- Citation :
- Est-ce qu'elle sera aussi longue ?
Sans aucun doute. Et j'espère que ce sera aussi intéressant pour vous à lire.
Merci des encouragements de départ et continuons sur notre lancée.
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01 - From Ashes to Fire
Le temps avait donc passé depuis cette nuit qui n'était ni la première ni la dernière. Les Nuits sans Étoiles étaient un rituel sacrificiel régulier. Dès que la nuit était aussi noire que l'encre, c'était le signe que le Dieu Phénix n'avait plus l'énergie nécessaire pour permettre au monde de survivre... et demandait l'essence de parmi les plus sages, les plus forts, les plus braves, les plus doués pour le nourrir, afin de permettre au Cycle de l'Existence de recommencer jusqu'à la prochaine Nuit sans Étoile. Telle une boucle sans fin, les tribus, marquées une brutale séparation raciale et ethnique, reprenaient le cours normal de leurs existences insignifiantes qui se répétait indéfiniment, le point de renouveau étant la fameuse Nuit.
Ils possédaient une vie très simpliste. Chasses, récoltes, prières... le développement des tribus des Cendres était inexistant. Les seules techniques qu'elles maîtrisaient était tailler la pierre et l'agriculture, et encore certaines étaient en retard de ce côté. Par conséquent, tout être un minimum civilisé pourrait se poser une question tout à fait légitime : comment ces êtres archaïques, si différents les uns des autres, ne se sont pas entretués dans différents conflits sanglants, anéantissant toute trace de vie dans les Cendres ?
Car tout membre de n'importe quelle tribu, même la plus misérable, même la plus arriérée, savait que ce serait inutile. Chacun avaient un point commun, une étoile à laquelle s'attacher.
Le Dieu Phénix.
Créateur de la Vie, de la Mort, de la Terre, des Cieux, du Matériel et de l'Immatériel. Tout ce qui existe dans ce monde, tout ce qui a existé et ce qui existera est grâce à la pensée du Dieu Phénix. Ses origines sont vagues et obscures, on le suppose né en même temps que la réalité, voir avant. D'après les peintures tribales qui s'étaient passés de génération en génération, il avait crée le monde à partir de cendres. Ses cendres. Elles avaient brûlés sur des kilomètres et des kilomètres, et des flammes avaient surgi montagnes, arbres. Un incendie comme il n'y en avait jamais eu, créant le monde tel qu'il existait.
Lorsque les flammes avaient disparu, la fumée s'était divisé en titanesques nuages. Le Dieu Phénix a utilisé sa volonté pour créer des souterrains et plaça la fumée dedans, créant l'eau.
Une fois la nature crée, le Dieu Phénix prit différents morceaux de la terre et forgea les différentes espèces peuplant le monde. Zèbres, lézards, griffons, chiens et j'en passe... il leur donna conscience entière, leur donnant le titre des races qui devaient diriger. Des morceaux de terre qui restaient, il créa les races qui devaient les servir et les nourrir, des animaux sans conscience hélas inférieurs, mais qui devaient exister pour que les races supérieures ne s'entredévorent pas dans un accès de folie.
Il les observa durant longtemps, les regardant se développer avec une compassion et un amour qui ne caractérisait que les êtres divins. Tout semblait bien se dérouler, une société commençait à se former, les gens vivaient heureux.
Puis, un funeste jour, il fut... fatigué. La réalité qu'il avait formé grâce à sa volonté était en train de s'écrouler sur lui-même. La lumière dont il inondait ses sujets était en train de mourir, de nombreuses maladies se répandaient parmi eux... lui, un Dieu immortel, ne pouvait même pas échapper à la Mort ! Quel paradoxe imbécile ! Et il ne pouvait rien y faire.
Les survivants du Cataclysme qui en suivit se réunirent sous une Nuit sans Étoiles, et prirent le meilleur d'entre eux, un zèbre, qui décida de se jeter dans le corps agonisant du Dieu Phénix, brûlant instantanément. La divinité absorba son essence vitale et retrouva toute sa vivacité passée. Il comprit alors qu'il ne méritait pas de diriger le monde, que ses sujets étaient assez intelligents pour le faire. Il alla les remercier et, avant de fusionner à tout jamais avec le monde qu'il avait crée, donna naissance à un Prophète modélisé à l'image de celui qui avait sauvé le monde. Un zèbre qui serait en contact permanent avec lui, qui saurait quand il faudra faire un sacrifice et qui devra le faire, son avatar sur terre. Et enfin, il s'effaça de l'œil des mortels, ne laissant que comme seule trace terrestre le sang des volcans, moyen pour lui d'absorber les sacrifiés.
