvrir qu'effectivement, quelques traces de sang séchaient sur mon pelage bleu. J'avais dû m'égratigner en frappant l'avion anglais.
_C'est juste une éraflure Fluttershy, lui dis-je pour la rassurer. En plus je sens rien du tout. Je t'assure que...
_Faut soigner ça tout de suite ! me coupa t-elle brutalement en me trainant presque de force sur le lit le plus proche de nous où je dus m'assoir pendant qu'elle galopait aux quatre coins de la grange afin de trouver le nécessaire pour guérir ma patte.
Je me sentais un peu idiote comme ça, à demi couchée sur un lit de camp impersonnel, la patte arrière droite tendue sur la toile alors que mon amie revenait vers moi, les sabots chargés de chiffons, de bouteilles brunes, de fil et de pansements.
Elle se fit aussi apporter une bassine d'eau claire par un des poneys-infirmier.
Fluttershy colla presque son museau sur mon égratignure alors qu'elle écartait les poils autour de l'éraflure pour mieux la distinguer.
_Ca a l'air d'avoir déjà cicatrisé mais je ne veux prendre aucun risque, marmonna t-elle en saisissant un chiffon et en le trempant dans la bassine avant de l'appliquer sur ma patte. On va nettoyer tout ça et désinfecter.
Je ne retins pas mon soupir de frustration mais je n'ajoutais rien. Fluttershy était parfaite dans son rôle d'infirmière du corps expéditionnaire equestrien.
Elle prenait juste un peu parfois sa tâche trop à cœur. Surtout avec moi.
Cela dit, je pouvais la comprendre. La guerre dans laquelle notre nation s'était lancée plus de deux ans et demi auparavant dépassait tout ce que nous aurions pu imaginer.
Les combats étaient gigantesques et les pertes ne l'étaient pas moins, que ce soit du côté d'Equestria et de la Triplice ou des forces de l'Entente.
Si en août 1914 - j'avais toujours du mal à me faire au calendrier humain -, on avait compté de très nombreux volontaires, surtout auprès des pégases, ils étaient rares ceux qui partaient aujourd'hui la fleur au sabot.
_Et voilà, me dit Fluttershy alors qu'elle finissait tamponner ma blessure avec un coton imbibé d'un liquide rose à l'odeur désagréable avant d'entourer ma patte d'une bande de gaze légère. Garde le pansement au moins jusqu'à demain et tu pourras l'enlever sans problème.
_Et moi qui voulais prendre un bain ? demandais-je brusquement d'un ton sec. Je fais comment maintenant, avec ça autour de la patte ?
_Oh...balbutia Fluttershy. Je suis désolée...je pensais que...enfin que...
_C'est bon, lui dis-je après quelques secondes. Je te faisais marcher ma vieille. Je vais bien réussir à me débrouiller.
_Oh...je...une plaisanterie. Oui. C'était drôle, finit-elle par pouffer.
Un poney qui serait passé à quelques centimètres d'elle aurait à peine pu percevoir son rire mais moi, je le ressentis et partager cette blague avec mon amie me fit du bien. L'humour était d'ailleurs devenu un des meilleurs moyens de tenir le coup sur le front.
_Dis moi Fluttershy, lui demandais-je en quittant le lit de camp et en me dirigeant tranquillement vers la sortie de l'infirmerie. Si tu as ta soirée de libre, on pourrait dîner toutes les deux.
Mon amie parut embarrassée :
_Et bien...c'est à dire que je dois m'occuper des animaux de la ferme et il reste encore des poneys blessés à remettre sur leurs sabots sans compter que...
_Je te demande juste une heure ou deux, la pressais-je. Ca va faire des semaines que j'ai pas pris un vrai repas autour d'une table. Et encore plus longtemps que j'ai pas mangé avec une vraie amie.
_D'accord, finit par lâcher Fluttershy après un long silence. J'arriverais bien à me libérer.
_Super ! conclus-je en quittant la grange. A ce soir donc.
A l'extérieur, un coup de vent un peu plus fort qu'un autre me fit frisonner. Je portais mon regard sur la campagne environnante et continuai à être surprise de voir à quel point le paysage pouvait être beau alors qu'à quelques kilomètres de là, on s'étripait et on pataugeait dans le sang pour des causes dont la complexité dépassait de loin la simplicité de la nature.
Un des soldats du PegasusKorps vint me prévenir qu'une bassine d'eau chaude avait été préparée dans ma chambre. Je hochai silencieusement la tête avant de rejoindre à petits pas les bâtiments des officiers equestriens. J'allais me laver, me prélasser dans l'eau chaude et me détendre. Et tout à l'heure, je dînerais avec Fluttershy et nous pourrons rire toutes les deux à des souvenirs communs.
Demain, je repartirais pour une session de vol au dessus de champs de mort mais pas ce soir.
Ce soir, j'allais essayer de retrouver le goût d'une vie normale avec une de mes meilleures amies. Un peu comme une répétition du temps où nous étions toutes les six à passer des jours paisibles à Ponyville.
Une répétition d'un monde qui n'existait plus...

Vraiment, en tant que fan d'histoire, j'adore les trucs de poneys pendant la guerre, en tant que germanophile, j'aime l'idée d'Equestria qui rejoint la triple Alliance, et en tant que fan de moustaches, j'adore les officiers allemands.
Par contre, tu devrais aérer un peu ton texte, il est lourd comme ça.

j'aime

J'espère une fin heureuse ^^

FitzTheBard a écrit:

Vraiment, en tant que fan d'histoire, j'adore les trucs de poneys pendant la guerre, en tant que germanophile, j'aime l'idée d'Equestria qui rejoint la triple Alliance, et en tant que fan de moustaches, j'adore les officiers allemands.

Content de voir que mon idée de faire voler des pégases au dessus des tranchées plaise
Pis c'est vrai que des officiers moustachus, ça avait une aut' classe que maintenant !

Citation :

Par contre, tu devrais aérer un peu ton texte, il est lourd comme ça.

J'ai fait quelques sauts de lignes mais honnêtement, je les ai placés un peu au hasard : est-ce que tu pourrais me dire selon toi où est-ce qu'un paragraphe s'impose ? Je crois me souvenir que ma prof de litté nous parlait d'un para par unité de temps, de lieu ou d'idée mais ça reste flou dans ma tête

Jona a écrit:

j'aime

J'espère une fin heureuse ^^

Ca reste tout de même la guerre, donc la happy end n'est pas garantie. Mais qui sait ?

Bro-Nie a écrit:

Jona a écrit:

j'aime

J'espère une fin heureuse ^^

Ca reste tout de même la guerre, donc la happy end n'est pas garantie. Mais qui sait ?

Il sème le doute maintenant

Bro-Nie a écrit:

Citation :

Par contre, tu devrais aérer un peu ton texte, il est lourd comme ça.

J'ai fait quelques sauts de lignes mais honnêtement, je les ai placés un peu au hasard : est-ce que tu pourrais me dire selon toi où est-ce qu'un paragraphe s'impose ? Je crois me souvenir que ma prof de litté nous parlait d'un para par unité de temps, de lieu ou d'idée mais ça reste flou dans ma tête

Je pense que c'est bon. Et ce que t'as dit ton prof est juste, même si personnellement, j'aère beaucoup plus.

Adossé contre l'écorce rugueuse de l'arbre-bibliothèque, Spike mâchonnait un spinelle sans grande conviction. La pierre avait un goût tout sauf savoureux et le jeune dragon ne comprenait pas comment certains pouvaient la considérer comme un rubis acceptable. C'était tout sauf un rubis ! Alors que le rubis donnait l'impression de fondre dans la bouche et d’inonder le palais d'un goût épicé, le spinelle faisait plus penser à quelque chose de pâteux et de légèrement amer. Enfin...avec les restrictions de guerre, il fallait se contenter de ce qu'on avait. Et un spinelle, mine de rien, c'était toujours mieux que de l'herbe.
Spike jeta un regard derrière lui et ne fut pas surpris de voir que la lumière filtrait encore depuis la fenêtre de Twilight. Quand il était parti faire sa promenade du soir dans Ponyville, son amie était encore plongée dans un de ses volumineux ouvrages consacrés aux humains. Spike était prêt à parier ses écailles qu'elle devait être en train de prendre des notes.
L'amour de Twilight pour les études ne datait pas d'hier, ni son entrain pour les dernières découvertes mais sa soif de connaissance en ce qui concernait les humains semblait disproportionné au jeune dragon.
Spike, comme tout le monde, avait été très intrigué de rencontrer cette race bipède intelligente mais il n'avait pas cherché à aller au delà des informations de bases, à savoir, qui dans les humains était de leur côté et qui voulait leur perte.
Pour Twilight, c'était différent. Elle semblait vouloir tout connaître des humains, des moindres détails biologiques à leur longue et extrêmement complexe histoire. Spike la soupçonnait qu'en agissant ainsi, elle s'ôtait la guerre de la tête pour se réfugier dans son mondre d'encre et de connaissance.
Le dragon n'aurait pas pu vraiment lui en tenir rigueur d'ailleurs. La situation paraissait complètement folle depuis une bonne trentaine de mois.
D'abord, Equestria qui sortait brutalement de son isolation suite à un sort de la Princesse Célestia, tout ça pour découvrir que la terre qu'ils croyaient connaître était occupée depuis bien longtemps par des millions et des millions d'une espèce qu'aucun poney n'avait jamais vu.
Puis, les liens diplomatiques, noués par la Princesse avec des nations humaines, la mort tragique de Célestia, les nations du monde entier qui se précipitèrent alors dans un conflit gigantesque et Equestria avec elles...tout ça dépassait de loin la compréhension rationnelle d'un petit dragon comme Spike ou de n'importe quel poney d'Equestria.
Spike laissa échapper un soupir de frustration et tenta de faire passer son amertume par une nouvelle bouchée de spinelle.
Ca ne marcha pas.

Une chouette hulula bien au dessus du dragon, confortablement nichée sur une des branches de l'arbre-bibliothèque.
Spike leva les yeux vers les immenses branches sombres et l'espace d'un soupir, envia l'animal. Il n'avait pas à se soucier de la guerre lui.
Il lui fallait juste chasser pour quoi nourrir ses petits et trouver un coin tranquille pour se reposer dans la journée. Il n'avait pas à penser à la division profonde qui frappait Equestria depuis le début de la guerre, ni de se soucier du sort des poneys partis au front.
Bien auparavant tout ça, quand Spike et Twilight venaient juste de s'installer à Ponyville, la jeune licorne avait posé une énigme à son apprenti ou plutôt, une question philosophique : valait-il mieux être sot ou intelligent ?
Bien évidemment, la réponse avait brulé les lèvres de Spike à peine celles de Twilight avaient-elles formulé l'interrogation.
Il était préférable d'être astucieux bien sûr !
Qui aurait voulu d'une vie d'un simple d'esprit ? Twilight n'avait pas donné son point de vue à son assistant tout de suite, préférant reposer son livre sur une table où s'entassait déjà un tas impressionnant d'ouvrages avant de répondre à Spike, un sourire en coin au creux de la bouche.
La position de Spike paraissait la plus naturelle avait-elle répondu. On se disait qu'ainsi, un être sage serait plus à même d'avancer dans la vie qu'un idiot et de découvrir des choses merveilleuses. Mais avait-elle ajouté, le poney astucieux, en grandissant apprendrait les injustices de la vie, les souffrances auquel il ne pourrait jamais faire face, le caractère inéluctable de la vie. Le sot au contraire, vivrait l'instant présent sans se soucier de ces choses là, menant simplement sa barque dans la grande rivière de la vie aussi bien que son gouvernail le lui permettrait.
Ainsi, avait conclut la jeune licorne, tout dépendait de ce que l'on souhaitait le plus, entre la connaissance et le bonheur immédiat.
Twilight avait ensuite précisée qu'elle se ralliait à l'avis de son assistant, son propre point de vue étant que le sage pouvait se préparer aux souffrances de la vie et que les connaissances qu'il emmagasinerait chaque jour lui permettrait d'apprendre à jouer de la musique, préparer un bon repas pour ses amis ou de percer les secrets de la vie.
Et que cela valait bien tous les bonheurs de sots du monde.
Spike était resté longtemps campé sur ses positions. Mais aujourd'hui...aujourd'hui...pour ne passer qu'une heure dans les plumes de cette chouette, le dragon donnerait toutes les gemmes d'Equestria et des terres au delà.

Il allait reprendre une nouvelle bouchée de spinelle quand il entendit le bruit distinctif de sabots qui frappaient l'herbe autour de l'arbre. Spike dressa l'oreille, étonné. Quelqu'un qui viendrait à la bibliothèque aussi tard ? Le dragon scruta les ténèbres et vit se une forme drapée de blanc et de violet qui se précisait au fur et à mesure qu'elle se rapprochait de lui. Quand il fut assez près pour pourvoir reconnaître les yeux lapis-lazuli de celle qui trottait dans sa direction, le cœur de Spike crut exploser de joie.
_Rarity ! s'exclama t-il alors qu'il faisait inconsciemment trois pas en avant pour se rapprocher de son amie.
La licorne sourit en voyant le dargon et tendant les pattes en avant, l'enlaça sans autre forme de procès. Spike, mi-surpris, mi-ravi par cette marque d'affection tactille de Rarity se demanda un court instant s'il n'était pas mort ou en train de rêver.
_Doucement Spikey-wikey, le réprimanda t-elle gentillement de sa voix veloutée. Tu vas froisser ma nouvelle robe.
Spike se détacha lentement de son amie tout en élargissant son sourire. Il n'y avait que Rarity pour que les premiers mots qu'elle prononce ne soient en rapport avec ses habits !
Spike fit un pas en arrière, détaillant la robe de la licorne. Elle avait choisi un ton crème qui jurait agréablement avec la bande lilas qui courrait au bas de son habit ainsi qu'avec son foulard prune, qui pendait négligemment à sa ceinture. Mais ce n'était pas ce qui attirait le plus l'oeil comparé à l'imposant chapeau dont s'était coiffée la licorne : il évoquait une sorte de plume géante blanche pour Spike, comme si un oiseau gigantesque avait laissé juste une touche de son duvet, spécialement pour la coiffe de Rarity.
_Rarity, lâcha le dragon après quelques secondes d'hésitation, tu es...absolument magnifique !
_Merci, rougit la licorne. C'est la toute dernière mode à Vienne, tu sais.
Spike la croyait sur parole, même s'il n'avait pas encore très bien compris où se situait celle ville d'humains.
_Tu es rentrée il y a longtemps ?
_Je descends juste du train, lui répondit Rarity en faisant quelques pas en direction de la bibliothèque. Twilight est encore debout à ce que je vois, affirma t-elle en pointant du sabot les fenêtres éclairées.
_Elle dort de moins en moins, souffla Spike d'un air dépité. Je crois qu'elle a pas mis le museau dehors depuis au moins trois semaines.
_Oh, pauvre chérie. J'espère que me voir lui fera du bien.
_J'espère aussi, hasarda le dragon en marchant jusqu'au palier de la bibliothèque, en en poussant la porte et en y introduisant son amie.