Le Prophète forma ensuite une tribu et depuis règne sur les Cendres en tant que demi-dieu, bienveillant à première vue mais dont l'autorité était impossible à combattre.
Son nom est Kirin.
02 - Embers Tribe Theme ~ Unity through Faith
Le soleil s'était levé depuis longtemps sur la majestueuse colline qui dominait les Cendres. Parsemé de bâtisses rudimentaires en rochers et en bois mais qui réussissaient l'exploit d'être gigantesques, la seule et unique cité de ce pays était en pleine activité. La masse de zèbres et zèbresses se mouvaient telle une colonie de fourmis, parcourant les rues, discutant de ce qui leur était arrivé depuis hier. Ici et là, on voyait quelqu'un observer l'étalage de viande de bœuf qu'un chasseur avait récupéré au prix de nombreux efforts, ou bien une famille s'extasier devant de magnifiques poteries. Un troisième groupe, encore, était entièrement constitué de zèbresses qui portaient sur leurs têtes des vases d'eau, à rapporter à leurs domiciles. Quelques gamins jouaient ici et là avec une balle, sentant sur leurs flancs le vent chaud des savanes lointaines qui se faufilait à travers les bâtiments. Une dispute éclate soudainement entre deux des gosses qui se jettent l'un sur l'autre, se frappant à l'aide de leurs sabots tandis qu'un autre, plus jeune, les regarde avec une excitation aux limites de l'hystérie.
Plus loin encore, aux extrémités de la ville, un jeune couple contemplait les étendues sauvages des Cendres, notant au loin une montagne qui s'élevait à l'horizon, un des volcans de ces terres qui se reposait, vénérable. Ils étaient à une respectable hauteur, dominant les plaines avec un sourire béat sur le visage.
Plus loin toujours, dans des ruelles désertées, une petite zèbresse se met à courir, courir, courir avec toute la force que lui permettaient ses petits sabots. A un boulevard, elle tourne à gauche, bousculant une vieille qui se mit à l'insulter à toute vitesse. Elle l'ignore, un peu effrayée certes, mais ne perd en aucun cas sa vigueur. Cherchant tout les raccourcis, petits chemins délabrés que la cité avait à offrir, elle se dirigeait vers une personne précise.
« Zecora ! ZECORA ! »
Elle criait maintenant en direction d'une yourte un peu isolée par rapport aux autres. Essoufflée, elle marchait vers les rideaux miteux qui servaient d'entrée. Sans se prier, elle passa sa petite tête à travers l'ouverture pour voir s'il y avait quelqu'un. Elle poussa un petit cri lorsqu'elle fut poussée par une grande figure hors de la maison et atterrit sur le flanc en poussant un petit gémissement de douleur.
Devant elle se trouvait une zèbresse absolument magnifique. On ne pouvait vraiment dire si elle était gris clair avec des motifs gris foncés ou vice-versa. Reste qu'en tout cas le mélange de ses couleurs si proches donnait un résultat magnifique à observer, mis en valeur par les immenses boucles d'oreilles et colliers qu'elle avait, resplendissant d'un doré de milles feux. Sa chevelure elle, était très particulière. Il s'agissait d'une crête iroquoise qui passait du blanc au gris et du gris au blanc, les couleurs traînant un peu sur les côtés de son crâne.
Ses yeux bleus regardaient fixement la petite fille.
« Eh bien eh bien, qu'avons-nous là ? Que veux-tu donc, jeune fille ? » demanda-t-elle d'un ton sage.
« C'est... » elle hésita un peu. « C'est le Grand Prêtre. Il veut te voir. »
Zecora regarda le ciel bleu, silencieuse, puis murmura. « Bien. Merci. » avant de se mettre en route. Tandis qu'elle passait à côté de la petite, celle-ci put voir un tatouage sur son flanc : un soleil en spirale. Elle avala sa salive en le voyant. Cette jument mystérieuse vivait en solitaire mais... grâce à cette simple marque, elle imposait le respect à tous. Quiconque voyait ceci pouvait comprendre à tel point elle était exceptionnelle, à tel point le chemin qui s'ouvrait à elle était merveilleux... elle resta plantée là et se mit à espérer qu'un jour, elle puisse devenir comme elle...
Le Grand Prêtre habitait lui aussi dans une zone isolée de la ville, gardée par de nombreux zèbres à la carrure massive. Il s'agissait d'une zone que peu de personnes visitaient, sauf pour affaires ou prières pour le Dieu Phénix. Zecora s'y rendit d'un pas lent et calme, ignorant les regards posés sur son flanc. Au début, ça l'avait un peu... disons interloqué, mais au final elle s'y était habitué. Au final, quelle importance ça avait ?
Elle se retrouva devant une immense maison qui était au moins deux fois plus grande que la sienne, ignorant les zèbres qui s'écartaient à son passage. Aucune importance encore une fois. Elle fut néanmoins surprise de voir que devant l'entrée se trouvait un reptile aux écailles bleuâtres et aux yeux jaunes qui mâchonnait ses doigts d'un air nerveux et un chien au pelage brun et aux yeux bleus qui grattait nonchalamment le sol avec ses pattes. Les deux hochèrent la tête en la voyant afin de la saluer.
« C'est toi, Zecora ? Tu peux entrer, ils sont déjà en train de discuter. » dit le lézard d'une voix sifflante.
« Que se passe-t-il ? »
« Un problème qui demande des mesures. »
Il refusa d'en dire plus. La zèbresse entra à travers les rideaux et se retrouva plongé dans une semi-obscurité. Seul la lumière provenant de derrière elle et d'un trou dans le toit éclairait à moitié la grande pièce vide. Au centre se trouvait plusieurs coussins de paille où se trouvaient assis trois figures à l'air respectable. Un lézard aux écailles rouges, meurtri par le temps et possédant une barbe blanche, ses yeux roulant dans leurs orbites et observant fixement la canne sur laquelle il s'appuyait. Un chien à l'âge adulte, plus grand que tout ceux dans la salle, l'air droit fixe et sérieux, le museau grand et au pelage noir, ses yeux de la même couleur trahissant une détermination sans faille. Il était dans une tenue ornée de motifs représentant des brasiers, cachant la majeure partie de son corps.
La troisième était un zèbre qui semblait jeune mais dont la simple présence rendait silencieux les deux autres. Aux couleurs blanches et grises, il était debout, caressant avec difficulté sa barbichette noire avec son sabot. Ses cheveux courts et sales gris foncé tombaient par moment devant ses yeux, qui regardaient le motif de soleil en spirale qui ornait une grande partie du sol. Chose curieuse pour sa race, son front était muni d'une corne dont le bout était fissuré.
Les trois tournèrent leurs têtes vers Zecora qui recula machinalement d'un pas. Elle était observée par trois leaders.
« Alors, c'est donc elle, votre enfant prodige, Kirin ? » demanda le lézard d'une voix calme et chevrotante. « Ma foi, ma foi... intéressant. »
« Avancez-vous donc. » poursuivit le chien d'une voix autoritaire.
« Vous m'avez demandé. » affirma Zecora, ne laissant transparaître aucun sentiment avec sa voix. « Quel est le problème ? »
Le reptile se retourna vers Kirin qui ferma les yeux un court instant avant de les rouvrir.
« Un problème important. » dit le zèbre d'une voix bienveillante qui avait un certain don pour causer des frissons. « Rasha et Rognus, ici présents. » il désigna respectivement le lézard et le chien. « Ont tenu à m'informer qu'une étrange bête sauvage a commencé à massacrer leurs gibiers et commence à se promener de ce côté, selon leurs pisteurs. Malgré les différents chasseurs qu'ils ont envoyés, cette chose non identifiée a réussie à échapper à la moindre de leurs tentatives. »
« Un véritable fantôme. » poursuivit Rasha en frappant le sol de sa canne. « Aucun membre de ma tribu n'a réussi à l'attraper et encore moins à définir de quoi il s'agissait. Pourtant, nous savons qu'il nous enlève de précieux bœufs très prisés par mon peuple. Et c'est aussi le cas de Rognus. Nous avons des difficultés à nous départager correctement les ressources, si un tiers sans allégeance commence à s'y mêler... il est urgent de prendre des mesures immédiates et radicales. »
« C'est à ce moment que vous entrez en jeu. » acheva Rognus.
Zecora hocha la tête, attendant la suite. Ce fut à Kirin de reprendre la parole.