L'intérieur de la bibliothèque était propre et les livres parfaitement rangés, comme d'habitude mais on sentait dans l'air que quelque chose avait changé.
C'était peut-être la poussière qui recouvrait ce qui avait été naguère les volumes préférés de Twilight ou l'odeur de renfermé qui montait aux narines du premier poney qui passerait la porte. Mais ce qui indiquait le plus une altération était sans conteste un parchemin jauni, ouvert sur le pupitre de la licorne violette, recouvert de son écriture fine et reconnaissable.
Spike connaissait ce parchemin pour avoir envoyé des dizaines et des dizaines de ses frères à la Princesse Célestia.
C'était les rapports sur l'amitié que Twilight avait pour mission d'envoyer régulièrement à la souveraine equestrienne.
Twilight était en pleine rédaction de l'un d'entre eux quand elle avait appris la mort de Célestia.
Elle avait immédiatement posé sa plume et galopé au dehors pour tenter de se renseigner.
Depuis ce jour, Spike ne l'avait jamais revue reprendre la lettre, la laissant inachevée.
Rarity se tenait coite cherchant des yeux son amie. Spike lui indiqua une forme violette recroquevillée sur un banc, efflanquée d'une pile impressionnante de livres, qui l’entourait comme les murs d'un château fort.
_Twilight ! l'appela son assistant. Regarde qui vient nous rendre visite !
Twilight Sparkle leva le museau de son ouvrage et jeta lentement un coup d'oeil par dessus son épaule.
_Tiens, salut Rarity. Tu vas bien, on dirait, marmonna t-elle avant de replonger le museau dans son livre.
_Comment ça "salut Rarity" ? tempêta Spike. On a pas vu Rarity à Equestria depuis au moins une dizaine de mois et c'est comme ça que tu l'accueille ?
_Ca va, le calma la licorne blanche en lui posant doucement son sabot sur l'épaule. Tu peux nous préparer une tasse de thé, s'il te plait ?
_Fais en juste pour Rarity, Spike, précisa la voix atone de Twilight. J'ai pas soif.
Spike s'apprêta à protester de nouveau mais un regard de Rarity, empli de douceur mais implacable le persuada de se plier aux ordres de son amie sans discuter. Tout en s'éloignant, le dragon ne put s'empêcher de noter à quel point le nouveau métier de Rarity déteignait jusque dans ses actes.
Alors que Spike disparaissait à l'étage pour faire chauffer de l'eau et préparer la tasse et les herbes, Rarity trotta jusqu'à son amie et s'assit directement à côté d'elle. Twilight était toujours pensivement plongée dans son livre, ignorant complètement la présence de Rarity à sa gauche.
La licorne blanche hasard un ou deux toussotements qui eurent raison de Twilight.
La bibliothécaire finit par pousser un hennissement excédé, par refermer brusquement son libre et le poser sans ménagement sur les autres.
_Qu'est-ce que tu veux Rarity ? lui demanda Twilight sans douceur.
Surprise par agressivité de son amie, la licorne mit quelques secondes avant de répondre :
_Et bien te voir, tout simplement, sourit-elle.
_Et ça ne pouvait pas attendre demain matin ?
_Pas vraiment non. L'Impératrice me veut auprès d'elle à la première heure donc...
_L'Impératrice ? la coupa Twilight en levant un sourcil.
_Et bien oui...tu sais...Luna. Notre souveraine.
_J'avais oublié qu'elle avait choisi ce stupide titre à la mort de sa sœur, grommela Twilight en levant les yeux au plafond. Le fait d'être la seule princesse régnante de tout Equestria ne lui suffisait pas ?
Rarity cligna des yeux de surprise. Plusieurs fois. Mais par tous les monstres de la forêt Everfree, qu'est-ce qui arrivait à son amie ? D'abord elle l'ignorait, puis elle se mettait à insulter publiquement l'Impératrice...
_Chérie, dit doucement Rarity en posant son sabot sur le sien, est-ce que tu es sûre que tu vas bien ? Tu m'as l'air épuisée.
Ce n'était pas que les cheveux en désordre de la bibliothécaire qui poussait la licorne à penser cela mais aussi les grandes cernes qui entouraient ses yeux comme du mauvais maquillage et la couleur de ses pupilles, anormalement ternes.
_Je vais très bien, merci ! répondit sèchement Twilight en retirant sa patte. Et ça ira encore mieux quand Spike t'auras apporté ton thé, que tu l'auras bu et que tu partiras d'ici !
_Ma puce, murmura gentillement la licorne blanche, tu ne sais plus ce que tu dis.
_Je sais très bien ce que je dis au contraire, rétorqua Twilight. Mais je n'ai rien à dire à quelqu'un qui s'est vendue auprès de Luna !
Il fallut tout son self-control à Rarity pour agir en lady et ne pas gifler violemment son amie.
_Je comprends que mon travail actuel puisse te poser problème, exprima Rarity avec diplomatie. Après tout, Celestia et toi, vous étiez très proches et...
_Je t'interdis de prononcer son nom en ma présence, formula glacialement Twilight en détachant chaque mot. Tu es la dernière de tout Equestria avec qui j'aurais envie de parler de la Princesse. Alors maintenant, si tu veux bien m'excuser...
Et sans attendre une éventuelle réponse de son amie, la licorne rouvrit son livre et y replongea derechef le museau. Rarity resta quelques instants sans rien faire avant de rajuster son chapeau, de se lever du banc, la mine basse et de trainer lentement les sabots vers la sortie.

Elle avait rejoint l'extérieur quand Spike lui apporta son thé comme elle l'aimait avec deux sucres. Licorne et dragon restèrent un moment silencieux tous les deux, regardant Ponyville endormie.
_Ca c'est passé bien plus mal que je ne l'espérais, avoua Rarity entre deux gorgées.
_Twilight a été complètement bouleversée par la mort de Celestia, l'excusa Spike. Les choses sont devenues pires avec le temps.
_Tout comme pour Equestria, dit pensivement la licorne après un long silence. Twilight ne sort jamais de la bibliothèque ?
Spike secoua négativement la tête.
_Elle ne voit même plus les filles ?
_T'es pas au courant ? s'étonna le dragon. Twilight est la seule qui reste encore de vous six à Ponyville.
Ce fut au tour de Rarity de prendre l'air stupéfaite. Spike se hâta de détailler en comptant sur ses griffes :
_Rainbow et Fluttershy sont parties toutes les deux pour le front dès le début de la guerre. Comme presque tous les pégases d'ailleurs. Toi, tu as été chargée des missions diplomatiques par Luna peu de temps après.
_Oui mais Pinkie Pie ? Et Applejack ?
_Pinkie, c'est Pinkie, expliqua le dragon d'un mouvement d'épaules fataliste. Je crois pas qu'elle ait vraiment compris ce que cette guerre voulait dire. Pas que j'y comprenne quelque chose moi-même d'ailleurs. Elle s'est mise en tête de remonter le moral des poneys partis là bas en montant une sorte de spectacle ambulant. La dernière fois qu'on a eu des nouvelles d'elle, elle partait pour une région qui s'appelle les Fanldres je crois. C'est où les Fanldres ?
_Les Flandres, Spike, le corrigea t-elle. C'est en Belgique. Pas très loin de là où sont basées Rainbow Dash et Fluttershy d'ailleurs. J'espère qu'elles se verront là bas. Et Applejack ? demanda t-elle. Elle l'a accompagnée ?
_Pas vraiment, formula Spike avec précautions. En fait, Applejack était comme Twilight, elle avait du mal à supporter l'idée de la mort de Célestia et du couronnement de Luna en unique souveraine d'Equestria. Mais tu connais AJ, elle a toujours tendance à dire ce qu'elle pense. Un peu trop d'ailleurs. Elle a pris position contre Luna. Plusieurs fois et de façon assez radicale. La Princesse, euh pardon, l'Impératrice a laissé passer ça quelques temps puis voyant qu'AJ n'arrêtait pas, elle a décidé de la punir. Tu te souviens peut-être que le terrain de Sweet Apple Acres a été donné à sa famille par la Princesse Célestia, à l'arrière grand-père d'Applejack ?
Rarity hocha la tête.
_Et bien, poursuivit Spike, Luna a tout simplement estimé qu'elle était en droit de reprendre la ferme et tous les vergers.
_L'Impératrice a fait ça ? s'exclama Rarity, abasourdie.
_Ca devait être juste temporaire, le temps qu'AJ s'excuse publiquement et se mette à soutenir Luna mais Applejack a très mal vécu la confiscation des terres. Elle s'est battue avec les gardes impériaux venus appliquer les ordres de Luna et en a blessé plusieurs très grièvement. Un des soldats est mort à l'hôpital des suites de ses blessures.
_Alors Applejack est en prison ? supposa Rarity.
_Elle s'est enfuie suite à tout ça, expliqua Spike. Personne ne sait où elle est passée mais elle a quitté Equestria, c'est certain. Luna l'a faite condamner au bannissement par contumace.
_Donc, c'est pour ça que Twilight se retrouve toute seule, conclut la licorne en finissant son thé.
_Ouais, ajouta tristement le dragon. J'espère que la guerre va vite s'arrêter que vous puissiez toutes rentrer à Ponyville. Je suis certain que Twilight irait mieux si elle était sûre que ses meilleures amies étaient en sécurité auprès d'elle.
Rarity ne voulut pas crever la bulle d'espoir de son ami en lui rétorquant qu'il y avait peu de chance qu'Applejack remette les sabots un jour à Ponyville, même une fois la guerre terminée. Elle se contenta donc de hocher la tête avec un petit sourire de façade.
Malgré le sucre de son thé, elle sentait un goût amer sur son palais.
_Et toi ? lui demanda brusquement Spike. Ca se passe comment ces missions aux quatre coins de l'Europe ?
_Ah, sourit légèrement Rarity, je suis toujours dans des trains ou dans des bateaux. Je rencontre des gens très bien habillés qui parlent tout aussi bien et qui n'ont l'air d'avoir aucun problème à traiter avec une licorne.
_Et c'est comment l'Europe ?
Le regard de Rarity se perdit un instant dans l'immensité.
_C'est magnifique Spike, finit-elle par ajouter après un petit instant. Vienne, Prague, Berlin, Budapest...je suis même allée une fois à Londres ! s'exclama t-elle, des étoiles dans les yeux. Je ne comprends pas pourquoi Celestia n'avait pas brisé le sort d'isolement d'Equestria plus tôt.
Tous ces noms de villes humaines inconnues donnaient le vertige à Spike. Ainsi qu'une furieuse envie d'aller toutes les découvrir.
_Après la guerre, lui promit Rarity je t’emmènerais en Autriche, dans la ville de Cracovie. C'est la cité du dragon ! précisa t-elle avec un grand sourire.
_Juré ? Tu pinkie promets ?
_Juré ! s'exclama t-elle dans un grand éclat de rire. Croix sur le coeur, voulant voler, dans mon oeil, un cupcake tout entier !
Spike se joignit au rire de son amie alors qu'au loin, un coq annonçait le lever du soleil. Ou techniquement, annonçait à l'Impératrice Luna qu'il était temps qu'elle lève le soleil.
_Déjà ? s'étonna Rarity en scrutant le ciel. Je dois retourner immédiatement à Canterlot. Et Spike, si on ne se revoit pas avant un bout de temps...
La licorne se pencha sur le dragon et l'embrassa sur le front.
_Prends soin de Twilight pour moi, d'accord ?
Spike voulut pinkie promettre mais ne réussit péniblement qu'à aligner une suite de mots sans queue ni tête. Rarity ne le remarqua pas cela dit car elle avait déjà tourné les sabots et galopé jusqu'à la gare pour retourner sans attendre à la capitale equestrienne.
Le dragon resta sur place à regarder son grand amour s'éloigner jusqu'à ce qu'elle soit hors de vue, soupira tristement et rentra à l'intérieur de l'arbre-bibliothèque.
Maintenant que Twilight était seule, peut-être voudrait-elle un peu de thé.

J'ai lut cette fic avec beaucoup de plaisir, le mélange de comique et tragique dans le décor rend le contraste vraiment amusant. Le style est agréable et sans grand défaut, et les mises en situation crédibles.

Le point noir à mon sens est qu'actuellement, aucune trame ne se dessine, nous sommes encore dans la phase d'introduction qui plante le décor. Il manque donc une petite accroche pour nous poser des questions sur le futur - mais j'imagine que cela ne saurait attendre.

Nanomachin a écrit:

J'ai lut cette fic avec beaucoup de plaisir, le mélange de comique et tragique dans le décor rend le contraste vraiment amusant. Le style est agréable et sans grand défaut, et les mises en situation crédibles.

Ca me fait plaisir que tu me dises ça. C'est vrai que j'adopte un point de vue plus réaliste dans cette fanfic et forcément, l'humour qui est un des moteurs de MLP en pâtit un peu. Mais si la recette fonctionne, alors, c'est cool !

Citation :

Le point noir à mon sens est qu'actuellement, aucune trame ne se dessine, nous sommes encore dans la phase d'introduction qui plante le décor. Il manque donc une petite accroche pour nous poser des questions sur le futur - mais j'imagine que cela ne saurait attendre.

Parce que nous sommes encore dans le chapitre un mon ami
Et même si je ne compte pas passer un an sur cette fic (histoire de changer), je préfère prendre mon temps pour vous plonger doucement dans cet univers.

'nyway, voici la suite.



S'aidant de la magie, Luna décrocha le grand manteau de sacre du mannequin où il était posé, l’amena jusqu'à elle et le laissa tomber sur ses épaules avant d'accrocher les deux fermoirs, l'un représentant la lune et l'autre le soleil, ensemble. Le manteau était de couleur bleu nuit et moucheté d'étoiles argentées. Sa doublure, faite de fourrure de renard blanc royal, animal extrêmement rare dans tout le pays, était censée rappeler à tous qu'il n'y avait que les souveraines d'Equestria qui pouvaient porter pareil habit.
Autrefois, il y avait deux manteaux de cérémonie : un pour Luna et un pour sa sœur. Les tenues étaient complémentaires : là où sur le manteau de Luna, les couleurs étaient sombres et renvoyaient à la lune et aux étoiles, celles de l'habit de Célestia étaient d'un blanc presque pur et des soleils d'or en parsemaient le tissu.
Aussi loin qu'elle s'en souvienne, Luna ne voyait qu'un unique évènement où elle et sa sœur avaient portées ensemble les manteaux de sacre : à leur couronnement en tant que Princesses d'Equestria, après qu'elles aient vaincu Discord et enfermé le démon dans la pierre.
Célestia avait toujours trouvé le décorum de trop. Pour l'aînée des alicornes, on était Princesse dans les actes, pas dans ce que l'on portait. Luna avait toujours pensé le contraire, ou du moins, que les regalia étaient nécessaires pour symboliser le pouvoir princier.
A l'enterrement de sa sœur, Luna avait tenu à ce que le protocole soit respecté et que l'on inhume l'alicorne en grande tenue. La cérémonie s'était tenue dans les jardins royaux. Tout Equestria avait fait le voyage pour venir rendre un dernier hommage à Célestia. Luna avait personnellement recouvert le linceul de soie sur le visage de son ainée avant de laisser la garde royale porter leur Princesse en terre. Conformément aux instructions laissées par Célestia elle-même, chaque poney avait été ensuite invité à jeter une motte de terre afin que le peuple equestrien tout entier participe à l'inhumation de sa souveraine. Luna avait été peinée par cette entorse au protocole princier mais s'était effacée devant les dernières volontés de sa sœur.
Après un court discours, l'unique Princesse restante d'Equestria avait alors laissé le soleil briller pendant une journée entière, en hommage à son ainée.
Durant tout ce laps de temps et même au delà, des groupes de poneys avaient cheminé jusqu'à la sépulture de la défunte pour y déposer des fleurs, des poèmes, des bijoux ou plus généralement, toute marque d'affection.
Luna avait été très touchée par cette preuve d'amour du peuple envers sa grande sœur.
A la tristesse du départ de Celestia, s'était ajouté la colère de l'incompréhension et de l'injustice. Ça ne semblait juste à aucun poney que la récompense d'Equestria pour s'être ouverte sur le monde soit la mort de sa Princesse. C'était pourquoi les poneys, les licornes et les pégases avaient soutenus en masse Luna quand elle avait déclaré se rallier aux Puissances Centrales et les soutenir dans le conflit à venir.
Equestria avait été pour la guerre. Une nation qui avait placé l'harmonie, l'amour et la tolérance au dessus de tout avait été prise d'un coup de folie et réclamait du sang humain pour éponger celui de Célestia.
Luna avait alors explicitement autorisé tout volontaire à prendre les armes et à rejoindre les armées allemandes et austro-hongroises en tant que corps expéditionnaire. Les pégases s'étaient ralliés en à cette idée en abondance, tandis que les deux autres races, les licornes et les poneys terrestres avaient majoritairement préféré soutenir l'effort de guerre à l'arrière, en aidant les ouvriers de la Triplice à faire tourner leurs usines ou à cultiver le sol pour pouvoir envoyer plus de denrées au front.
Luna fixa sa couronne de jais sur sa tête, en prenant garde que pas un seul de ses crins ne se coince dans l'opération. La chef suprême d'Equestria se devait d'être irréprochable dans sa tenue. Enfin, elle passa son plastron noir décoré d'une lune blanche avant de tourner lentement les sabots et de se regarder dans le miroir.
Tout était à sa place, jusque dans les moindres détails.
Luna fit quelques pas jusqu'à l'imposante double porte qui séparait sa chambre du reste du palais, ferma les yeux, prit une grande inspiration, garda l'air dans ses poumons quelques secondes avant de l'expulser brutalement. Elle s’efforça ensuite de prendre un air sévère et aussi impérial que possible avant d'ouvrir la porte par magie et de la franchir.

Les deux gardes royaux préposés à sa sécurité saluèrent respectueusement leur impératrice avant de l'escorter en silence jusqu'à la salle du trône. Alors qu'elle progressait dans les grands couloirs du palais, Luna ne put s'empêcher de noter à quel point le château était devenu silencieux depuis la mort de son aînée.
L'alicorne porta son regard sur les magnifiques vitraux qui retraçaient l'histoire glorieuse d'Equestria et sentit une larme perler au coin de son oeil quand elle passa devant la composition qui narrait la chute de Discord avant de maudire sa faiblesse et de chasser sa larme d'un battement de paupière. Elle ne pouvait pas s’abandonner au passé. Elle était la souveraine d'Equestria. Impératrice qui plus est ! Elle avait un peuple sur lequel veiller et une nation à emmener à la victoire.
La salle du trône dans laquelle l'alicorne venait d'entrer, avait été modifiée dès les premiers jours du pouvoir de Luna. Le trône doré aux fontaines avait été laissé en l'état mais Luna avait tenu à en faire recouvrir le dossier par les oriflammes des trois tribus fondatrices d'Equestria. Luna espérait que la force contenue dans ces symboles l'aiderait à mieux gouverner.

L'Impératrice gagna son fauteuil, s'y assit confortablement et d'un signe du museau, donna l'ordre aux gardes d'introduire la première audience.
Luna fut satisfaite de voir Rarity s'approcher d'elle, une de ses plus diplomates les plus zélées. La licorne s'inclina devant sa souveraine jusqu’à ce que cette dernière lui fasse signe de se relever.
_Dame Rarity, s'exclama Luna. Nous sommes heureuse de vous voir. Comment s'est déroulée votre mission à Vienne ?
_Contrastée pour dire la vérité, votre Majesté, répondit la diplomate. Si les plénipotentiaires austro-hongrois se sont déclarés satisfaits de l'envoi d'or et de munitions, les officiers allemands désireraient un soutien plus militaire. La défaite sur la Somme et à Verdun a coûté une grande partie de son armée au kaiser. Il en appelle à ses alliés pour redresser la situation.
Luna se mit à grincer des dents, geste aussi peu impérial que révélateur de son état d'esprit.
_Nous avons déjà prévenu Guillaume II que tous les poneys désireux de se battre étaient partis pour le front il y a longtemps !
_Certains diplomates allemands suggèrent...
Rarity eut l'air de chercher ses mots.
_...la conscription, formula t-elle rapidement, sachant très bien que cette idée n'avait guère de poids dans le cœur de l'Impératrice.
_Non, répondit sèchement Luna. L'histoire ne nous fera pas entrer dans les livres comme la souveraine qui aura poussé son peuple au combat contre son aval. Tout poney, licorne ou pégase qui le souhaite peut dès aujourd'hui, aller rejoindre les champs de bataille et défendre nos couleurs. Le reste de notre peuple lutte à sa manière à l'arrière, en œuvrant dans les usines, les mines et les fermes pour la victoire finale. Ou en nous servant fidèlement comme vous le faites Dame Rarity, poursuivit-elle.
L'alicorne marqua un blanc, rassemblant ses esprits avant de poursuivre.
_Le service militaire obligatoire ne sera pas appliqué en Equestria à moins que la gravité de la situation ne nous y contraigne. Pour l'instant, aussi déplaisante que cette idée soit au kaiser, il devra s'y faire. Avons-nous été claire ?
_Limpide, votre Majesté.
Luna se leva de son trône, en descendit et se mit à arpenter la pièce de long en large, comme elle avait l'habitude de le faire quand elle réfléchissait.
_Cela dit, Guillaume a raison sur un point. Cette guerre risque fort de se jouer au nombre et à ce jeu là, l'Alliance est inférieure à l'Entente. Il faudrait condamner le front russe une fois pour toute et lancer un assaut massif en Italie. Une fois Rome tombée, nous pourrions alors attaquer la France par le sud et la terrasser alors que ses troupes seront sur la ligne de front nord.
Rarity hocha silencieusement la tête. Depuis l'ouverture du front italien, accueilli avec une frayeur sans nom dans tout Equestria car après tout, l'Empire n'était séparé de la Botte que par les Alpes, bien des poneys avaient fini par penser que c'était la clé de la guerre. Le front ouest était bloqué depuis les premiers mois de la guerre et le front est semblait tout aussi condamné tant la taille de la Russie et son immense réservoir d'hommes lui permettait d'absorber défaite sur défaite sans jamais s'écrouler.
_J'ai peur d'avoir une autre mauvaise nouvelle votre Majesté.
_Parlez, lui répondit Luna. Nous vous écoutons.
_Les rapports des pertes du front roumain viennent de nous parvenir. La magicienne Trixie en fait partie. Elle est tombée à la bataille de Bucarest.
_La Grande et Toute Puissante Trixie ? interrogea l'Impératrice en levant un sourcil avant de prendre un air sombre quand Rarity confirma. C'est une victoire chère payée pour notre nation.
Rarity ne put s'empêcher d'approuver encore une fois. Peu importait la vanité de la licorne défunte et probablement que c'était avant tout pour sa gloire personnelle qu'elle était partie au front, le fait était que Trixie avait été une des très rares licornes à se salir directement les sabots sur le champ de bataille et était devenue une sorte de symbole. C'était cette perte psychologique, avant les capacités magiques de Trixie qui manquerait le plus à l'Empire.
_Il nous faut pallier ce vide au plus vite, murmura Luna en observant Canterlot au travers d'un des nombreux vitraux de la salle du trône. Les combats à l'est sont déjà difficiles. La mort de Trixie va entraver encore plus notre progression, sans parler du choc moral de sa disparition. Voyez-vous une autre licorne qui pourrait prendre sa place ?
L'image de Twilight se matérialisa instantanément dans l'esprit de la diplomate.
_A dire vrai, votre Altesse, il y a peut-être quelqu'un. La protégée de notre défunte Princesse Célestia, mon amie, Twilight Sparkle. Mais je doute de pouvoir la convaincre de...
Les yeux de Luna se perdirent un instant dans ses souvenirs.
_La jeune Sparkle. C'est elle qui dirigeait votre groupe quand vous m'avez libérée de Nightmare Moon, n'est-ce pas ?
_Oui votre Grandeur, confirma Rarity, se gardant bien de signaler à Luna qu'elle venait de violer son respect de l'étiquette en parlant à la première personne du singulier. Mais, j'y pense, votre Altesse, ne pourrions nous pas nous servir des Elements d'Harmonie afin de remporter la guerre ? C'est la magie la plus puissante d'Equestria, n'est-ce pas ?
_Vous venez de mettre le sabot sur le problème Dame Rarity, lâcha l'Impératrice en recommençant ses allées et venues dans la salle du trône. Les Elements n'ont aucune limite de pouvoir à l'intérieur des frontières d'Equestria. Mais nous ignorons totalement ce qui adviendrait de leur magie dans le monde des humains : peut-être détruirait-elle tout sans exception, peut-être ne ferait-elle même pas saigner du nez au plus faible des poneys. Dans un cas comme dans l'autre, c'est bien trop hasardeux de s'en remettre à eux pour gagner la guerre. Un conflit de cette ampleur ne s'emporte pas sur un coup de hasard.
Luna passa son sabot droit sur ses paupières, lourdes de fatigue.
_Vous pouvez disposer Rarity, ordonna Luna à sa sujette. Nous vous permettons de prendre quelques jours de repos auprès des vôtres avant de reprendre le train pour vos missions diplomatiques. Nous vous ferons parvenir nos volontés plus tard.
La licorne s'inclina une nouvelle fois :
_Bien votre Majesté. Puis-je vous demander, avant que je ne parte, d’offrir une faveur à votre humble servante ?
Luna eut un mouvement de tête qui incita la diplomate à formuler sa requête :
_Mon amie Applejack a été bannie d'Equestria par votre Majesté suite aux incidents de Sweet Apple Acres. Et votre Altesse impériale sait sûrement à quel point je suis attachée à elle. Qui plus est, elle est liée aux Eléments d'Harmonie, tout comme Twilight ou moi-même. Je suis persuadée qu'elle pourrait faire amende honorable et servir fidèlement la couronne.
_Nous avons déjà discuté des Elements avec vous à l'instant, souligna l'Impératrice d'un ton sec. Et quand bien même nous serions prête à les utiliser, Applejack a été jugée et condamnée. Elle est interdite de séjour en Equestria.
_Mais il ne tient qu'à vous de...
_NON !
Luna avait toujours fait attention à ne pas utiliser la voix royale traditionnelle de Canterlot, sauf quand elle le désirait vraiment, pour marquer un mot ou une phrase en particulier. Rarity eut la désagréable impression que ses tympans venaient d'imploser.
_LA FERMIÈRE APPLEJACK A OSÉE SE DRESSER CONTRE NOTRE AUTORITÉ, ELLE DOIT EN ETRE PUNIE !
Puis, l'Impératrice revint à un volume de voix plus audible.
_Néanmoins, nous comprenons votre souffrance. Nous serons peut-être prête à lever le bannissement de votre amie si son repentir est sincère mais seulement une fois la guerre finie. Tant que cette dernière n'est pas achevée, nous nous devons de rester ferme dans toutes nos décisions.
Rarity hocha silencieusement la tête, une moue sur le visage et commença à battre en retraite mais Luna l'arrêta avant qu'elle ne franchisse la porte.
_Une dernière chose Dame Rarity. Il est certain que nous serions plus disposée à repenser au sort de votre amie si vous de votre côté, parveniez à persuader Twilight Sparkle qu'il est tout à son intérêt de se rallier à l'appel de la guerre.
La licorne comprit instantanément le marché que lui proposait l'Impératrice : c'était Twilight contre le peut-être retour d'Applejack. Rarity se sentit gênée à l'idée de réduire ses amies à de basses équations mais si c'était le seul moyen de faire revenir Applejack en grâce, il fallait le tenter. Rarity salua une dernière fois Luna avant de se retirer.