« Dehors se trouvent le meilleur pisteur et le meilleur guerrier qui puissent exister dans cette partie des Cendres. Borin, de la Tribu du Brasier, semble être un chien ordinaire mais aucune bête sauvage n'a survécu à sa lame. Asum, de la Tribu de la Fumée, est un prodige en matière de pistage et aucune bête ne lui a jamais échappé. »
« Et quel serait mon rôle ? »
« J'y viens. La bête a échappé à toute méthode classique. Mais toi... tes compétences en alchimie peuvent le prendre à dépourvu. Tu as à ton arsenal énormément de méthodes pour le brouiller, couper ses retraites, rendre tes alliés plus agiles ou discrets. Tu feras la différence entre cette expédition et les tentatives qui ont échoués. Comprends-tu ? »
Zecora ressentit sur elle de nouveau le regard des trois chefs, qui attendaient sa décision. Mais elle savait déjà qu'il ne pouvait y en avoir qu'une seule. En temps normal, elle aurait protesté contre une telle pression... mais aujourd'hui, une ultime fois, plus rien n'avait d'importance.
« Bien sûr, je comprends. » dit-elle, presque dans un murmure fataliste.
« Dans ce cas... » dit Rasha après un petit silence. « Prépare tout ce qu'il te faut, ma petite. Toi et les deux autres partirez dès que possible. » Lui et Rognus se levèrent en même temps et se dirigèrent vers la sortie, le lézard d'un pas laçinant tandis que celui du chien était plus dur et militaire.
« Rentrez dès que le soleil commence à se coucher, bien sûr. Nous ne voudrions pas vous perdre... pas de cette façon là. » dit celui-ci avant de sortir, accompagné de l'autre chef.
Zecora et Kirin se retrouvèrent seuls, s'observant dans le silence.
Ils se regardèrent. Le visage de la zèbresse était dépité, presque triste. Elle voulut faire demi-tour et partir mais elle fut soudainement écrasée par le poids du regret et se contenta de baisser la tête en poussant un long soupir.
« Que se passe-t-il ? » demanda le Grand Prêtre, inquiet.
« ... oh... pas grand chose. Je me demandais juste, à propos de tout ça... » elle désigna le symbole au sol.
« Je t'écoute. »
Elle resta silencieuse pendant quelques minutes, incapable de poser la question qui la démangeait depuis tout à l'heure. Puis, au prix d'un effort manifeste, elle demanda :
« Combien de temps me reste-t-il à vivre ? »
Ce fut au tour de Kirin de rester muet avant de regarder le trou dans le toit.
« Répondre à cette question voudrait dire que tu vas bientôt mourir, ce qui serait totalement faux. »
« Que voulez-vous dire ? »
« Cette marque que tu as sur le flanc, Zecora, est le signe que ta destinée est d'être unie avec le Dieu Phénix. Te rends-tu seulement compte de ce que ça veut dire ? Tu ne vas pas mourir. Mourir est le fléau des mortels... toi... tu vas transcender la Mort. Tu vas vivre éternellement à travers le Créateur, fusionnant avec les essences de tous les grands esprits qui t'ont précédés... tu auras accès à une connaissance et à un pouvoir infini. Tu deviendras plus sage que je ne l'ai jamais été en tant de printemps... ce qui t'attends, ma chère, est un destin que beaucoup d'entre nous rêveraient d'obtenir. »
La zèbresse considéra ces paroles et hocha la tête. Oui. Kirin avait raison sur toute la ligne, comme à son habitude. Néanmoins, l'idée d'être sacrifiée au Dieu Phénix déclenchait en elle un dégoût et une frayeur qu'elle ne pouvait contenir. Le Grand Prêtre, voyant sa peine et son tourment, s'approcha d'elle et lui tapota une épaule.
« Va, mon enfant, ne t'inquiète pas. Je serais avec toi jusqu'au bout. »
Zecora regarda dans ses yeux rempli de compassion et eut un petit sourire. Elle comprit que si elle devait disparaître de cette planète, autant qu'elle en profite pour aider autant qu'elles pouvaient les gens de ce monde.
Elle se retourna et d'un trait, sortit de la bâtisse et galopa chez elle, un peu plus décidée qu'auparavant. Kirin passa la tête à travers les rideaux et l'observa partir, sourire aux lèvres. Dans son âme, il lui souhaita bonne chance et pria pour qu'elle revienne saine et sauve.