L'Impératrice, restée seule dans la salle du trône fit suspendre les audiences un moment. Elle progressa jusqu'à une une petite porte au fond de la salle, la poussa et s'engagea dans une volée d'escaliers particulièrement étroite. Au terme de plusieurs minutes, Luna arriva au niveau de la rambarde d'un grand atelier circulaire où des dizaines de poneys en blouse blanche, certains couverts de taches de graisse, s'affairaient autour de plans de travail, de maquettes ou de feuilles de calcul.
C'était dans cette pièce qu'étaient menées les recherches technologiques qui devraient permettre à Equestria et aux Puissances Centrales de remporter la guerre. Les poneys, habitués depuis longtemps aux dirigeables, avaient permis le développement accru des zeppelins allemands et autrichiens tandis qu'en retour, les savants des deux kaisers avaient fait don de leurs tous premiers bateaux à l'Empire equestrien.
Très peu accoutumés à la mer, les poneys avaient rechigné à faire subir le baptême du feu à leurs navires qui mouillaient paisiblement dans la baie de Pula, sous la protection de l'armée austro-hongroise.
Les scientifiques equestriens s'étaient en revanche passionnés pour les sous-marins et d'une manière plus générale, par toute la technologie amphibie.
Les dernières avancées des U-Boote n'auraient pas été possibles sans le concours de l'Empire equestrien.
De sa position surélevée, Luna chercha du regard ceux qu'elle était venue consulter. Au terme de quelques secondes de recherche, elle les trouva. Les frères Flim et Flam, autrefois vendeurs de cidre et vendeurs tout court n'avaient pas été longs à proposer leurs services d'inventeurs à la couronne. Leurs résultats encourageants avaient poussée Luna à nommer les jumeaux à la tête du département scientifique.
Ils avaient posé comme condition d'obtenir la priorité des crédits de guerre pour leurs recherches et de ne répondre de leurs actes que devant l'Impératrice. Cette dernière avait accepté, convaincue par la brillante victoire du château de Hooge , remportée en grande partie grâce aux améliorations apportées aux lance-flammes allemands, fruits de l'imagination des deux licornes.
Flam, le cadet des deux frères, se distinguant de son aîné par la courte moustache rousse qu'il arborait de tout temps était en train de s'entretenir avec deux autres poneys autour d'un jeu de plans, qui concernaient, de ce que pouvait en voir Luna, des cuirassés. L'ingénieur leva le museau vers la rambarde, aperçut l'alicorne et alla s'empresser de la rejoindre en haut. Luna ne put l'expliquer rationnellement mais en quelques instants, Flam se tenait à côté d'elle, efflanqué de son frère.
_Bonjour votre Majesté ! s'exclama Flim d'emblée. Les nouvelles du front sont bonnes, j'espère ?
_Contrastées, répondit Luna en reprenant l'expression de sa diplomate. Nous faisons toujours face à nos ennemis à l'ouest et à l'est, la colosse Russe refuse de tomber.
_Ca ne durera plus très longtemps Madame, lui assura Flam, un air triomphal dans les yeux. Vous serez heureuse d'apprendre...
_...que grâce à nos dernières améliorations sur les u-boote allemands...
_...le kaiser sera bientôt en mesure de lancer pour de bon la guerre sous marine illimitée !
Luna fut à peine surprise de voir chaque frère prolonger la phrase de l'autre. La plupart du temps, Flim et Flam donnaient l'impression d'être un même esprit dans deux corps. Quand elles étaient des petites pouliches, elle et Célestia aussi avaient quelquefois donné ce sentiment au monde.
_Guillaume appréciera sans doute votre zèle messieurs, commenta l'Impératrice en arpentant lentement la rambarde sur toute la longueur de l'atelier, jetant des regards réguliers sur les travaux qu'on y menait. Le blocus affaiblira nos ennemis mais nous ne pensons pas qu'il nous offrira la grande victoire dont nous avons besoin. Et Equestria a soif de triomphe rapide messieurs, d'un triomphe rapide et éclatant. Mais nous devons procéder par ordre : la Russie d'abord, puis l'Italie et enfin la France. Où en sont vos recherches sur ces fronts là ?
_Le tout dernier type de prototype zeppelin...
_...vient juste d'être réceptionné par le corps expéditionnaire des Flandres. Si les résultats sont encourageants...
_...nous pourrions envisager un raid aérien de grande ampleur au dessus de Londres et de Paris pour briser le moral des populations et les pousser à signer la paix.
Luna opina du chef. Les dirigeables equestriens et d'une manière plus globale, tout ce qui touchait au combat aérien, était indiscutablement le point fort de l'Empire.
_Parfait. Et pour la Russie ?
Les jumeaux prirent de concert un air embarrassé.
_A dire vrai Madame, répondit Flam en tirant nerveusement sur sa moustache, nous sommes assez peu optimistes sur nos chances de l'emporter à l'est par le même moyen.
_L'Empire russe est tout simplement trop grand et décentralisé pour que les raids aient un effet efficace, poursuivit Flim. Sans compter que nos troupes ne disposent pas d'installations correctes pour permettre le déploiement des zeppelins. Le front a beau être lent, il bouge.
_Donc, conclut abruptement Luna, vous n'avez aucune solution pour remporter la guerre à l'est ?
_Nous travaillons sur un projet, répondit tout de go le plus jeune des jumeaux. Mais il est encore au stade de la gestation.
_Le principe est extrêmement simple mais très difficile à mettre en place, ajouta Flim.
_Nous vous écoutons.
_Nous ne sommes encore sûrs de rien ! Nous ne voudrions pas déranger votre Altesse avec...
_Nous vous écoutons, répéta Luna d'une voix plus sèche.
_Concrètement, expliqua Flim, nous cherchons le moyen de concentrer l'énergie magique dans un projectile, destiné à être lancé sur les villes et les bases ennemies depuis un dirigeable, un avion ou pourquoi pas un pégase qui se chargerait directement du transport.
_De quelle quantité de magie parlons-nous ? interrogea Luna en levant un sourcil, intriguée.
_De grosse quantité votre Majesté. De très, très, grosse quantité, lui assura Flam d'un air extrêmement sérieux. C'est d'ailleurs le principal problème auquel nous nous heurtons. Arriver à rassembler une telle force magique et à la contenir, sans qu'elle ne nous échappe.
_Mais si cette arme aboutissait Madame, ajouta Flim d'un air excité, sa puissance dépasserait de loin toutes les technologies utilisées dans cette guerre. Une seule bombe magique, une seule...et nous pourrions raser une capitale de l'Entente jusqu'aux fondations. Leurs forces se rendraient sans faire d'histoire, tremblantes de peur devant la force de notre nouvelle arme.
_Cela pourrait mettre un terme à la guerre votre Majesté. Un terme à toutes les guerres Plus personne n'oserait se lever contre Equestria et ses amis.
Luna garda le silence un moment, soupesant dans son cœur, en imaginant un instant que le projet des frères Flim et Flam aboutissait - et la Lune savait que les licornes avaient mené à bout des plans bien plus tordus -, si l'utilisation de cette arme était éthiquement valable. Certes, elle tuerait des centaines et des centaines de personnes, des civils pour la plupart si elle était lâchée sur une ville mais combien d'hommes et de poneys étaient déjà tombés dans cette guerre ? Est-ce quelques centaines de plus ne seraient pas acceptables si c'était pour offrir la paix perpétuelle au monde ?
Elle se devait d'y réfléchir sérieusement.
_Continuez votre travail messieurs. Nous sommes satisfaite de vous.
Les licornes s'inclinèrent alors que l'Impératrice regagnait lentement la salle du trône.
Et alors qu'elle gravissait les marches, Luna ne put s'empêcher d'écouter la petite voix, tapie au fond de sa tête, qui lui chuchotait qu'une arme pareille serait exactement le miracle qu'il manquait à l'Empire pour remporter la guerre une fois pour toute et garantir à jamais la paix et la sécurité d'Equestria.
Et accessoirement, de prouver à l'ensemble de la population humaine qu'assassiner une Princesse equestrienne était indubitablement et assurément une très mauvaise idée.

Twilight Sparkle déplaça avec soin une de ses pattes pour être plus confortablement allongée. Midi approchait et si le soleil avait réchauffé Equestria depuis quelques heures, quelques plaques brumeuses restaient encore ici et là et tout autour de Twilight, les brins d'herbe étaient encore gorgés de rosée.
La jeune licorne avait pris la précaution d'emporter une couverture avec elle au parc public de Ponyville, pas tellement pour éviter de se mouiller le ventre que pour ne pas tremper son livre.
C'était un gros ouvrage d'environ six cent pages parcheminées, imprimé avec soin et garni d'illustrations et de schémas.
Le titre Essai sur l'inégalité des races humaines, Tome Premier était inscrit en lettres gaufrées sur la couverture de cuir brun du livre.
L'essai avait été un des premiers livres que Twilight s'était procuré lorsque la Princesse Celestia avait levé le sort d'isolation et ouvert Equestria sur le monde.
La plupart des poneys avaient accueilli avec circonspection cette fin de l'isolationnisme equestrien.
Ce monde humain était inconnu, obscur et forcément dangereux. C'était justement pour rassurer son peuple envers ses nouveaux voisins que la Princesse Celestia avait établi des relations diplomatiques envers les nations humaines, un geste qui finirait par lui coûter la vie, trente mois auparavant.
Une déchirure. Il n'y avait pas d'autre mot pour décrire le sentiment qui avait frappé la jeune licorne quand elle avait appris la mort de son mentor.
Elle en avait laissé tomber sa plume à terre, maculant le sol de l'arbre bibliothèque d'encre noire avant de se précipiter au dehors, abandonnant son rapport sur l'amitié en pleine rédaction.
Les informations étaient floues mais avaient toutes concourues à une seule et horrible conclusion : Celestia, Princesse régnante d'Equestria avait été tuée lors d'une visite officielle dans une ville humaine, en compagnie de nobles austro-hongrois, un des premiers peuples humains à se lier d'amitié avec la nation equestrienne. Ironie de l'histoire, le rapport sur l'amitié que Twilight rédigeait à l'époque concernait la mort et le deuil : le coeur du vieux chien de famille de Pipsqueak avait lâché pendant la nuit et le jeune poulain en été resté inconsolable pendant des jours avant que ses amis ne réussissent à l'aider à surmonter sa peine et à tourner la page.
Twilight avait longtemps réfléchi au sens que prenait l'amitié dans ces moments difficiles et comptait livrer ses reflexions à son professeur. La nature même des évènements bien sûr, l'en avait privée.
Quand elle repensait à la disparition du chien de Pipsqueak, Twilight ne pouvait s'empêcher de se dire qu'elle aurait bien aimé elle aussi, que ses amies l'aident à faire son deuil de Celestia. Mais peut-être parce que la Princesse était un petit peu la mère de chaque equestrien, aucun poney n'avait pris le temps de s'assoir et de réaliser véritablement ce que la mort de Celestia signifiait.
A la place, Equestria s'était emballée et avait joint ses forces à celles de d'autres nations dans un conflit d'une ampleur sans précédent. A côté de cette Grande Guerre, les conflits des Trois Tribus ou le Temps du Chaos de Discord ressemblaient à des jeux d'enfants.
Twilight aurait peut-être pu supporter davantage la situation si leur groupe ne s'était pas retrouvé détruit face à ce traumatisme. Entre celles qui soutenaient activement la guerre, celles qui y étaient opposées et celles qui ne voulaient rien à avoir à y faire, la tension avait grimpé très rapidement, au point d'exploser et de provoquer la scission du groupe.
Mais les choses étaient ainsi. La jeune licorne, privée de ses amies, d'abord de Rainbow et de Fluttershy, parties au front, s'était rapidement tournée vers ceux qui avaient toujours été là pour elle, dès Canterlot à l'école pour surdoués, bien avant son installation à Ponyville.

Les livres.
Twilight avait toujours aimé lire et étudier, cela faisait partie de sa personnalité la plus profonde, tout en veillant à sortir de temps en temps et de passer du temps avec ses amies. Fatalement, avec l'effritement de la bande, ils avaient repris de l'intérêt dans sa vie.
Le coup de grâce, Twilight l'avait reçu quand Rarity lui avait annoncé, ainsi qu'à Applejack et à Pinkie Pie, sa décision d'accepter l'ordre de mission de la Princesse Luna et de rejoindre le corps diplomatique equestrien. Twilight avait ressenti la nouvelle comme un coup de sabot en plein ventre. Que Rainbow parte à la guerre, cela avait désolé toutes les ponettes mais cela semblait logique : la nature aventureuse de la pégase l'appellait naturellement au combat. Le départ de Fluttershy avait été bien plus dur à avaler même si cette dernière avait poliment et calmement exposé ses raisons. Mais Rarity ?
A la reflexion, Twilight aurait sans doute plus accepté que Rarity parte au combat elle aussi plutôt que de devenir diplomate. Mais sûrement pas sous les ordres express de Luna.
Twilight n'aimait pas Luna pour une raison simple : c'était elle qui avait pris la décision d'engager Equestria dans la guerre. Certes, tous les poneys du pays demandaient réparation pour la mort de leur souveraine mais ce n'était que de la colère irrationnelle, provoquée par la douleur de l'assassinat de Celestia. Si Equestria avait pris le temps de souffler quelques mois, de se calmer, les poneys auraient compris que la seule solution logique aurait été de ne pas bouger et de ne surtout pas mettre un sabot dans ce grand suicide collectif qu'était cette Grande Guerre.
Luna faisait sûrement partie des poneys les plus dévastés par la mort de sa soeur, Twilight pouvait bien l'admettre. C'était sa façon de gouverner qui l'était moins.
L'alicorne avait engagé la nation dans un effort de guerre total et avait personnellement juré sur la tombe de Celestia que la Principauté ne prendrait pas de repos avant la victoire finale de la Triple Alliance.
Enfin, "principauté"..."Empire" serait plus juste. Luna s'était couronnée elle-même "Impératrice d'Equestria" très peu de temps avant le début de la guerre. Elle avait ainsi expliqué s'alligner sur le régime de leurs alliés, l'Allemagne et l'Autriche-Hongrie, toute deux aux mains d'un empereur.
Plus tard, l'entrée en guerre des ottomans et des bulgares avait prolongé cette politique.
Twilight avait très rapidement decellé la faiblesse du raisonnement. En agissant ainsi, les dirigeants de la Triplice voulaient donner une autorité à leur guerre, suggérer l'alliance des empires contre le reste du monde. Sauf que ce n'était pas vrai : le roi anglais, George V était à la tête de l'Empire Britanique, le tsar Nicolas II était Empereur de Toutes les Russies et la France elle-même, seule république à participer à cette guerre, avait mobilisé son Empire colonial.
Ce n'était pas les empires contre le reste du monde, c'était des empires contre d'autres. Ce qui ne rendait le tout qu'encore plus absurde. Les poneys n'avaient rien à faire dans les affaires humaines.
Cela dit, Twilight devait bel et bien avouer qu'ils étaient fascinants ces humains. Elle en connaissait déjà beaucoup sur les manticores, les hydres ou les cocatrix mais extrêmement peu sur les humains. Voilà pourquoi l'essai du comte de Gobineau était rapidement devenu un de ses nombreux ouvrages de référence pour essayer de comprendre cette race encore obscure. Au fil des mois, la licorne avait rassemblé une impressionnante collection mais l'Essai sur l'inégalité des races restait son préféré. Elle avait encore du mal à tout saisir et ne suivait pas Gobineau sur plusieurs points, comme cette idée qu'il existait plusieurs races à l'intérieur de la race humaine, se différenciant uniquement par leur couleur de peau mais elle était toujours avide de le lire et de le relire encore, pour essayer d'en tirer le maximum d'information.

Plus tôt ce matin, Spike l'avait pratiquement jetée dehors sous prétexte de faire le ménage à fond dans la bibliothèque. Twilght savait très bien que son assistant avait pris ce prétexte pour la pousser à sortir le museau de chez eux et prendre un peu le frais. Twilight avait donc accepté de passer la matinée à l'extérieur mais pas sans son livre. Elle avait aussi pris avec elle une bouteille d'eau pour ne pas mourir de soif un fois au parc.
La licorne avait trouvé des rues presque vides, comme dans toutes les villes d'Equestria d'ailleurs. Les poneys qui n'étaient pas partis directement se battre avaient rejoint les pays alliés pour soutenir l'effort de guerre. Ceux qui avaient totalement refusé de prendre part au conflit d'une manière ou d'une autre devaient se compter sur le sabot d'un poney unijambiste.
Ici et là, Twilight avait bien croisé quelques poneys ou licornes mais cela n'avait plus rien à voir avec la masse compacte d'habitants que comptait Ponyville dans ses meilleurs jours.
Seules les affiches de propagande, qui encourageaient les equestriens à s'engager ou à souscrire à l'emprunt national donnaient une impression étrange à la ville. Pour le reste, hormis qu'elle était plus calme, Ponyville n'avait pas changé. Et c'était bien ça que maudissait Twilight. La guerre était devenue banale et ordinaire et même plus encore, elle était devenue omniprésente. Pas un jour sans qu'on parle de mouvements de troupes, d'annonces de victoires ou de défaites, de grands dicours patriotiques...
Twilight n'avait jamais cru vivre ça. Elle aurait probablement tout donné pour que ce cauchemar s'arrête et qu'Equestria ne retourne à la normale.
Mais il fallait croire que certaines choses avaient des limites...
Twilight finissait un paragraphe du comte, consacré au métissage des races et à ses conséquences quand elle sentit une présence au dessus de son épaule. La licorne n'eut même pas à se retourner tant elle put avec facilité, en se basant juste sur le parfum facilement reconnaissable, pour identifier celle qui se tenait derrière elle.

_Bonjour Twilight ! hasarda cette dernière.
-'jour, Rarity, répondit à demi-mot l'étudiante en magie.
Sans y avoir été invitée, Rarity prit place sur la couverture, à côté de son amie. Comme la nuit précédente, Twilight choisit de l'ignorer délibérement, plongée dans son livre. Au bout de quelques minutes de cette pesante situation, Rarity se força à briser le silence.
_Twilight chérie, écoute, hasarda la diplomate. Je comprends que tu sois en colère après ce qui s'est passé. Après la mort de Cel...
La licorne se reprit in extremis avant de prononcer le nom de la souveraine défunte, se rappelant dans quel état cela avait mis Twilight quelques heures plus tôt, quand elle avait commis cet impair.
_Après la disparition de la Princesse, reprit Rarity en s'efforçant d'enrober au maximum sa voix, tout s'est emballé. Ce n'est pas à toi que je vais apprendre ça.
Twilight eut un léger, presque infime mouvement du museau. Rarity prit cela pour une approbation et encouragée, poursuivit.
_Tu as le droit d'être en colère contre quelque chose si ça te permet d'aller mieux. Et si ce "quelque chose" c'est moi, j'arriverais à y survivre.
Rarity marqua une pause, tendit doucement le sabot et le posa délicatement sur la patte de son amie. Twilight se tendit mais ne retira pas sa jambe. Avec un long soupir, elle referma magiquement son livre et pour la première fois depuis le retour de Rarity à Ponyville, elle la regarda droit dans les yeux.
_Je continuerais à t'en vouloir tant que tu travailleras pour Luna, dit Twilight, sans douceur mais sans froideur excessive non plus dans la voix. Je pense que je finirais par te pardonner un jour. Mais il faudrait déjà que tu quittes ton poste.
Rarity eut l'ombre d'un sourire, l'air de dire "si seulement".
_J'aimerais que ça soit aussi simple chérie, vraiment. Et je te jure sur la tête de Spike que je m'en irais du service de l'Impératrice à la seconde où ma mission diplomatique se terminera. Mais pour ça, il faudrait que la guerre s'achève...
_La guerre, la guerre...maugréa Twilight. Tu vas t'y mettre toi aussi à me parler de la guerre ?
_Ce n'est hélas pas quelque chose qu'on peut écarter d'un coup de sabot, lâcha Rarity en haussant les épaules. Moi aussi je préférerais parler avec toi de l'histoire de la magie ou de la dernière mode des chapeaux à Canterlot. C'est juste qu'on ne peut pas.
La licorne eut un soupir amer.
_Les choses finiront par redevenir normales mais pour l'instant, on ne doit pas fuir nos responsabilités.
_Quelles responsabilités ? interrogea Twilight d'un ton brusque. Celui de tuer le plus d'humains possible en envoyant tous les poneys d'Equestria à la mort au nom de Celestia ? Tu crois que la Princesse aurait voulu ça de son peuple ?
_Ce qu'aurait voulu la Princesse est malheureusement hors de propos Twilight. Elle n'est plus là et nous devons suivre les désirs de sa soeur.
_Génial, ironisa Twilight. Une alicorne archaïque pour remplacer la meilleure souveraine de tous les temps, on peut dire qu'Equestria a gagné au change !
_L'Impératrice n'est pas si archaïque que ça chérie. Tu le sais, c'est toi qui l'a aidée à s'intégrer pendant la Nuit des Cauchemars. Luna est plus austère que Celestia, c'est sûr mais elle aime profondément son peuple.
_Tu ne me convaincras pas, la coupa Twilight. Tant que Luna n'aura pas compris qu'il faut signer la paix avec les nations humaines et se retirer de ce bourbier avant que tout ne soit perdu, je ne lui ferais pas confiance.
Rarity marqua un temps d'arrêt, interloquée.
_Tu soutiens Blueblood ?
Le prince Blueblood, neveu de Celestia et de Luna avait été un des très rares poneys à tourner le dos à la guerre, prophétisant qu'Equestria était une nation bien trop évoluée pour s'abaisser à entrer dans un "conflit de paysans".
Blueblood avait alors au fil des mois plusieurs fois exposé publiquement son souhait d'une paix blanche avant d'être lentement rejoint par la masse grandissante des poneys ecoeurés par la dureté et l'horreur de la Grande Guerre.
La faction du prince avait même fini par tenter un coup de force contre Luna en essayant de renverser l'Impératrice alors qu'elle s'était rendue à Manehattan pour un discours officiel. Le putsch avait lamentablement échoué et Blueblood et ses fidèles s'étaient alors enfuis dans les Alpes toutes proches, pour se cacher des représailles impériales.
A ce qu'on disait, le prince livrait une véritable guerilla depuis les montagnes pour affaiblir le régime et tenter un second coup d'Etat où son premier geste en tant que régent, serait de signer la paix.
On disait aussi qu'il n'était qu'un malheureux pantin entre les sabots de ses conseillers, tombés en disgrâce lors de l'ascension de Luna et que leurs motifs pour prendre le pouvoir étaient bien plus personnels et intéréssés que nobles et pacifistes.
Mais on disait tellement de choses...
_Je ne suis ni pour le prince, ni pour Luna, lâcha la licorne d'un ton décidé. Je suis juste pour la fin de cette guerre affreuse qui nous prive de nos proches.
Rarity hocha silencieusement la tête. Elle n'avait rien à rétorquer à Twilight sur ce point.
_Twilight, tu sais, ce matin, j'ai eu une audience avec l'Impératrice. Et il se pourrait qu'elle soit d'accord pour lever le bannissement d'Applejack.
_Vraiment ?
Twilight releva brusquement la tête et de la chaleur apparut instantanément dans sa voix. Rarity eut également l'impression que la robe de son amie retrouvait un violet plus vif.
_Tu es sérieuse ?
_Tout ce qu'il y a de plus sérieuse. Mais elle a posé une condition à ça.
_Qui est ?
La diplomate eut l'air d'hésiter.
_Ca ne va sûrement pas te plaire...promets moi que tu me couperas pas et que tu me laisseras tout exposer jusqu'à la fin, d'accord ?
_OK, jura la licorne en levant sa patte avant droite.
Rarity bloqua de l'air dans ses poumons pendant quelques secondes avant de reprendre sa respiration de façon normale. Puis, elle se mit à débiter à un rythme de wonderblot lancé à pleine vitesse.
_Trixie vient de mourir à Bucarest et l'Impératrice pense que tu es la meilleure licorne d'Equestria pour prendre son commandement sur le front est.
Twilight marqua un temps d'arrêt, clignant plusieurs fois des yeux, comme pour dissiper un malaise dans son cerveau. Elle avait du mal entendre quelque chose. Par tous les poils de barbe de Star Swirl, Luna voulait qu'elle fasse QUOI ?
Devant le manque de réaction de son amie, Rairty se décida à répéter.
_Trixie vient de mourir à Bucarest et...
_J'avais donc bien compris la première fois. Donc c'est officiel, Luna est folle à lier. Elle veut que moi, qui déteste cette guerre plus que tout, j'y participe pour défendre ses couleurs. En fait non, elle est pas folle à lier mais juste complètement TIMBREE !
_S'il te plait Twilight chérie, tenta de la tempérer la licorne, ne crie pas aussi fort, d'accord ?
Autour d'elles, quelques têtes curieuses se tournaient vers la source de tout ce raffut.
_Je t'avais dit que ça risquait de ne pas te plaire, lui rappela Rarity avec un demi-sourire. Mais pour ce que ça vaut...je trouve qu'elle n'a pas tort sur ce point.
La diplomate se hâta d'enchaîner et de s'expliquer avant que son amie de la coupe.
_Tu es la licorne qui maîtrise le mieux la magie dans tout Equestria. Celestia le savait, Luna le sait aussi et toi aussi, même si tu as tendance à te sous-estimer. Les licornes sont peu nombreuses à servir directement sur le front. La plupart sont comme moi, dans les corps diplomatiques ou encore dans les services de propagande bref, servent le cabinet impérial depuis l'arrière. Autant que je le sache, Trixie était la seule a avoir explicitement demandé à être envoyée au combat, sur le front est en tout cas. Maintenant qu'elle n'est plus là, les troupes vont être privées de leur principal atout : la magie. Je suis sûre que Trixie était une tacticienne et une chef capable mais c'était surtout sa maîtrise de la magie qui aidait nos troupes. Elle faisait fondre la neige, elle arrachait les arbres pour permettre aux hommes de passer...c'était un plus indéniable.
Rarity marqua une pause, cherchant brièvèment ses mots.
_Tu es encore plus douée qu'elle. Avec ton talent magique, nos progrès sur le terrain pourraient être gigantesques !
_Je n'irais pas à la guerre Rarity, l'interrompit Twilight. Je ne veux faire de mal à personne.
_Mais qui te parles de ça ? Ca sera comme le Nettoyage d'Hiver...en plus gros.
_Tu oses comparer la guerre au Nettoyage d'Hiver ? formula Twilight d'un air dégouté. Ca suffit, conclut-elle en se relevant et en fourrant son livre dans son sac. Je rentre.
_Twilight attends ! la supplia la diplomate.
_Non Rarity, lui siffla la licorne en s'éloignant, emportant sa couverture avec elle. J'ai accepté de t'écouter mais pas d'être d'accord avec les horreurs qui sortent de ta bouche.

Rarity resta interdite, à voir son amie s'éloigner d'elle et gagner la sortie du parc. Mais qu'est-ce qui lui avait pris de mettre la Grande Guerre et le Nettoyage d'Hiver sur le même tapis ? Est-ce qu'elle n'était pas censée savoir un minimum parler ?
Prise d'une impulsion de rage contre elle-même, Rarity fut à deux poils de crinière d'expédier son sabot contre une pierre, pour évacuer sa frustration. Seule la crainte de se le fendre et de ruiner le magnifique travail du manucure du Spa d'Aachen retint son geste.
En colère d'accord mais une lady avant tout.
C'était donc la mort dans l'âme et le sabot traînant que Rarity gagna sa demeure.
Elle n'avait pas encore eu le temps de se réinstaller et sa maison, sans parler de son atelier lui manquait cruellement. Même si elle n'avait plus le temps de toucher au tissu, la licorne s'était toutefois promis de prendre quelques heures pour travailler sur des nouvelles robes.
Reprendre son ancien travail, même si c'était seulement pour quelques jours, lui ferait du bien.
La licorne venait de tourner la clé dans la serrure et avait poussé la porte de la Carousel Boutique avant de poser le sabot sur un papier soigneusement plié. Rarity supposa qu'on l'avait glissé sous la porte depuis l'extérieur. Elle le déplia et reconnut au premier coup d'oeil l'écriture de sa petite soeur, Sweetie Belle.
"Soeurette.
Je t'écris cette lettre pour te dire de ne pas t'inquièter mais je suis partie de chez papa et maman. Applebloom est trop triste depuis que sa soeur a été chassée par Luna, donc Scootaloo et moi, on a décidé de l'accompagner pour la retrouver. Applejack, pas Luna. T'en fais pas, les Croisées veillent sur moi. Et puis une fois qu'on aura retrouvé AJ, on aura sûrement des cutie marks d'exploratrices, comme Daring Do !
Je dois y aller, les filles m'attendent.
Je t'embrasse.
Sweetie Belle."
Rarity laissa retomber la lettre au sol dans un silence de mort et son esprit fit le point sur les derniers évènements : Twilight avait été disposée à l'écouter jusqu'à ce qu'elle gaffe, la fin de la guerre semblait s'éloigner au fur et à mesure que les jours passaient et maintenant, Sweetie Belle avait fugué avec ses deux meilleures amies pour retrouver Applejack, officiellement considérée comme une paria par la nation pour laquelle travaillait la licorne.
Un mot de cinq lettres, lâché haut et clair, franchit alors la bouche de la diplomate et résonna dans toute la boutique déserte. Un mot de cinq lettres que la licorne promit jusque sur son lit de mort, de n'avoir jamais prononcé car il était de notoriété publique, que les ladys dignes de ce nom, ne juraient jamais...

Chapitre Deux

Le fait que Fluttershy était la première de tout le corps expéditionnaire equestrien à mettre le museau dehors n'était pas une nouveauté.
Elle avait toujours eu l'habitude de se lever tôt, depuis son installation dans Ponyville pour s'occuper des animaux et ce n'était pas la guerre qui la ferait dévier de sa routine.
Les autres poneys présents sur le front avec elle avaient un peu de mal à comprendre son entêtement à être debout aux premières lueurs de l'aube pour aller nourrir les animaux de la ferme mais les soins qu'elle leur prodiguait en tant qu'infirmière du PegasusKorps étaient assez bons pour qu'ils ne posent pas de question.
Un sac de graines sous l'aile, Fluttershy pénétra dans le poulailler. Les gallinacés se précipitèrent autour de leur maîtresse, caquetant et gloussant à la vue de la nourriture. La pégase déposa délicatement leur dose quotidienne dans leur mangeoire. Il n'y avait pas grand chose hélas : la majeure partie des ressources qui parvenaient au front étaient utilisées pour les hommes et les poneys. En conséquence, Fluttershy devait prélever sur sa propre part d'officier pour offrir aux animaux de quoi ne pas mourir de faim.
Quand on prenait quelques instants pour y repenser, la situation semblait complètement irréelle : Fluttershy, sous-lieutenant dans l'armée equestrienne, il y avait de quoi dresser l'oreille. La pégase elle-même avait été la première surprise de son impulsion à rejoindre le corps expéditionnaire.
Elle avait pris sa décision à la seconde où Rainbow Dash avait prise la sienne. Cela avait semblé impossible à Fluttershy de laisser celle qu'elle connaissait depuis toujours partir seule là bas. Bien sûr, l'idée de la guerre avait effrayé la pégase, au point d'en faire des cauchemars la nuit mais elle avait encore préféré cauchemarder et pourvoir se regarder en face dans le miroir le matin que de dormir d'un sommeil paisible alors que Rainbow affrontait les balles françaises et anglaises.
Fluttershy avait cependant posé comme condition de ne suivre aucun entraînement militaire et de ne pas apprendre à se battre. Aller au front soutenir les poneys d'accord. Tuer pour y arriver, il y avait des limites que la pégase se refusait de franchir.
Le choix du corps médical s'était imposé presque de lui-même à Fluttershy. Quelque part, c'était là où elle était la plus utile, à aider poneys et pégases à se remettre sur leurs sabots, à combattre la mort les yeux dans les yeux. Bien sûr, Fluttershy n'ignorait pas que la plupart de celles et ceux qu'elle soignait ne se relevaient que pour tomber plus tard, ce qui lui minait le moral mais la pégase se persuadait qu'au moins, elle leur avait donné quelques jours de plus. Et c'était déjà ça.
Prendre soin des animaux était un plus et presque un travail à part entière mais Fluttershy y tenait. Il y avait eu trop de terriers de lapins ensevelis par les tirs d'artillerie, trop de nids d'oiseaux emportés par une balle perdue et trop de mares au canards noyées sous les attaques au gaz pour qu'elle refuse de faire quelque chose. Les animaux et la nature étaient les premières victimes de cette horrible guerre. Fluttershy était infirmière et son travail était de les aider, eux aussi.
A cet égard, le fait que le PegasusKorps prenne ses quartiers dans un corps de ferme avait été plus qu'utile. Fluttershy avait ainsi pu reprendre telle quelle toute une partie des bâtiments, qui n'avait ainsi pas déviée de sa tâche première : s'occuper des animaux.
Une des poules, plus hardie que les autres, vint directement picorer au pied de Fluttershy.
La pégase gloussa, amusée par l'attitude de l'animal. Elle allait mettre une seconde fournée de graines dans la mangeoire mais un bruit d'enfer éclata à l'extérieur semblable à un ronronnement métallique, effraya les animaux qui coururent se réfugier dans un coin du poulailler. Fluttershy se mordit la lèvre de dépit, maudissant d'avance celui ou celle qui osait faire tourner un moteur à plein régime aussi tôt le matin.
Elle passa la tête par la porte du bâtiment et repéra à quelques mètres d'elle, un de ces chars modernes que les humains appelaient voiture, dégager une fumée d'enfer, empuantissant les environs. La pégase laissa tomber à même le sol le sac de graine et se dirigea à grands pas vers le véhicule, bien décidée à ordonner au conducteur d'être plus silencieux.
_S'il vous plait ! ordonna t-elle d'une voix douce mais ferme à la fois. Pourriez-vous couper votre moteur ? Vous faites peur aux animaux !
Fluttershy aurait peut-être réfléchi à deux fois si elle avait vu la croix de fer, tracée à la craie à même la portière, pour indiquer le rang du passager de la voiture mais la poussière et la fumée de la voiture masquaient en partie le véhicule à la pégase.
_S'il vous plaît ! répéta t-elle plus fort. Je vous ai demandé quelque chose !
A ce moment précis, la portière s'ouvrit et le passager de la voiture en descendit. Stupéfaite, Fluttershy vit se matérialiser sous ses yeux un immense officier, bardé de décorations avec casque à pointe et grand uniforme. La pégase avait beau avoir encore un peu de mal à faire le distinguo exact entre les différents grades de l'armée allemande, elle était sûre et certaine que celui qui se tenait devant elle était un officier. Et de haut rang.
En repensant à son impolitesse, elle rougit et se confondit en excuses :
_Oh je vous en prie mon général, excusez-moi, je ne savais pas qu'il y avait un officier dans la voiture, je vous assure, je ne voulais pas vous parler aussi durement, je suis absolument navrée, je...
L'officier la regarda d'un air neutre pendant qu'elle se répendait en regrets avant de partir dans un fou rire. La situation dura pendant quelques secondes, l'allemand riant aux éclats devant une Fluttershy plus embarrassée que jamais. Puis en un tournemain, l'officier reprit une stature toute militaire.
_Ce n'est pas la peine de me donner plus de grade que je n'ai...je ne suis que colonel, pas général. Et vous avez parfaitement raison du reste, c'était très impoli de notre part d'arriver avec autant de raffut aussi tôt.
Il donna ordre à son chauffeur de couper le contact avant de se retourner vers Fluttershy :
_Depuis le temps que je dis que rien ne vaut une marche à pied mais l'Etat-Major m'impose toujours les voitures...
Le colonel attendit un sourire de la part de la pégase qui vint timidement.
_Colonel von Aesch. J'étais venu apporter en personne ses instructions au lieutenant Rainbow Dash, enchaîna t-il devant le mutisme de l'infirmière.
_Je suis le sous-lieutenant Fluttershy. Dashie..oh pardon, le lieutenant Dash ne sera pas encore debout avant au moins quinze minutes. Est-ce que vous voulez que j'aille la réveiller ?
Geste négatif de la part de l'officier.
_Ce n'est pas la peine. Je suppose que quand le lieutenant sera debout, elle ira manger un morceau ? Alors je peux très bien passer le prochain quart d'heure au mess à l'attendre. Et puis je vous avoue qu'un peu de charcuterie et un bol de café me ferraient le plus grand bien !
Fluttershy hocha silencieusement la tête puis d'un geste du museau, invita le colonel à la suivre dans un bâtiment voisin. Le mess avait été établi dans une des granges du corps de ferme, pour permettre à un maximum de poneys de manger ensemble.
Les tables et les bancs étaient de simples constructions en bois mais le PegasusKorps ne cherchait pas l'esthétisme dans cette pièce. La salle était encore assez vide à cette heure de la matinée, la plupart des poneys du corps expéditionnaire ne se léveraient que dans une heure ou deux, selon les roulements des tours de garde.
Pourtant, le mess n'était pas déserté pour autant : quelques léve-tôt appréciaient leur tasse de thé ou de café avant d'aller au combat tout en discutant des dernières nouvelles du front ou en se racontant la dernière blague à la mode sur le front.
Une pégase grise aux yeux loucheurs s'affairait à servir un couple de poneys en herbe fraichement coupée.
_Derpy ! l'appela Fluttershy. Tu veux bien servir du café et une saucisse ou deux au colonel ?
Elle acquiesca et parti à tire-d'aile dans les cuisines, chercher le petit-déjeuner qu'on venait de lui commander, manquant au passage, de percuter une de ses collègues qui se tenait dans l'allée.
Derpy Hooves était sans doute la membre la plus maladroite du PegasusKorps mais il n'était venu à l'esprit d'aucun poney de l'en exclure. La pégase avait fait partie de la toute première fournée de volontaires pour le corps expéditionnaire, la même que Rainbow Dash et Fluttershy.
Malheureusement pour elle, les rêves de vol de Derpy avaient pris fin quand son strabisme l'avait fait décrocher de son escadron et amenée à portée de la DCA ennemie.
La pégase avait pu s'en sortir miraculeusement indemne mais son handicap avait été jugé trop sévère et le danger qu'il pouvait représenter, à la fois pour elle et pour les autres avait poussé l'Etat-Major poney à l'inciter très fortement à rester à terre.
Derpy avait fait contre mauvaise fortune bon coeur et s'était naturellement imposée au mess, en grande partie grâce à ses talents de pâtissière, réussissant les muffins comme personne. Depuis, Derpy s'occupait essentiellement de la cuisine et si son inatention lui jouait encore des tours, cela n'avait pas de conséquences plus graves qu'un oubli de sauce ou une substitution de plats.
Le colonel prit place autour d'une table gravée de dessins et d'inscriptions à même le bois. Fluttershy resta deux pas derrière lui jusqu'à ce qu'il lui fasse signe de le rejoindre.
_Je vous en prie, ne soyez pas timide.
Fluttershy voulut répondre quelque chose mais fut ravie de ne pas avoir à le faire en voyant Derpy revenir vers eux, les pattes serrées contre sa poitrine, transportant une importante quantité de charcuterie, de cafetières et de couverts. L'infirmière sentit le drame arriver avant même qu'il ne se produise. Par un effet de mimétisme ou simplement par habitude, les poneys qui entouraient Derpy prirent sur eux de reculer de quelques pas et d'éloigner assiettes et nourriture du bord des tables. Sans que personne ne comprenne vraiment comment elle avait pu se débrouiller, Derpy sembla flancher, se fit un croche-patte à elle-même et étendit brusquement les sabots pour se rattraper avant de toucher le sol.
Ce faisant bien sûr, en lâchant tout ce qu'elle transportait.
Fluttershy vit avec horreur les couverts s'écraser au sol tandis qu'une saucisse imbibée de café venait se suicider en plein sur l'uniforme du colonel.
Comme pour ajouter au ridicule de la situation, la saucisse resta collée quelques interminables secondes avant de reprendre le cours de la gravité, en rebondissant sur le pantalon de l'officier avant de toucher terre avec un bruit mou et assez écoeurant.
Un silence de mort régnait à présent dans le mess. Ce n'était pas la première fois que Derpy renversait quelque chose et ça ne serait certainement pas la dernière mais jusqu'à présent, la pégase n'avait jamais rien renversé sur un officier haut gradé de l'armée impériale allemande !
_Oups...s'excusa la fautive en se relevant lentement. C'est de ma faute. Désolée...
Il n'en fallut pas plus à von Aesch pour partir dans un nouvel éclat de rire, comme il l'avait fait un peu plus tôt.
_Ha, ha, décidemment, plus je vous fréquente et plus je vous apprécie !
_C'est vrai ? s'enquit Derpy. vous n'êtes pas faché cotre moi ? Juré, je ne sais pas ce qui a mal tourné...
_Ne vous inquiètez pas ma petite, la rassura t-il. Ca ne sera pas la première fois que mon uniforme est sali. Et en plus, ça me fera un anecdote en plus à raconter dans les salons de Berlin !
Un large sourire s'afficha sur le visage de Derpy alors qu'elle ramassait les débris de couverts et de nourriture au sol.
_Je vais vous apporter des serviettes mon colonel, l'informa la pégase en battant en retraite vers les cuisines. Et avec votre petit-déjeuner quand même !
Fluttershy et les autres poneys avaient du mal à en croire leurs yeux.
Quand ils les fréquentaient, les officiers allemands étaient toujours si sérieux, si respectueux des traditions et du protocole...ça faisait bizarre de voir un gradé qui semblait s'amuser d'un rien.
On entendit la cloche de la ferme sonner six fois, heure du réveil général.
_Rainbow ne va pas tarder, informa Fluttershy alors que Derpy apportait à nouveau son repas à l'officier prussien mais petit à petit cette fois.
Et effectivement, quelques minutes plus tard, la pégase arc en ciel fit son apparition dans le mess. Elle salua respectueusement von Aesch en gagnant sa table et celle de Fluttershy.
_Colonel quand vous m'aviez dit que vous espériez me revoir bientôt, je n'imaginais pas vous prendre au pied de la lettre !
_Vous auriez tort de le faire, lui dit l'officier en faisant signe à Derpy de servir un autre bol de café pour Rainbow Dash. Ma présence à la ferme du PegasusKorps ce matin est tout à fait exceptionnelle.
_En tout cas, fit remarquer Rainbow en pointant du sabot l'uniforme maculé de café, on dirait bien que votre costume ne voudra pas revenir de si tôt !
Von Aesch sourit gentillement au trait d'humour de la pégase :
_Comme je l'ai dit à vos camarades, ce n'est pas l'uniforme le problème. Nous en avons assez dans toute l'armée allemande pour contrer des millions de saucisses au café.
_Saucisses au café ? répéta la pégase azur, en levant un sourcil.
_Ce sont les hommes qui nous manquent pour les porter notre problème, poursuivit von Aesch sans répondre à l'interrogation de Rainbow Dash. Vous voyez ici, sur le front ouest, nous jouons à un jeu d'équilibre avec les français et les anglais. Comme une planche tendue au bord d'un précipice. Nous nous déplaçons avec soin et eux aussi parce que le premier qui arrivera à faire basculer l'autre dans le vide aura gagné.
Le prussien s'interrompit quelques instants pour déguster sa saucisse, en prenant garde à ne pas tacher son imposante moustache.
_L'échec de Verdun nous a affaiblis. L'Etat-Major est persuadé que les français vont en profiter et préparent une grande offensive pour briser le front dans les semaines à venir, peut-être sur l'Aisne. Il est vital que dans les prochains jours nous nous tenions informés du moindre mouvement des troupes ennemies pour préparer notre défense en réaction.
_Vous renvoyez le PegasusKorps en mission d'observation ? demanda Rainbow.
_Pas exactement : nous venons de recevoir le tout dernier modèle de zeppelin, capable à ce qu'on dit, de faire des clichés encore plus précis que si vous preniez la photographie depuis le camp français et tout ça, à plus de sept mille mètres au dessus du sol.
_Impressionnant, commenta laconiquement la pégase en mâchonnant une tartine d'herbe.
_On le doit à la couronne equestrienne, concéda von Aesch. Ce sont vos savants qui l'ont mis au point. Toutefois, le zeppelin nécessite encore un baptême du feu et c'est là que vous intervenez lieutenant : je veux que vous et vous hommes protégiez l'appareil. Il est lui-même équipé de mitrailleuses mais nous ne tenons à courir aucun risque.
_Vous pensez que les français chercheront à l'abattre ? demanda soudainement Fluttershy, s'introduisant dans la conversation.
_Vous savez ce qu'on dit, répondit le prussien en lissant sa moustache, les français n'aiment pas la concurrence. Montrez leur un autre aérostat que construit par les frères Montgolfier et ils voudront tirer dessus.
Le colonel marqua un blanc avant de finir son café et de se lever.
_Plus sérieusement lieutenant, il est vital que ce zeppelin survive à son premier jour. Aux suivants aussi bien sûr mais si nous prouvons aujourd'hui aux français que notre nouveau dirigeable est inattaquable, nous conserverons un grand avantage sur eux. Ca pourrait être une des clés de la victoire finale. Est-ce compris ?
_Aussi clair qu'un ciel sans nuages, colonel, répondit Rainbow.
Von Aesch eut un mouvement du menton, l'air de dire "très bien", puis, sans rien ajouter de plus, il salua les pégases avant de tourner les talons et de quitter le mess.
Attendant que l'officier prussien ait quitté la salle, Rainbow Dash lâcha une flopée de jurons entre ses dents.
_Génial...on va passer la journée à empêcher les français de transformer un gros ballon plein d'hydrogène en torche. Quand tu sais qu'il faut pas plus d'une fusée bien placée pour faire tout brûler, je sens qu'on va rire...
_Ca sera peut-être pas aussi facile pour eux, fit remarquer Fluttershy à mi-voix. Je veux dire, le colonel a bien parlé d'un nouveau type de dirigeable non ? Si ça se trouve, il sera plus résistant...
_Peut-être, admit Rainbow en se reconcentrant sur son bol de café. C'est juste que je pensais que notre travail ici était de chasser l'ennemi du ciel, pas de l'empêcher de jouer à une version aérienne de plante la queue sur le poney avec des zeppelins et des fusées.
_En tout cas, l'avertit son amie d'une voix maternelle, fais très attention là haut, d'accord ? Encore plus que d'habitude.
_Te fais pas de bile Shy, lui répondit Rainbow d'un air inhabituellement sérieux. Je ferais gaffe à même pas me froisser une plume. Tu sais que je préférerais encore mourir plutôt que passer sur le billard de toute façon.
_C'est quelque chose que je n'ai jamais compris, avoua Fluttershy. Comment est-ce que ça se fait que tu sois toujours d'accord pour accepter les missions les plus dangereuses mais que l'idée de l'hôpital te fasse aussi peur ?
Le sourire goguenard de la pégase arc en ciel revint, effaçant son air maussade :
_Parce que ma vieille, les salopards qui m'attaquent dans le ciel, eux, j'ai le droit de les descendre en retour.

J'aime beaucoup, il y ac vraiment plein de bonnes idées, mais aussi plein d'histoires.
Tu vas toutes les faire ? Rainbow Dash au front, Rarity en diplomate, les CMC à l'aventure....
J'aime bien aussi le livre de Twillight. Que des bonnes idées !

FitzTheBard a écrit:

J'aime beaucoup, il y ac vraiment plein de bonnes idées, mais aussi plein d'histoires.
Tu vas toutes les faire ? Rainbow Dash au front, Rarity en diplomate, les CMC à l'aventure....

J'ai toujours pensé que c'était la variation des points de vue qui apportaient de la chair à l'histoire. Alors "toutes" les faire, ça dépend, certaines scènes sont partagées par plusieurs personnages et ça ne servirait à rien de les réecrire d'un autre point de vue, comme ici, après l'entrevue entre von Aesch et Rainbow, racontée du point de vue de Fluttershy, on passera à la mission, depuis les yeux de RD.

Point de vue d'Applejack et de Pinkie à venir d'ailleurs

Citation :

J'aime bien aussi le livre de Twillight. Que des bonnes idées !

C'a m'a semblé une évidence en fait : quel livre une intellectuelle de 1917 pourrait-elle lire sur une espèce inconnue ? Et paf, merci Gobineau. Encore heureux que ça se passe pas quelques années plus tard, elle serait cap' de bouquiner Mein Kampf

Les pattes solidement plantées dans le sol d'un haut plateau montagneux, le regard fixé sur l'horizon, Applejack mâchonnait un épi de blé en observant au loin, les plaines et les collines d'Equestria. Quelque part au loin, on pouvait apercevoir les ombres des buildings de Manehattan. L'ancienne fermière se demanda subitement comment son oncle et sa tante, chez qui elle était allé vivre quelques temps quand elle n'était qu'une petite pouliche, avaient vécu le changement de régime.
Connaissant les Orange, si attachés la bonne société manehattanienne, du moment que Luna ne les avait pas empêchés de tenir leurs petits dîners et de vanter les mérites de la ville, ils n'avaient pas du être plus perturbés que ça. Le cas était bien différent, bien sûr, pour la famille Apple.
Applejack n'en revenait toujours pas que Luna ait osé s'en prendre à Sweet Apple Acres. C'était elle qui avait prit position contre l'Impératrice, Granny Smith, Big Mac et Applebloom n'avaient aucune raison de mériter ce châtiment ! La confiscation du verger.
Là, Luna était allée trop loin. Applejack aurait accepté n'importe quelle peine du moment qu'on la punisse elle, pour ce qu'elle avait fait. Le reste des Apple était innocents comme la pomme qui venait de naître.
Applejack sentit ses yeux s'embuer et chassa une larme de quelques battements de paupières. Peut-être aurait-elle dû s'attendre à une réaction négative de la part de Luna. Après tout, dès qu'elle l'avait pu, la cowgirl avait toujours publiquement pris parti contre la politique de guerre de l'Impératrice et contre l'Impératrice en général d'ailleurs. Applejack avait estimé que la liberté d'expression existait encore en Equestria. Elle s'était trompée.
Il était vrai qu'elle n'avait pas mâché ses mots pour charger Luna mais après tout, n'était-elle pas l'honnête Applejack ?
AJ avait toujours dit ce qu'elle avait sur le cœur, en bien ou en mal. Et il s’avérait qu'à propos de la petite sœur de Celestia, c'était en mal.
La première chose qu'Applejack avait mal supporté, concernant la nouvelle souveraine d'Equestria, ce fut sa décision d'exporter l'essentiel de la production agricole du pays au front. AJ aurait sûrement été prête à vendre ses pommes et ses récoltes aux militaires, pourquoi pas ?
Mais le prix de vente imposé par l'Impératrice était tout simplement scandaleux : cinq bits le quintal de blé et six pour un boisseau de pommes ?
Est-ce que Luna était tombée sur la tête ? Même leurs plus mauvaises récoltes était vendues au moins le double de ces prix là et encore, en faisant un cadeau monstrueux à l'acheteur. Applejack se fichait bien que le prix sacrifié ait été établi afin de faire une fleur à leurs alliés, vendre à ce prix là, c'était cracher sur le travail des fermiers.
Alors, ignorant délibérément les ordres de Canterlot et parce que Sweet Apple Acres était à sa famille et pas à Luna, Applejack avait continué à vendre ses récoltes au prix ordinaire.
Et puis la deuxième, tout simplement, ce fut la transformation de la Principauté en Empire. AJ était une fille de la campagne, elle avait toujours regardé d'un air un peu moqueur les poneys de Canterlot et leurs belles manières. Ces petits fours et ces robes hors de prix, ça n'avait pas de sens quand on oubliait que des poneys avaient remué la terre et pêché pour fournir la nourriture des amuse-gueule ou que d'autres avaient travaillé d'arrache sabot le lin et la soie pour fabriquer ces beaux habits. Du temps de Celestia, l'alicorne solaire avait su montrer à son peuple un côté simple et proche des poneys ordinaires. Tout s'était dégradé avec l'arrivée de sa sœur au pouvoir.
L'alicorne de la nuit avait donné le feu vert à une ostentation écœurante de symboles, de parades et de cérémonies qui semblaient toutes indiquer que la nouvelle souveraine d'Equestria préférait les dorures du pouvoir au bien de son peuple. Jusqu'à changer le nom du régime et son titre de Princesse en Impératrice.
Ses positions sur la guerre, honnêtement, Applejack s'en était toujours moquée. Pour elle, ce qui comptait par dessus tout, c'était exploiter Sweet Apple Acres avec les siens et faire prospérer la ferme.
Ce plan avait changé, bien entendu, six mois auparavant, quand Luna avait envoyé ses gardes l'arrêter. On était en pleine moisson à l'époque et le soleil tapait fort sur tout Equestria. Le blé était jaune comme jamais et les épis ployaient sous leurs propre poids. Ca promettait une récolte du tonnerre. Applejack avait commencé par moissonner le champ est, seule, comme à son habitude pendant que Bic Macintosh se chargeait du champ ouest. C'était un jeu entre les deux fermiers, de savoir qui faucherait le plus de blé le plus rapidement possible, afin d'alléger la pénibilité du travail. Et cette année, AJ avait été bien partie pour gagner.
Tout était devenu bien plus compliqué bien sûr, quand l'armée royale equestrienne avait atterri directement dans le champ pour lui passer les fers aux sabots. Officiellement, ils avaient parlé avec des termes très compliqués, de "nationalisation des biens" et de "confiscation des récoltes" mais Applejack avait très bien compris ce qui se passait : Luna lui retirait Sweet Apple Acres.
Et ça, la cowgirl était prête à tout pour qu'on ne lui vole pas son bien. Et c'est ce qu'elle avait fait du reste : elle avait rué de toutes ses forces, expédié ses sabots dans des mâchoires de pégases, fait tournoyer sa faux pour tenir la garde royale à distance.
A dire vrai, Applejack ne se souvenait plus exactement comment tout s'était passé : elle se rappelait du bruit, de la chaleur, des gardes écrasant sans ménagement les épis de blé pour lui sauter dessus...elle avait fini par perdre le dessus et se faisait rouer de coups quand Bic Macintosh était arrivé juste à temps.
Il n'avait pas fait dans la dentelle lui non plus et tandis qu'il retenait les pégases, il avait hurlé à sa sœur de s'enfuir. Applejack avait senti au plus profond d'elle même que c'était une bataille qu'ils ne pourraient gagner et que son grand frère venait de se sacrifier pour lui offrir une chance de sortir de là le moins abimée possible. Alors AJ avait tourné les sabots et déguerpi au loin, sans même prendre une seconde pour embrasser Granny Smith ou serrer Applebloom dans ses pattes. Elle avait juste cavalé tout droit, le plus loin possible de Luna et de son pouvoir.
C'était la chance en fin de compte qui l'avait faite rencontrer les résistants avec qui elle luttait aujourd'hui.
Ils l'avaient découverte dans la montagne où elle s'était réfugiée avec la vague idée de quitter Equestria le temps que la tempête se calme et après s'être assurés qu'il ne s'agissait pas d'un piège tendu par l'armée impériale, ils l'avaient assez rapidement intégrée à leur groupe.
Depuis lors, Applejack dormait sous une toile de tente ou directement à la belle étoile et participait autant qu'elle le pouvait à des actions qui conduiraient, fatalement, à la chute de l'Impératrice. La spécialité des résistants étaient des raids sur les convois de vivres ou les assauts sur les positions militaires isolées. Les partisans n'avaient pas l'équipement et l'organisation de l'armée régulière, ils préféraient donc jouer sur la surprise de l'assaut et la vigueur de leur attaque. Ces raids toutefois, étaient globalement rares et les résistants passaient plus leur temps à galoper d'une cachette à l'autre dans la montagne qu'à réellement combattre.
_Ha vous êtes là mademoiselle Applejack. On vous cherche partout, vous savez. On lève le camp.
L’intéressée se retourna lentement pour découvrir une licorne mâle en costume-cravate recouvert de poussière. C'était d'ailleurs curieux de voir à quel point il semblait encore chic malgré la couche de crasse.
_J'arrive m'sieur Fancypants.
_Vous n'êtes pas obligé de me donner du "monsieur" à chaque fois, vous savez Applejack.
_Vous l'faites bien vous. Vous m’appelez toujours "m'zlle Applejack".
La licorne sourit en se rapprochant de l'ancienne fermière :
_C'est de la galanterie, une marque de politesse...un reste du gentlecolt canterlotien, je présume.
_C'est bien pour ça qu'on vous apprécie part'naire ! s'exclama Applejack en lui donnant un coup de sabot amical sur l'épaule.
Fancypants sourit une nouvelle fois, puis, fixant à son tour le regard vers l'horizon :
_Vous teniez d'apercevoir Ponyville, n'est-ce pas ?
Applejack eut un mouvement de la tête qui fit brusquement tomber son chapeau sur ses yeux. Sa façon à elle de dire "oui".
_Je comprends ce que vous ressentez, affirma la licorne en sortant un mouchoir de sa poche et en frottant son monocle avant de le remettre en place. Moi même de temps en temps, je me surprends à essayer de voir au loin les tours de Canterlot.
Il eut une sorte de soupir mixte, mi-fataliste, mi-rêveur.
_Nous sommes tous des exilés après tout et nos foyers nous manquent tous. Même si je pense qu'une fille des champs comme vous doit assez bien s’accommoder de dormir sous la tente, non ?
_J'vous avoue que je préférerais dormir dans mon lit à la ferme m'sieur Fancypants...vous pensez qu'on arrivera un jour à rentrer chez nous ?
_Vous doutez de nos capacités à renverser Luna ? demanda la licorne en levant un sourcil.
_J'sais pas trop. C'est juste que j'ai du mal à voir comment une poignée de nous autres dans la montagnes, on pourrait lui virer les fesses de son trône.
_J'aime toujours autant votre manière de parler ma chère, gloussa Fancypants.
Puis, il se força à redevenir sérieux.
_Vous savez mademoiselle Applejack, il est vrai que nous ne représentons qu'une goutte d'eau dans ce grand conflit qui a avalé Equestria. Et que nos forces peuvent paraître dérisoires face à la technologie impériale. Mais dites vous bien que notre mouvement gagne de l'ampleur à chaque instant où un poney prend soudainement conscience de l'horreur de la situation dans laquelle la politique belliciste de Luna l'a plongé. Quand ce petit boulanger de Fillydelphia voit son camarade horloger de Trottingham déchiqueté par les balles humaines ou vaporisé par un obus ou une grenade, cela s'ajoute à la longue liste d'horreurs qu'il a vues depuis le début de la guerre. Et il arrive un jour où ce petit artisan ne peut plus partir sur le champ de bataille la fleur au sabot. On lui en demande trop. Il veut que cela s'arrête, il veut retrouver sa famille et serrer son dernier né entre ses pattes. Alors, pour ne pas être jeté dans les cachots impériaux ou renvoyé en première ligne, il comprend que la seule solution logique pour que tout finisse est la chute de Luna et la signature immédiate d'un cessez-le-feu.
Il marqua une pause, nettoyant une nouvelle fois son monocle.
_Nous n'avons que peu d'armes, de munitions et de technologie de guerre, il est vrai. Mais nous avons le bon sens de notre côté et l'Histoire, ma chère Applejack, se place toujours derrière ceux qui ont le bon sens avec eux. Ainsi, pour répondre à votre question, non, je ne pense pas que nous rentrerons chez nous un jour. J'en suis sûr.
Les paroles de la licorne réchauffèrent le cœur d'Applejack et balayèrent ses doutes. Une fois de plus, Fancypants avait parlé en chef.
Ca n'avait rien d'étonnant par ailleurs : au sein des rebelles, le gentlecolt passait pour le leader naturel du groupe.
Officiellement, les partisans acceptaient l'autorité du Prince Blueblood, dirigeant autoproclamé de la Résistance mais les poneys qui lui étaient vraiment fidèles devaient être bien peu nombreux.
L'essentiel des rebelles provenait des rangs des poneys dégoutés du front ou spoliés par l'Impératrice d'une manière ou d'une autre. Plus rares étaient les cas comme ceux de Fancypants qui avaient choisi de se battre et de rejoindre la cause rebelle malgré une position confortable au sein de la cour impériale.
La licorne resta quelques secondes à regarder la ligne d'horizon sans un mot, puis, tourna brusquement les sabots et fit signe à l'ancienne cowgirl de la suivre :
_Allons mademoiselle Applejack. Le camp ne va pas se lever tout seul.
Applejack émit un hennissement d'approbation et se mit à suivre Fancypants le long d'un chemin escarpé. Ils devaient presque se coller à la roche pour ne pas glisser et s'écraser douloureusement quelques mètres plus bas. Les montagnes alpines étaient une cachette idéale mais qui n'allait pas sans quelques désagréments.
Alors qu'ils étaient encore à de longues minutes du camp, Applejack posa une question qui la taraudait depuis qu'elle avait rejoint la rébellion et était devenue amie, sinon proche de Fancypants.
_Vot' légitime, où-est-c'qu'elle est ?
_Je vous demande pardon ? lui répondit la licorne sans se retourner.
_Bah oui. La première fois qu'on s'était vus, à la garden party de Canterlot, vous étiez avec une bien jolie pouliche à la crinière rose. J'me d'mandais où c'qu'elle était parce qu'elle et vous, vous me sembliez plutôt proches...sans offense, hein !
_Ah, vous voulez parler de Fleur de Lys, comprit Fancypants et pour la première fois depuis le début de leur entrevue, une certaine cassure sembla étreindre sa voix. Disons que Fleur et moi sommes tombés en désaccord sur un problème assez épineux.
Applejack voulut relancer immédiatement la licorne pour en savoir plus mais le couple fut interrompu par un pégase à la robe cendrée qui vola jusqu'à eux à grande vitesse avant de s'adresser à Fancypants :
_Monsieur on a un problème au camp ! Il faut que vous veniez immédiatement !
Fancypants eut un geste d'approbation du sabot et se mit à descendre le chemin avec plus d’entrain. Applejack le suivait juste derrière.
Quand ils arrivèrent devant la grotte qui servait de base temporaire aux rebelles, ils remarquèrent vite les humains en uniforme vert discuter avec animation avec un groupe de poneys, tandis que l'essentiel des rebelles s'affairaient à démonter les tentes et à rassembler les affaires des partisans.
Applejack reconnut sans peine la nationalité des humains, aidée par les grandes plumes qui dépassaient de leurs chapeaux à larges bords . Des italiens.
L'Italie se trouvant extrêmement proche d'Equestria, n'étant séparée d'elle que par les Alpes, il était assez fréquent que les rebelles contactent en secret les éléments les moins recommandables de l'armée italienne, afin qu'ils puissent fournir armes, munitions et nourriture contre les gemmes et les pierres précieuses qu'on pouvait trouver un peu partout dans les hauteurs equestriennes.
Les marchandises apportées par les soldats consistaient en trois grosses caisses de bois, autour desquelles deux italiens veillaient jalousement, la main posée sur la crosse de leurs fusils.
Applejack n'aimait pas avoir affaire à eux. Si sur le papier, il étaient italiens, donc membres de l'Entente, ennemis des allemands, des autrichiens et de l'Empire d'Equestria, ils n'en étaient pas moins humains. Et la fermière n'oubliait pas que c'était à cause d'eux que son pays avait plongé la tête la première dans la fosse à purin.
Sans compter que ce n'étaient pas vraiment des soldats...plus des profiteurs cherchant un moyen d'arrondir leur maigre paye.
La discussion semblait animée et Applejack ne comprenait pas tout. La barrière de la langue était un des principaux problème qu'avaient rencontrés les poneys lors de leur ouverture au monde quand ils avaient découvert que leur langage était plus proche de celui des anglais que de n'importe quelle autre groupe humain. En conséquence, toutes les langues anglo-saxones étaient aisées à saisir pour le plus simple des poneys. Il en allait bien autrement pour les langues latines.
Cela dit, les soldats italiens avec qui ils trafiquaient baragouinaient de leur côté quelques mots d'anglais, assez pour se faire comprendre la plupart du temps. Applejack le nota par la présence de dessins et de signes tracés à même la terre, bien plus importants que d'habitude.
Lors de leurs accords, il était rare qu'italiens ou poneys aient recours à ces techniques à moins de vouloir préciser un certain mot ou une idée. L'ancienne fermière en conclut qu'un problème grave semblait diviser partisans et contrebandiers, sans qu'aucun des deux camps n'arrive véritablement à se faire entendre de l'autre.
Fancypants arbora son sourire le plus charismatique et alla à la rencontre des contrebandiers, dans un italien parfait.
Applejack, comme les autres poneys qui entouraient la licorne, regardaient la scène, stupéfaits que l'aristocrate maîtrise aussi bien une langue qui leur était inconnue. La licorne écouta longuement les arguments du chef des soldats avant de les traduire au poney qui détenait le sac de gemmes.
Ce dernier répliqua des choses sur la "frontière" et sur la "Suisse" qu'Applejack eut du mal à bien comprendre.
En revanche, elle saisit instantanément l'effet positif de l'intervention de Fancypants : les doigts s'éloignèrent des gâchettes et les poneys détendirent lentement les muscles de leur croupe.
Quelques minutes plus tard, sac de pierres précieuses et caisses de bois avaient changées de propriétaires, pour le plus grand bonheur de tous. Ravis, les italiens saluèrent jovialement les poneys avant de s'en aller, une corde d'escalade sous le bras, par un petit chemin escarpé. Les soldats étaient à peine partis que le poney qui parlait avec eux quelques instants plus tôt se plaignit vertement à Fancypants :
_On peut plus continuer à leur faire confiance ! Vous l'avez entendu comme moi, ils se moquent des conséquences de leurs actes !
_Et bien ce sont des contrebandiers avant tout, ne l'oubliez pas, répondit la licorne sans se départir de son flegme. Ils portent peut-être un uniforme mais ce qu'ils cherchent avant tout, c'est la richesse personnelle, peu leur importe les moyens qu'ils utiliseront pour y arriver.
_S'cuzez moi, s'exclama Applejack en rejoignant le couple mais y se passe quoi, là, exactement avec les emplumés du chapeau ?
_Ils ont coupé à travers la Suisse, répondit laconiquement le poney.
_Et c'est grave ? questionna Applejack qui ne voyait pas très bien ce que ça pouvait avoir à faire avec les échanges de matériel et de nourriture.
_La Confédération Helvétique est neutre, lui expliqua aimablement Fancypants. Et il se trouve que pour rejoindre nos montagnes, les italiens pour gagner du temps, violent une petite zone montagneuse suisse. Si le pays l'apprenait...
_...ils seraient pas longs à crier à l'invasion italienne et à se ranger derrière les boches et Luna, cracha sèchement le poney. On doit tout faire pour éviter que les Centraux se renforcent.
Applejack hocha lentement la tête. La plupart du temps, ce genre de discussion politique lui passait bien au dessus du stetson mais c'était suffisamment clair pour qu'elle comprenne sans problème.
_En gros, vous leur avez d'mandé de faire gaffe où ils posent leurs bottes, c'est ça, m'sieur Fancypants ?
_Oui, dit la licorne en hochant le museau. "En gros", comme vous dites, c'est ça, mademoiselle Applejack.
_En tout cas, repris énergiquement le poney, faut qu'on arrête de travailler avec eux. Vous l'avez dit Fancypants, ils sont pas fiables ! Faut qu'on récupère la nourriture et les munitions là où ça se trouve, dans les casernes !
La licorne leva un sourcil très aristocratique :
_Et puis-je vous demander comment vous comptez faire mon ami ? C'est justement parce que nous manquons d'équipement que nous devons marchander avec ces gens-là. Nous ne tiendrons pas cinq minutes face aux troupes impériales.
_Si on attaque tous en même temps, ça peut s'faire, fit remarquer Applejack.
_Je continue à penser que c'est une mauvaise idée. Plus tard, quand nous serons assez équipés, alors oui, nous pourrons descendre dans la vallée, reconquérir notre patrie à la force des sabots. Mais pas avant.
Fancypants, estimant la discussion close, se détacha lentement d'Applejack et du poney.
_Quoi qu'il en soit, je ne peux rien faire sinon soumettre l'idée au Prince quand nous le verrons, dans quelques jours. S'il donne son accord et que les autres chefs de groupe approuvent aussi, nous considérerons des actions. Mais encore une fois, pas avant.
Alors que la licorne s'éloignait paisiblement rejoindre la colonne de partisans, le poney fit une nouvelle fois la grimace.
_Tu parles d'une blague, lâcha t-il sans qu'Applejack puisse dire s'il pensait à voix haute ou s'il lui parlait pour de bon. Tout le monde sait que c'est Fancypants le vrai chef. Blueblood est qu'un pantin. Franchement, s'exclama t-il en regardant la ponette droit dans les yeux, tu te battrais dans la résistance toi, si y avait pas Fancypants ? Juste pour ce poseur de Blueblood ?
Applejack sentit ses yeux s'embuer une nouvelle fois alors qu'elle jetait un dernier regard vers Equestria avant de prendre à son tour, le chemin de la colonne :
_J'me battrais pour n'importe qui me rendra ma ferme part'naire. N'importe qui.
Et Celestia, si on pouvait ajouter les copines dans le panier à pommes, ca serait pas du luxe.

Yop! Voila mon avis:

-L'histoire à le mérite d'être intéressante. Le coup des avancés guerrière des allemands dûes aux poney m'a fait marré.
-Les personnages principaux sont assez fidèle à l'esprit du show (dans la mesure du possible au vu du contexte).

Spoiler:

Je suis ça de près.

(par contre, où est Equestria? Proche des Alpes, mais à part ça? Je suis trop mauvais en géo.)

Iron Pony Maiden a écrit:

(par contre, où est Equestria? Proche des Alpes, mais à part ça? Je suis trop mauvais en géo.)

En Bavière, je vois que ça.
Sinon, j'aime toujours, et je suis toujours.

Sans être spécifiquement impulsive, je vois plus Luna comme une souveraine prenant plus au sérieux que sa soeur la charge. D'où un attachement aux symboles, au protocole, à une certaine majesté, là où Celestia était un peu plus open bar.
Et logiquement, si on se monte contre la couronne, on morfle, surtout en période de guerre avec l'Union Sacrée et toussa.

Concernant la localisation précise d'Equestria, elle ne se trouve non pas en Bavière (parce que là, les italiens devraient se taper juste toute la Suisse du sud au nord pour livrer leurs armes) mais à l'extrème sud de la Confédération Helvétique, dans le Canton du Tessin.